L'amour d'une mineure mène à tout. Il mène jusqu'à pousser H. H., une mineure, à balancer, depuis le sixième étage, des centaines de dinars et des centaines d'euros vers le roucoulant Malik. A l'appel de leurs noms, Malik W., 21 printemps, inculpé de vol, H. H., 15 ans, et le papa S. T., victime qui poursuit Malik W. pour incitation au vol en puisant dans la poche du papa. La juge est visiblement au point. En n'ouvrant pas sa chemise et en dictant presque la grave inculpation à l'intention de l'ado beau gosse, proprement vêtu et présent à la barre en qualité d'inculpé libre. Elle dit tout de suite au beau Malik qu'elle n'avait pas l'intention de perdre du temps à courir derrière la vérité, le dossier étant bien ficelé. «Alors, qu'avez-vous à dire à propos de ces poursuites ?» «Madame la présidente, je connais H. H. depuis plus d'une année. Elle ne sort que pour aller chez ses proches. Nous nous voyons en cours de route dans un salon de thé de la capitale. Au mieux, un casse-croûte avalé à la va-vite. J'avais de bonnes intentions. Nous n'avons rien fait de mal. Je m'excuse auprès de tonton pour...» «Non, ne m'appelle pas tonton. Je ne suis pas ton oncle.» «Monsieur, nous sommes dans une salle d'audience et le tribunal vous somme de ne plus interrompre l'interrogatoire. Vous aurez tout le temps tout à l'heure de dire ce que vous avez sur le cœur en qualité de victime», intervient la présidente de la section correctionnelle. «Non détenu.» Malik, lui, a visiblement tout dit. Il n'a plus envie d'aller plus loin après la diatribe de la victime qui fait une tête, mais alors une tête... C'est alors le moment pour le père de H. H. de prendre la parole après avoir été averti que le tribunal ne permettrait aucun écart. «Madame la présidente, cet énergumène a passé une longue période à recevoir mon argent depuis le sixième étage de la part de ma fille mineure poussée par ce Malik de malheur...» «Monsieur, laissez de côté les mots énergumène et malheur et cessez de vous exprimer en langue française. Respectez la loi car la parquetière ne maîtrise pas la langue française. C'est compris ?» Le papa victime, qui a les tripes au bord de l'éclatement, ne comprend pas ce charabia et surtout il devrait ne pas s'exprimer dans la langue qu'il maîtrise lui. S'apercevant que le tuteur n'arrivait plus à redémarrer son réquisitoire, elle lui donne un léger coup de main en posant de bonnes questions pour avoir de saines réponses qui allaient édifier le tribunal. «Est-il arrivé à Malik de monter chez vous au sixième étage, taper à votre porte et recevoir de l'argent des mains de votre fille H. H. ?» Il dit : «Non et heureusement car il aurait eu l'accueil qu'il mérite.» «Mademoiselle, dit soudain la magistrate à l'intention de H. H., est-il vrai que vous lanciez depuis la loggia des pièces de monnaie à Malik ?» «Quoi, madame la présidente ? des pièces ? Non, des billets, de gros, et je vais vous dire, de... l'euro aussi.» Des rires fusent dans la salle. La juge et la procureur se retiennent pour le légitime fou-rire. H. H. fait oui de la tête. La juge profite de ce signe et dit : «Vous a-t-il menacée ? Vous faisait-il du chantage ? Dites-nous la vérité. Ne craignez personne, mon petit.» «Non, il est très gentil. Il ne m'a jamais rien demandé», répond, le visage rouge, H. H. «Comment faisiez-vous pour lancer de l'argent depuis chez vous ?», insiste la magistrate, qui allait être édifiée après la réponse. «Papa voyage beaucoup. Il va souvent en France. A son retour, il dort. Il dort même beaucoup. Des siestes de quatre heures. Alors, comme il vide ses poches, il m'est arrivée de piocher. C'est pour cela que papa parle d'euros.» Le tuteur va se taire définitivement jusqu'à ce qu'il réclame à l'inculpé dix millions de centimes. La procureure, elle aussi plus qu'édifiée, demande l'application de la loi, c'est-à-dire pour les non initiés la relaxe. Et ce sera finalement le verdict qui verra le père prendre sa fille par la main et quitter le tribunal.