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Le Mossad, une organisation criminelle intouchable
L'assassinat d'un chef du Hamas à Dubai
Publié dans Le Temps d'Algérie le 17 - 02 - 2010

L'affaire de l'assassinat, le 20 janvier dernier, d'un chef militaire du mouvement de la résistance palestinienne, Hamas, Mahmoud Al Mabhouh, dans un hôtel de luxe à Dubai, pose encore une fois la vieille problématique de l'impunité et du laisser-faire de cette organisation criminelle sioniste, le sinistre Mossad.
Aujourd'hui, plus de 60 ans après la création par les Britanniques, au Moyen-Orient, de cette excroissance dangereuse pour la paix dans la région, Israël, les crimes secrets commis par le bras armé de cette entité, le Mossad, aussi bien en Palestine que dans le monde arabe et en Europe, ne se comptent plus.
Tous les moyens pour éliminer physiquement les militants indépendantistes palestiniens sont utilisés, avec la bénédiction tacite, parfois avec la collusion des Etats occidentaux. Les révélations faites cette semaine sur l'affaire du meurtre du cadre palestinien par le chef de la police de l'émirat prouvent jusqu'à quel point peuvent aller les sbires de l'entité sioniste pour exécuter leur macabre besogne.
Un roman policier à l'eau de rose
Un journaliste occidental raconte les détails de cet assassinat qui rappellent ceux d'un roman policier à l'eau de rose. «Il est 15h25 à Dubai, le 20 janvier, quand Mahmoud Al Mabhouh, l'un des chefs du Hamas, se présente à la réception du Al Bustan Rotana, un palace local», écrit-il. «Pour une raison inexpliquée, il n'est accompagné d'aucun garde du corps.
Selon les films des caméras de surveillance, deux hommes en short le suivent peu après dans l'ascenseur pour repérer sa chambre. Une heure plus tard, il quitte l'établissement pour faire des achats aux alentours, toujours étroitement filé. Pendant ce temps, à 18h32, une équipe de quatre hommes s'introduit dans sa suite. Grâce à une clef électronique, ils ont facilement eu raison de la serrure, et n'ont plus qu'à attendre son retour», ajoute le scénariste du film macabre. «A 20h24, Al Mabhouh, 50 ans, est exécuté.
Il est d'abord assommé par choc électrique, puis étranglé. La longue traque est terminée.» Les assassins du Mossad ont réussi dans leur basse besogne, mais c'est avec la complicité directe ou indirecte de tierces personnes aussi bien arabes qu'européennes qu'ils sont parvenus à leurs fins.
Il faut dire également que même la victime leur avait offert l'opportunité de la traquer pour l'éliminer là où elle ne pensait pas qu'ils l'atteindraient. En effet, c'est avec la complicité «innocente» de la chaîne arabe Al Jazeera qu'Al Mabhouh avait révélé avoir été l'auteur de l'enlèvement et de l'exécution en 1987 de deux militaires israéliens dans les territoires palestiniens occupés, faisant preuve d'amateurisme incompréhensible pour un résistant censé agir dans l'ombre.
Une liberté de mouvement dans les pays arabes
Il faut dire que le Mossad ne revendique jamais les actions de ses assassins. En revanche, l'homme, même s'exprimant le visage caché, avait révélé son identité sur le plateau d'Al Jazeera, dix mois auparavant, confirmant également son acte. Il était selon beaucoup de sources palestiniennes et selon lui recherché par le Mossad depuis 20 ans. Outre l'opération menée contre les deux militaires israéliens, Al Mabhouh était chargé de l'approvisionnement en armement de la résistance palestinienne.
Les révélations sur cet assassinat de Dubaï prouvent que les agents israéliens peuvent se mouvoir dans un pays arabe sans faire l'objet de surveillance accrue, et sans les caméras de surveillance placées à l'aéroport de l'émirat et dans l'hôtel où était descendue la victime, personne n'aurait su les détails de ce meurtre. Le plus déconcertant est que quinze minutes après le forfait, les tueurs du Mossad repartent pour l'aéroport et quittent l'émirat. Ils étaient en tout dix hommes et une femme munis de passeports européens.
Ils sont entrés séparément à Dubai sous la couverture de gardes du corps devant assurer la sécurité d'un responsable israélien invité à prendre part à une conférence internationale qu'a organisée l'émirat. Selon le chef de la police de Dubai, ils étaient six à avoir présenté des passeports britanniques, trois irlandais, un français et un allemand.
«Pour ne pas laisser de traces, ils ont payé leurs dépenses en cash, et exclu le recours au téléphone portable. Le reste appartient au folklore traditionnel de la guerre secrète : postiches, perruques, changements fréquents de vêtements, voire de tenue de tennis, pour brouiller les pistes et éviter d'être repérés», raconte le scénariste du film. Aujourd'hui, les autorités émiraties disposent des photos et des identités des membres du commando.
Faux passeports
Le chef de la police a menacé les pays européens mis en cause de représailles pour avoir délivré des documents de voyage à ces individus et a fait savoir qu'il transmettrait leur identité à Interpol. L'on sait d'avance que ce sera un coup d'épée dans l'eau, tant l'organisation criminelle Mossad s'entoure de précautions tatillonnes pour ne jamais laisser de traces susceptibles de la compromettre. Aussitôt les révélations faites, des pays européens cités démentent avoir délivré des passeports à ces personnes.
