Le procès dit du thon rouge vivant confié au tribunal de Annaba s'est terminé jeudi, peu avant 17h, dans une ambiance quasi angoissante. Pendant des semaines, notamment durant les deux derniers jours, tous les acteurs de ce procès, avocats, partie civile, victimes, associations, staff ministériel et journalistes ont suivi attentivement le développement du dossier et les débats dirigés de main de maître par le président du tribunal, Benbakir Moncef. après l'audition de tous les témoins, armateurs turcs et algériens et représentants du ministère de la pêche et des ressources halieutiques, le procureur de la république a requis 8 et 6 années de prison ferme respectivement à l'encontre du secrétaire général et du directeur de la pêche du ministère de la pêche et des ressources halieutiques et à 5 ans de prison ferme, également, à l'encontre des cinq armateurs turcs et des deux algériens propriétaires des navires Djazaïr 2 et Chehid Rais Hocine. Une requête assortie pour ces armateurs turcs et algériens d'une amende financière représentant dix fois la valeur des 210 tonnes de thon confisqué ainsi que la saisie de toutes les embarcations ayant été utilisées lors de l'opération de transfert illicite en cause, y compris les équipements se trouvant à leur bord. Rendez-vous est donné au 13 octobre à 9 heures, dans l'enceinte de ce même tribunal. Il faut dire que s'il ne fait aucun doute que même si le tribunal a tout tenté pour faire la lumière sur cette opération de pêche illicite aux contours de délit de braconnage, en donnant notamment l'occasion à chacun des 9 prévenus de dire sa version des faits, des zones d'ombre subsistent. Le public restera sur sa faim à la question de savoir quel a été le rôle et le niveau exact d'implication des fonctionnaires du ministère dans cette affaire portant atteinte à l'économie nationale et à l'intégrité des eaux territoriales. S'il a été établi, preuves à l'appui, que les thoniers algériens soupçonnés auraient accepté de déclarer cette pêche de 210 tonnes à leur compte, contre rétribution, n'ayant pas la capacité de les capturer, les opérateurs étrangers ont longuement tergiversé afin de se soustraire aux questions du magistrat. Ils ont d'abord nié avoir pêché eux-mêmes la quantité de thon rouge trouvée dans leurs filets avant d'avouer tacitement qu'ils y avaient été autorisés «verbalement» par le secrétaire général du ministère en personne, lors de la rencontre qu'ils ont eue avec lui à la veille de l'ouverture de la campagne des grands migrateurs halieutiques de cette année. Une autorisation de principe que le haut fonctionnaire reconnaît avoir donnée mais qui ne valait pas de permis de pêche pour autant. Ce même secrétaire général a révélé au tribunal qu'il avait même saisi le wali afin de le convaincre de procéder à la libération des embarcations arraisonnées et immobilisées en rade de Annaba par les gardes-côtes. Cette initiative lui a valu d'être inculpé et d'encourir la peine maximale requise par le parquet. Le directeur de la pêche, qui a été le premier à alerter officiellement, le 31 mai dernier, les gardes-côtes algériens sur la présence et le mouvement suspect de navires thoniers étrangers dans les eaux sous juridiction nationale, s'était défendu d'avoir une quelconque prérogative dans la délivrance des permis de pêche. Se prévalant de correspondances officielles attestant de sa bonne foi dans le déclenchement de l'opération d'arraisonnement des trois navires turcs suspects, il a dit et répété qu'il ne comprend pas de quoi il est accusé exactement. La décision finale du tribunal souverain sera connue sans doute mardi prochain et il y a fort à parier que le public sera nombreux cette fois encore pour connaître la suite réservée à ce dossier qui a défrayé la chronique locale et nationale.