Un peu moins de 1500 milliards de centimes, 48 997 567,40 euros, 48 282 588,80 dollars américains ainsi que d'importantes sommes en monnaies marocaine, tunisienne, suisse mais également une quantité appréciable d'or ont constitué l'énorme préjudice découlant des activités classifiées parmi les délits et crimes économiques traités par les brigades économiques relevant des divisions de la police judiciaire, et ce, durant 2007 et 2008. Au vu des chiffres du premier semestre 2009, ces crimes à caractère économique observent une hausse exponentielle, représentant une véritable menace pour l'économie nationale. Bien entendu, il est à noter que ces chiffres éloquents sur les diverses formes de crimes de délits économiques sont relatifs aux statistiques élaborées par les services de la police judiciaire. Cela dit, ces chiffres, joints aux affaires traitées par les services de la Gendarmerie nationale, donneraient un résultat plus alarmant. Cependant, il y a lieu de souligner que les délits économiques, comparativement au nombre d'affaires enregistrées par les services de police durant les années 2007 et 2008, observent une nette progression tant sur le nombre des délits que sur le nombre des personnes impliquées. Il sied de souligner également qu'à la lecture de ces statistiques, le taux de femmes versant dans ces crimes épouse une courbe ascendante (185 femmes arrêtées). Parmi les villes touchées par ces crimes, Tébessa et Tlemcen occupent le haut du tableau de recensement durant l'année 2008 avec respectivement 133 et 92 affaires. Il est à préciser que les deux villes sont en proie à d'intenses activités liées à la contrebande en raison de leurs positions géographiques. Alger se positionne à la 3e place avec 69 affaires criminelles mais se taille la part du lion concernant les délits dits de soustraction, de dissipation et d'usage illicite de biens publics. Autrement dit, les détournements et les dilapidations des deniers publics, la concussion (fraude opérée par les prestataires de services ou, en d'autres termes, exigence de contrepartie de la part de certains agents des impôts, de la poste ou autres institutions) enregistrent le plus grand nombre au sein de la capitale. En somme, durant les deux dernières années et au terme des investigations menées par les services de police, 1279 personnes, dont un étranger et 114 femmes, ont été arrêtées en 2007 et 2324 individus en 2008. Durant le premier semestre de l'année en cours, 1241 personnes ont été arrêtées. La lecture des chiffres indique on ne peut plus clairement que les délits et les crimes à caractère économique observent une hausse exponentielle. Des P/PAC, des fonctionnaires, des opérateurs et des chefs d'entreprise impliqués Il y aurait quelque 17 P/APC ainsi que des fonctionnaires et autres responsables d'entreprise incarcérés à la suite de leur implication dans diverses affaires criminelles, notamment celles relatives à l'infraction au code des marchés. Ces responsables et hauts fonctionnaires ont été reconnus coupables de griefs relatifs à des affaires ayant trait aux soustractions, aux dissipations et aux usages illicites de biens publics et privés, aux infractions liées aux marchés publics et autres abus de biens sociaux. Dans la plupart des cas, ces infractions, voire ces délits criminels ont été commis suite à des opérations fallacieuses (faux et usage de faux et falsification de dossiers). Le secteur de l'habitat n'échappe pas à la règle, notamment lors des opérations de distribution des marchés mais également à un niveau inférieur dans les opérations de distribution de logements. Il est une vérité indéniable que, dans bien des cas, certains acquéreurs sont contraints de verser des «bakchichs» à des individus dits «détenteurs de pouvoirs d'influence et dont les signes ostentatoires de richesse devraient, en principe, attirer l'attention des services de police judiciaire». Aucun Algérien ne niera que les pratiques les plus courantes dans le domaine de la construction, pour ne citer que cet exemple, sont la surfacturation et le trafic, entre autres, des dosages des agrégats par les maîtres d'ouvrage. Il est également connu que suite à l'acquisition des marchés, une part «des gains est reversée aux