Vous allez disputer votre troisième phase finale de la CAN. Les conditions qui prévalent en 2010 sont-elles les mêmes que celles des deux précédentes éditions ? Les temps ont changé et dans beaucoup de domaines. En 2002, au Mali, nous avions une équipe inexpérimentée qui n'avait pas fait le poids dans son groupe puisqu'elle avait été éliminée dès le premier tour avec deux défaites et un match nul. En 2004, en Tunisie, on ne donnait pas cher de nos chances pour le premier tour puisque nous étions tombés dans un groupe dans lequel se trouvaient le Cameroun et l'Egypte qui étaient, pour les observateurs, les favoris logiques à la qualification aux quarts de finale. Nous avions un groupe qui en voulait et nous avions surpris nos adversaires, notamment les Camerounais avec lesquels nous avions fait match nul et les Egyptiens que nous avions battus. Malheureusement, en quart de finale, nous avions péché par manque d'expérience face aux Marocains qui nous ont éliminés après les prolongations. Aujourd'hui, il est certain que les choses ont énormément changé. D'abord, le groupe a gagné en expérience avec de nombreux matches joués aux quatre coins de l'Afrique. Ensuite, et c'est cela le plus important, nous nous présentons en Angola en tant que futurs mondialistes. Il s'agit là d'un statut qui pousse nos adversaires à montrer plus de respect à notre encontre. J'ajoute que les matches que nous avons disputés durant la phase de qualification ont renforcé notre solidarité et nous ont permis de consolider notre jeu et notre manière d'évoluer. Un autre changement notable c'est la prise en charge dont bénéficie notre équipe nationale. Cela n'a rien à voir avec ce qui prévalait en 2002 et en 2004. La Fédération, il faut l'avouer, a mis les gros moyens pour nous mettre à l'abri de nombreux pépins. Jusqu'au point de devenir favoris de votre groupe, selon les sondages. Comment prenez-vous ce nouveau statut ? Avec beaucoup de fierté peut-être mais aussi de la retenue. Du fait que nous soyons de futurs mondialistes, il est, à mon avis, normal que nous héritions du titre de favoris. Mais ce n'est pas cela qui va nous pousser à avoir la grosse tête. Au contraire, nous devons rester modestes tout en étant conscients que nous avons, désormais, un statut à défendre. Nous allons tenter de l'honorer en réalisant les meilleurs résultats possibles. Cependant, nous savons que cela va être difficile avec des adversaires de la trempe de l'Angola qui est tout de même l'équipe du pays organisateur et du Mali avec toutes ses stars, sans oublier le Malawi qu'on aurait tort de négliger. Vous disiez tout à l'heure que vous avez un groupe expérimenté. Il reste qu'il comprend quelques joueurs qui découvrent, pour ainsi dire, l'ambiance de la CAN ? C'est vrai mais au contact des plus anciens ils pourront surmonter tout éventuel handicap. Ce sont des professionnels habitués des matches musclés. Je suis sûr que de ce côté-là il n'y aura pas de gros problèmes. En tant que capitaine d'équipe votre rôle doit être particulier auprès de ces nouveaux ? Absolument mais les autres anciens joueurs sont là pour m'épauler. Nous essayons de les mettre en confiance, surtout ceux qui découvrent l'Afrique. Pour ma part, j'essaie toujours d'avoir un mot d'encouragement par-ci, par-là, histoire de leur montrer que la solidarité dans notre groupe n'est pas un vain mot. Vous allez jouer dans des conditions particulières, notamment sous une grosse chaleur et un taux d'humidité élevé. Comment l'équipe compte-t-elle faire face à ce genre de handicap ? Pour ce qui est de la chaleur, il n'y aura aucun problème. Il s'agit là d'un paramètre que nous savons prendre en charge avec tous les matches que nous avons disputés un peu partout en Afrique. En ce qui concerne l'humidité ce sera plus délicat car il n'y a aucun moyen de s'y adapter. Il s'agira de faire en sorte de ne pas tomber dans la précipitation et de savoir gérer nos efforts. Je suis sûr que notre coach, qui a une certaine compétence en la matière, saura nous orienter de manière à ce que cette humidité ne nous gêne pas trop. De toutes les manières, nos adversaires seront logés à la même enseigne même s'ils appartiennent tous les trois à des pays subsahariens. Le premier match de cette CAN va être contre l'équipe du Malawi qu'on présente comme le Petit Poucet du groupe. C'est, en effet, le statut qu'on veut bien coller à cette équipe. Comme on le sait, il s'agit là d'une énorme erreur parce qu'en football et dans des compétitions comme la CAN il n'y a ni fort ni faible. Chaque équipe est capable de transcender mais également de passer à côté de son sujet. Par conséquent, il va falloir se méfier de cette équipe du Malawi. Si elle est là parmi les 16 meilleures équipes africaines, ce n'est pas par hasard. Elle a atteint ce stade sans bruit mais d'une manière tout à fait méritoire. C'est une équipe qui pourrait être la surprise de cette CAN. Le fait d'être tombé dans le groupe de l'équipe du pays organisateur n'est-il pas un handicap ? C'est possible mais à mon avis c'est une arme à double tranchant. Les Angolais vont jouer chez eux tout en bénéficiant de l'appui de leur public. C'est certainement un avantage non négligeable mais qui a son revers, à savoir qu'il fait subir une terrible pression aux joueurs locaux. Il va falloir à ces joueurs gérer ce paramètre et on sait que lorsque la pression est sur vos épaules vous pouvez soit casser la baraque soit couler corps et âme. Le troisième adversaire des Algériens dans ce groupe est le Mali qui passe pour une équipe qui ne vous réussit pas tellement. Si vous faite référence à ce qui s'est passé en 2002 n'oubliez pas que cette équipe jouait chez elle. Je n'ai, pour ma part, pas l'impression que c'est un adversaire qui ne nous réussit pas puisque les derniers matches amicaux ont été en notre faveur. Maintenant, il est vrai que nous avons affaire à une équipe qui, sur le papier, est impressionnante. C'est un adversaire à respecter sans en faire une montagne. Notre équipe a, elle aussi, son propre statut qui est supérieur à celui de l'équipe malienne. Je crois que ce sera elle qui cherchera à faire bonne figure contre nous. La CAN n'a même pas commencé qu'elle a été endeuillée par l'incident tragique dont a été victime l'équipe du Togo à Cabinda. Comment les joueurs algériens ont pris cette terrible nouvelle ? Terrible c'est bien le qualificatif qui convient car il y a eu mort d'homme. Il est évident que la nouvelle de l'agression nous a énormément perturbés. C'est malheureux de venir jouer au football et de se retrouver avec des morts. Je profite de l'occasion que vous me donnez pour m'exprimer pour adresser nos sincères condoléances à l'ensemble de la délégation togolaise. Nous sommes solidaires des joueurs togolais dans cette douloureuse épreuve. Pensez-vous que la compétition doit se jouer ? A mon avis il faut que le sport et le football reprennent leurs droits. On ne doit pas céder à la fatalité. Maintenant il y a un aspect politique qui nous dépasse. Ce n'est pas notre rôle à nous les joueurs de dicter ce qui doit être fait et ce qui ne doit pas être fait. Est-il vrai que des clubs européens ont fait part de leurs craintes pour leurs joueurs ? Je comprends que ces clubs se fassent du souci pour leurs joueurs. Ce sont, tout de même, eux qui les paient. Cependant, je n'ai pas connaissance d'une quelconque pression d'un club sur ses joueurs.