Les documents présentés aux autorités aéroportuaires de Dubai, qui soit dit en passant, sont très suspicieux quand il s'agit de voyageurs issus de pays arabes, notamment d'Algérie (nous en avions subi les tracasseries poussées), étaient des faux. En réaction à ces accusations, c'est l'Irlande qui, la première, a apporté un démenti par la voix d'un porte-parole du ministère des Affaires étrangères :
«Nous avons vérifié les numéros des passeports et les noms dans notre base de données et nous n'avons pas de passeports à ces noms ou portant ces numéros.» Le responsable a assuré à ce propos, que «ces passeports sont des faux. Ce ne sont pas des passeports authentiques».
Dublin est suivi par Londres qui croit seulement que les documents incriminés étaient des faux. «Nous sommes au courant que des détenteurs de passeports britanniques ont été nommés dans cette affaire», dit le Foreign Office dans un communiqué. «Nous croyons que les passeports utilisés sont des faux et avons ouvert une enquête. Nous avons offert notre concours et notre soutien à une enquête émiratie en cours», assure le texte.
Mais c'est une chaîne de télévision israélienne qui apporte plus de précisions sur cette scabreuse affaire. «Les faux passeports britanniques de membres du commando soupçonnés d'avoir assassiné en janvier un responsable du Hamas à Dubai ont été fabriqués avec l'identité de quatre Israéliens», a affirmé ce média, ajoutant que «seules les photos d'identité de ces passeports avaient été changées, mais qu'ils utilisaient le nom d'Israéliens détenteurs également de la nationalité britannique».
La France suit le mouvement. Un porte-parole du Quai d'Orsay a simplement estimé que «la détention de ce passeport (français) ne vaut pas authentification de la nationalité de son titulaire ni du document lui-même». Un analyste rappelle cependant que «ce n'est pas la première fois que le Mossad, très probablement derrière cette liquidation, utilise un passeport français pour noyer les pistes autour de ses sales besognes».
Murders and co
Ainsi, selon lui, «en 1995 déjà, l'homme qui, pour le compte du Mossad, liquida à Malte Fathi Chkaqi, le chef du Djihad islamique palestinien, était détenteur d'une pièce d'identité française. A une certaine époque, de nombreux passeports français avaient été volés». Pour l'heure, seule l'Allemagne observe le silence. Cela dit, tout le monde s'accord à affirmer que les auteurs du meurtre sont des agents du Mossad.
Cependant, aucun pays du monde dit libre ne condamne le procédé utilisé par l'entité sioniste dans l'élimination physique des résistants palestiniens. En Israël, les médias attribuent avec une pointe de satisfaction au Mossad l'exécution de cette opération dans un pays souverain, prouvant encore une fois qu'Israël fait fi de toutes les règles internationales, pourvu que cette entité parvienne à ses objectifs.
Il faut dire que l'assassinat du dirigeant du Hamas dans cet émirat arabe souverain, qui n'entretient aucune relation officielle avec l'entité sioniste, vient rappeler aux Etats arabes le danger encouru par leurs dirigeants si d'aventure ils affichent des frémissements d'ouverture envers cette plaie collée de force sur les territoires palestiniens. Dubai a autorisé l'entrée sur son territoire d'un haut responsable israélien, et la suite on la connaît. L'émirat reproche à la victime (qui se croyait en sécurité dans un pays «frère») de ne pas s'être entourée de gardes du corps et d'avoir séjourné seule à Dubai.
Le cas d'Al Mabhouh fait partie d'une longue liste d'assassinats commis à l'étranger par les agents secrets israéliens sur la personne de dirigeants palestiniens qui n'ont jamais été punis. Il en est de même des liquidations physiques de dirigeants du Hamas à Ghaza et d'autres factions dures de la résistance palestinienne, par voitures piégées, depuis des hélicoptères et encore des blindés.
Un avenir sombre
Ces assassinats se sont multipliés depuis que l'Union européenne et les Etats-Unis ont inscrits le Hamas et d'autres mouvements palestiniens sur la liste des «organisations terroristes». D'ailleurs, le chef politique du Hamas lui-même, exilé à Damas, Khaled Mechaal, avait échappé en 1997, à Amman, à un attentat dont la scénario était proche de celui de Dubaï, selon un ancien du Mossad !
Les agents de cette organisation criminelle n'hésitent pas à agir dans les pays arabes «ouverts» à Israël. Il faut se rappeler de l'assassinat du bras de droit de Arafat, à Tunis, Abou Jihad, en avril 1988. Même en Syrie et en Iran, le Mossad a pu frapper ! En Egypte, où le Mossad est chez lui, ses agents trouvent les renseignements utiles pour traquer leurs victimes de passage dans ce pays, devenu une plaque tournante dans la guerre souterraine que livre Israël à ses «ennemis» dans la région.
Des sources égyptiennes citées par le journal Times affirment être au courant que «l'activité des services secrets israéliens a augmenté». «Nous sommes conscients que leurs activités se sont accrues sur notre territoire et dans d'autres pays de la région. Ils tentent de nous écraser tous dans leur guerre souterraine», révèlent-elles.
Celles-ci ajoutent aussi qu'«Israël a entamé depuis un certain temps un processus d'élimination des responsables du Hamas et du Hezbollah dans tout le Moyen-Orient». C'est pourquoi, bien avant l'opération contre le dirigeant du Hamas, Israël a averti ses ressortissants de s'armer de vigilance et d'éviter de voyager en groupe à l'étranger, car craignant des ripostes contre les actes criminels des agents du Mossad. L'avenir s'annonce sombre.


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