débiteurs» dans le cadre de la cessation de marchés de gré à gré. Cette pratique a été quelque peu freinée à la suite de la promulgation d'une loi interdisant les cessations de marchés publics ou privés de gré à gré. Bon nombre de responsables d'entreprise ont également été arrêtés suite à la découverte par les brigades économiques de la police judiciaire de trous financiers dans les livres comptables de leurs entreprises. Une fois le délit d'abus de biens sociaux avéré, ces derniers ont été traduits devant les instances judiciaires puis incarcérés. Il est bien connu que certains opérateurs ou acteurs économiques jouissant d'une notoriété se livrent à des jeux comptables dans le seul objectif d'éluder les charges fiscales. Sur ce chapitre, les services de police indiquent que pas moins de 20 affaires inhérentes à la fraude fiscale, impliquant 28 responsables à divers niveaux d'entreprises publiques et privées ainsi qu'une nuée de commerçants, ont été traitées. Sur ce chapitre, il est indiqué, pour exemple, que «beaucoup d'entreprises se livrent à la fraude fiscale en présentant de fausses déclarations de revenus ou de masse salariale afin de minimiser les charges fiscales». Cependant et dans bien des cas, les enquêtes ne sont déclenchées que suite à des dépôts de plainte ou lors de la lecture exhaustive des dépôts de bilans de la part d'experts comptables. Pour rappel, les services de police ont traité, en 2007 et 2008, pas moins de 593 affaires à l'issue desquelles une très grande partie des sommes dérobées n'a jamais été restituée. Les banques, les institutions et les organismes financiers cibles de prédilection des criminels En 2005-2006, les banques et les institutions financières ont été ébranlées par de scandaleuses affaires de corruption et de détournement et autres arnaques. Ces innombrables et complexes malversations et pratiques douteuses se sont soldées par des dommages gravissimes dont le coût s'élevait à quelque 4000 milliards. Ce préjudice subi par ces institutions et ces organismes financiers, où régnait, à cette époque, une certaine incurie, était la résultante de l'existence de corruption, d'escroquerie, de dilapidations diverses, de fraudes multiples et de bien d'autres crimes que les services de police n'ont de cesse combattu en dépit de toutes les contraintes et «pressions» émanant de quelques personnes influentes évoluant dans des sphères inavouées. Il est vrai aussi que certains délits constatés n'ont jamais connu d'épilogue et les auteurs sont encore «dans la nature». Le cas d'El Khalifa Bank, dont l'affaire n'a pas révélée tous ses secrets, en est un exemple des plus édifiants. Nonobstant les délits relatifs aux infractions bancaires, notamment les transferts illicites de capitaux vers l'étranger au travers d'opérations commerciales liées aux importations, les infractions à la législation des changes ont connu une nette progression durant l'année en cours. C'est ainsi que les brigades économiques de la police judiciaire ont traité 59 affaires durant le premier semestre de l'année en cours et procédé à l'arrestation de 60 auteurs dont trois femmes. Comparativement aux années précédentes, où 63 et 55 affaires ont été traitées, respectivement en 2007 et 2008, le nombre de 59 affaires seulement en six mois est un indicateur de la progression de ces délits, et ce, en dépit de toutes les mesures prises dans la perspective de mettre fin à ces agissements délictueux. Cette constatation autorise bien des interrogations sur la faisabilité et l'efficacité des mesures visant essentiellement à contrecarrer et à dissuader les auteurs. Il sied par ailleurs de souligner, voire mettre en relief la complicité tacite de certains agents exerçant à tous les niveaux des institutions concernées. Les douanes sur plusieurs fronts Au-delà des infractions à la législation des changes, dans lesquelles les douanes jouent un important rôle de contrôle et de régulation, les infractions douanières, dont les cas constatés sont difficilement quantifiables. Sur cette question, les courants de fraude sont multiples et variables selon la lecture des textes mis en application et dont les zones d'ombre sont mises à profit par les opérateurs économiques. L'utilisation des prête-noms (utilisation, par les importateurs indélicats et malintentionnés, de registres du commerce appartenant à des tierces personnes) a, jusqu'à sa suppression, provoqué des dégâts considérables. C'est dire que devant cette situation délétère, décriée et dénoncée par l'institution douanière ainsi que par les services de police, le port d'Alger, qui constitue une des destinations les plus prisées par les délictueux importateurs, a fait l'objet de maintes dispositions jusqu'à son acquisition par une entité mixte née de la fusion entre deux entreprises algérienne et émiratie. Cela étant, les brigades économiques, en constante coordination avec les services des douanes, ont, suite à des procès-verbaux établis, procédé à l'arrestation de 51 personnes impliquées dans des affaires inhérentes aux infractions douanières, et ce, durant le premier semestre 2009. Les mêmes services ont, durant les années 2007 et 2008, présenté aux instances judiciaires quelque 23 et 57 personnes au terme de 17 et 56 affaires constatées. De nos jours, les douanes, et bien que s'efforçant de mettre en application le programme de modernisation de ses services, notamment en généralisant l'utilisation de l'outil informatique et en exploitant et en priorisant le renseignement, constatent l'existence «récurrente des courants de fraude dont le mode opératoire ne cesse d'être remodelé par les importateurs indélicats bénéficiant de la complicité de quelques douaniers ou autres acteurs véreux au sein des infrastructures portuaires ou aéroportuaires». Par ailleurs, les services de police ont procédé, en collaboration avec les différents services de contrôle et de régulation des activités commerciales, au traitement de 93 infractions commerciales durant les six premiers mois de l'année en cours et l'arrestation de 158 individus dont 15 femmes. 167 affaires similaires ont été solutionnées en 2007 (287 personnes interpellées dont 7 femmes) et 174 autres en 2008 (231 personnes arrêtées dont 2 femmes). La contrebande, un délit économique hautement préjudiciable Il est indéniable de reconnaître que le marché algérien est gangrené par l'informel. Il convient à ce titre de relever qu'un important taux des marchandises revendues provient de la contrebande et des importations dites «destinées à la revente en l'état». Sur ce volet et au vu des statistiques des services de police, les ville de Tlemcen et de Tébessa, situées aux frontières est et ouest, en constituent les plaques tournantes par excellence. Alger, qui se place tantôt à la deuxième position et parfois à la troisième, constitue une des meilleures villes pour l'écoulement de ces cargaisons dont certaines présentent de réelles menaces sur la santé publique, notamment les produits cosmétiques. Durant le premier semestre 2009, 186 affaires ont été enregistrées et qui ont conduit à l'arrestation de 258 personnes. En 2007 et 2008, les mêmes services, en collaboration avec les services des douanes, ont respectivement réussi à traiter 341 et 405 affaires et présenter 588 personnes dont 35 femmes et 626 individus dont 22 femmes. Le phénomène de la contrebande, que les services de police, de gendarmerie et des douanes ne cessent de combattre, continue de prospérer dans les grandes étendues hostiles du Sud algérien. Les raisons qui permettent la prolifération de ces activités sont multiples. D'une part, il sied de dire que les réseaux interconnectés aux autres filières du crime organisé bénéficient d'un important réseau d'information constitué en grande majorité d'autochtones et, d'autre part, le manque de moyens logistiques. Bien qu'une cartographie approximative sur les itinéraires empruntés par les contrebandiers ait été élaborée conjointement par les différents services de sécurité, il demeure que le recours aux grands moyens de surveillance est plus qu'une nécessité afin de mettre un holà à ces activités criminelles qui, faut-il le rappeler, sont une des sources de financement de la grande criminalité, à savoir le terrorisme. Tous les responsables des services sont unanimes à dire que la surveillance des vastes étendues du sud par voie satellitaire peut minimiser les dégâts, voire juguler le phénomène qui saigne notre économie nationale d'une manière perfide.