Les Algériens ignorent le soja et très peu en consomment en dépit de ses «vertus», selon l'avis d'experts producteurs de produits à base de soja. Le soja ne fait pas partie de la culture culinaire algérienne, et l'absence de promotion et de vulgarisation des bienfaits de cette légumineuse n'aide pas une production industrielle des aliments à base de soja, ont indiqué à l'APS des responsables de quelques centres de production de ces aliments. S'il est vrai que le goût des produits à base de soja est «fade» et «peu attirant», leurs producteurs s'attellent à «inventer» des recettes pour l'améliorer et l'adapter au goût algérien. Ainsi, différents aliments à base de soja sont produits en Algérie, à savoir du lait, du tofu (fromage frais naturel), du fromage à tartiner, de la mayonnaise, de la crème dessert, de la mayonnaise sans œufs, des gâteaux et du pain. Du couscous fait à 100% à base de farine de soja, des merguez (20% viande rouge et 80% protéines de soja), du café (graines de soja torréfiées), des cacahuètes (graines de soja grillées), des barrettes pour enfants (farines de datte et de soja) et du petit-lait (lait de soja acidulé avec du vinaigre naturel) sont également disponibles pour les ménagères. Question prix, les producteurs proposent le tofu à 400 DA le kilo, le pot de crème dessert à 20 DA, le kg de merguez à 350 DA, le pot de mayonnaise à 35 DA, le pain à 25 DA et les barrettes à 5 DA. Mais, il n'existe que quelques centres producteurs de produits à base de soja, dont le centre «Soy» de recherche, de tests, de promotion, d'information et de formation pour la production des dérivés du soja situé à Alger (Hussein Dey). Au centre, qui compte des adhérents bénévoles, Mlle Hamel Zakia, ingénieur en agroalimentaire, roule elle-même le couscous et prépare les autres produits avec l'assistance de deux jeunes personnes, sous les conseils du directeur du centre qui lui-même est ingénieur en agroalimentaire et chimiste. Une production artisanale faute de publicité Les produits du centre sont 100% naturels, sans produits chimiques mais la production est restée au stade artisanal du fait que les produits à base de soja «ne font pas partie de la culture culinaire», regrettent les responsables du centre. Et parce que le soja est un produit qui n'est pas connu dans l'alimentation en Algérie, le centre essaie de le faire connaître et l'adapter aux plats et au goût algérien en proposant 164 recettes à base de soja. Même si devant le centre, la clientèle ne se bouscule pas, quelques clients «fidèles» rencontrés sur les lieux ont affirmé «ne plus se passer» des produits à base de soja. Réalité, ou simple fait du hasard, Hamid S., souffrant d'hypertension et d'obésité il y a quelques années, affirme avoir perdu une vingtaine de kilos en trois mois et stabilisé sa tension depuis qu'il s'est mis au régime à base de produits de soja et éliminé de ses repas toutes les graisses et protéines animales. Hayet, étudiante en architecture, dit apprécier ces produits qu'elle a découverts grâce à sa mère, végétarienne. Mohamed passe, quant à lui, tous les matins pour récupérer du pain et du lait. Tous confient avoir découvert les produits à base de soja par le biais d'un ami, un parent ou juste par hasard, en passant devant le centre. Myriam regrette qu'en Algérie ces produits ne soient pas en vente dans les magasins comme c'est le cas en Europe, précisant avoir goûté le lait de soja pour la première fois en France et en être devenue depuis «accro». Il existait, il y a près de trois années, un centre à Rouiba (est d'Alger) qui a tenté de commercialiser ses produits à base de soja en quantités industrielles mais a fini par fermer ses portes parce que «ça ne marchait pas», selon son directeur, M. Hank. M. Hank regrette également que le consommateur algérien «préfère les produits importés». Cette situation l'a poussé, explique-t-il, à fermer son entreprise, ajoutant n'avoir «même pas réussi à vendre son matériel de production». Les graines de soja destinées à fabriquer les produits pour l'alimentation humaine en Algérie sont importées d'Italie, selon les opérateurs concernés. Le centre «Soy» ne se contente pas de produire, il est aussi lié par une convention avec l'Ansej (Agence nationale pour le soutien à l'emploi des jeunes). Il assure ainsi des stages aux jeunes dans la production des aliments à base de soja. L'Ansej, de son côté, accorde des crédits à ces stagiaires leur permettant d'ouvrir leurs propres centres, dont une quinzaine a été créée dans différentes wilayas. Les bienfaits de la graine de soja sur la santé de l'homme ont été démontrés par des études faites dans les pays occidentaux et asiatiques. L'intérêt de consommer des produits à base de soja se confirme au fil des études qui indiquent que le soja est un produit oléagineux naturel, 100% végétal et donc sans mauvais cholestérol et contient de surcroît des protéines. Les bienfaits du soja démontrés par les études En 1999, une étude américaine (l'institution américaine Food and Drug Administration-FDA), entre autres, a établi le lien entre les protéines du soja et la diminution du risque de maladies cardio-vasculaires. Le soja contribue à la diminution du taux de cholestérol, il est également riche en acides gras essentiels (Oméga 3 et Omega 6). Le soja jaune, le plus usité, contient 40% de protéines, 35% de glucides (dont 20% de fibres), 20% de lipides et 5% de minéraux. Le lait de soja contient 3 à 4% de protéines, 2 à 3% de glucides. Il est «plus riche en protéines que le lait de vache et plus pauvre en sucre et en graisses saturées», selon les études. Il y a aussi les isoflavones phyto-oestrogéniques que contient la petite graine et qui sont utiles à la femme en période de pré-ménopause et la femme ménopausée pour rétablir un équilibre hormonal. Ils seraient également bénéfiques à la prévention des cancers du sein et de la prostate. La consommation de 25 g par jour de protéines de soja, associée à une réduction des graisses saturées et du cholestérol, peut réduire les risques de maladies cardio-vasculaires, selon une étude réalisée par la FDA. Malgré sa richesse en protéines, les experts estiment néanmoins que le lait de soja ne peut pas remplacer le lait maternel ou celui de la vache car «il ne contient pas de calcium ni de magnésium». D'après des études et recherches, un bœuf fournit environ 200 kg de viande soit 1500 repas, les céréales qui servent à le nourrir permettraient de servir 18 000 repas. Selon ces recherches, la viande de bœuf produite avec des céréales cultivées sur 1000 m2 nourrit un homme pendant 19 jours, alors qu'une surface équivalente cultivée en soja nourrit un homme pendant 217 jours.