Le travail salarié est aujourd'hui un «luxe» dont ne profite pas toute la population en âge de travailler. La demande en la matière étant supérieure à l'offre, bien des personnes se retrouvent malgré elles sur le banc des exclus. Si cette situation est vécue par certains comme une fatalité qui les amène à grossir les rangs des chômeurs, d'autres ont décidé de ne pas croiser les bras et de se lancer dans des activités exerçables à domicile ou partout où cela est possible. Au-delà de la précarité du travail salarié, nombreuses sont les personnes qui, pour une raison ou une autre, n'auraient pas pu exercer car n'ayant pas de qualification pour cela ou, tout simplement, comme c'est le cas pour bien des femmes, non autorisées par leur mari. A la faveur de cette option, plusieurs petits métiers qui se faisaient à titre privé ou juste pour l'autoconsommation de la famille ont permis de changer le statut de bien des «petites gens». A l'inverse des hommes qui exercent divers métiers manuels suite à une qualification ou appris sur le tas, ceux que les femmes adoptent sont des métiers traditionnels, transmis de mère en fille. L'absence de statistiques fiables ne permet pas d'en connaître le nombre, mais elles semblent plus nombreuses qu'on ne le croit. Ne serait-ce qu'au vu de ces tonnes de galettes qui sont proposées dans tous les commerces. Qui ne connaît pas dans son entourage une femme qui fait des gâteaux, roule du couscous, pétrit toutes sortes de galettes ou encore une coiffeuse qui coiffe ses clientes à domicile. Dans le chapitre masculin, chacun de nous a un jeune ou moins jeune voisin qui fait du stationnement ou du transport clandestin une activité lucrative. Grâce à ces femmes que l'on qualifie joliment comme ayant «à chaque doigt de la main un métier», ce sont non seulement de nombreux métiers qui sont sauvés de l'oubli, mais elles contribuent même à changer les habitudes alimentaires de leurs enfants en particulier, et de leurs concitoyens en général, en revenant aux sources. On pourrait parler de Djamila la baby-sitter et couturière à la fois, de la jeune Lila qui fait des gâteaux pour oublier son malheur depuis la disparition de sa mère, de Ouiza experte en couscous et toutes sortes de «aggaguine», de Nabila, la passionnée de gâteaux orientaux qui passe ses vacances en Espagne grâce au pécule qu'elle se fait. Autant de personnes passionnées, et la liste est encore longue, par l'activité qu'elles ont choisie par vocation, en plus d'un zeste d'amour. Comme Djamila, Karima, Mériem ou Djamel, tous font partie d'une population qui aspire à améliorer son quotidien au prix certes d'un labeur fatigant et pénible, mais positif. Pour connaître les motivations de chacun, le bien que leur a procuré leur débrouillardise, nous avons choisi de les faire parler.