Un nombre très restreint de médecins, désignés prioritaires pour la vaccination, ont accepté de se faire inoculer contre la grippe A/H1N1. La campagne a suscité peu d'enthousiasme chez les médecins. Même son de cloche chez les infirmiers. Il semblerait que ces derniers aient la même position. La campagne de vaccination lancée le 31 décembre 2009 n'a en effet drainé que très peu de monde parmi le personnel de la santé. A l'exemple du Centre hospitalo-universitaire d'El Kettar (Alger) où uniquement deux personnes du corps médical se sont portées volontaires : un maître-assistant et un agent de sécurité. Au CHU de Bab El Oued, le taux d'engouement n'a pas dépassé le 0%. Idem pour la clinique d'El Biar, où les doses de vaccins réceptionnées n'ont pas été touchées. Hier encore, date du lancement de la campagne de vaccination pour les femmes enceintes, aucune dame ne s'est présentée, malgré la campagne de sensibilisation lancée tambour battant. Au CHU Mustapha Bacha, aucune vaccination n'est enregistrée. Quelques médecins ont vaincu la peur, mais le taux reste relativement faible. Le décès d'une femme médecin à Sétif jeudi dernier, suite à sa vaccination, a semé la psychose du vaccin de la grippe A/H1N1. Les médecins interrogés par rapport à leur réticence affirment que «la vaccination ne se justifierait que pour des groupes d'individus pour lesquels le risque immédiat de complication grave et de mortalité serait élevé», ajoutant que dans «le cas contraire, vaut mieux éviter les effets secondaires que peut provoquer éventuellement le nouveau vaccin, particulièrement quand on sait que le virus risque de muter et donc que le vaccin ne sera plus efficace». Selon la même source, «cette grippe est très contagieuse mais peu virulente, et pour la grande majorité des cas, quelques jours de repos sous Tamiflu suffisent pour se remettre sur pied». Pour les femmes enceintes interrogées, elles admettent qu'elles ont très peur d'attraper le virus, mais il est plus prudent de ne pas se faire piquer avec un vaccin fait à «la va-vite» et qui peut être source de beaucoup de risques. Les médecins et pédiatres interrogés hier, lors de notre tournée, ont essayé de jouer la carte neutre. Cependant, ils ont tenu à préciser qu'il vaut mieux laisser notre corps s'immuniser naturellement. «Ils expliquent que comme la grippe classique, ce virus devrait muter progressivement ; c'est-à-dire que si on accepte d'y faire face cette année, on sera naturellement protégé ensuite, et de manière bien plus efficace, car notre corps aura développé certaines défenses pour y faire face de mieux en mieux». Conclusion : tout le monde, y compris dans la branche médicale, se méfie de ce vaccin. Le ministère relance la campagne de sensibilisation Le directeur de la communication du ministère de la Santé, de la Population et de la réforme hospitalière M. Belkacem, a encore une fois précisé par rapport au décès de la femme médecin à Sétif jeudi dernier «qu'elle est décédée 30 heures après la vaccination», ajoutant que cela «écarte toute éventualité d'un choc anaphylactique». Il a fait savoir d'ailleurs que «plus de 200 personnes ont été vaccinées du même lot de vaccins et 10 autres du même flacon». Lors d'un briefing sur la situation épidémiologique de l'épidémie, organisé hier au ministère, il a appelé les praticiens de la santé «à assumer leur entière responsabilité lorsqu'il s'agit de vies humaines»; c'est-à-dire qu'ils ne doivent pas «déconseiller aux femmes enceintes de se faire vacciner». Le directeur de la communication du département de Saïd Barkat a précisé, à cet effet, que «le vaccin est un moyen efficace pour protéger la femme enceinte contre le risque de complications», ajoutant que le fait de déconseiller à cette frange vulnérable de se faire vacciner contre le virus A/H1N1 n'est pas la solution sûre pour lui éviter le risque de contamination ou de complications. Selon lui, il faut au contraire lui recommander le vaccin pour qu'elle puisse protéger sa santé. Il a rappelé dans ce contexte que la femme enceinte est la plus exposée au virus de la grippe A/H1N1 en raison de son état et de la vulnérabilité de son système immunitaire. Son risque d'infection par ce virus l'expose, cinq à dix fois plus que la population générale, à une difficulté respiratoire sévère et dans certains cas, au décès. Il y a lieu de préciser que les femmes enceintes de 20 semaines et plus passent en priorité de vaccination, après les personnels de santé des secteurs public, parapublic et privé. L'épidémie a, à titre de rappel, déjà causé la mort de 11 femmes enceintes, parmi les 47 décès. Evoquant la disponibilité de l'antiviral «Oseltamivir» (Tamiflu), le conférencier a fait savoir que 500 000 unités de dosage adulte et 50 000 de dosage pédiatrique ont été distribuées à l'échelle nationale. L'Oseltamivir est distribué gratuitement aux personnes présentant un syndrome grippal et justifiant d'une ordonnance médicale.