La gestion des réserves de change a soulevé,récemment, un débat et des visions opposées entre les membres du gouvernement. Le ministre de l'Industrie et de la Promotion de l'investissement, Abdelhamid Temmar, se dit favorable au rapatriement des avoirs afin de relancer les projets industriels, tandis que le ministre des Finances, Karim Djoudi , a défendu l'idée de la prudence et du placement sécurisé. L'économiste Mustapha Mekidèche, répondant à notre question, a plaidé pour une autre politique de gestion. Pour l'économiste, il y a lieu de séparer les différentes problématiques liées à la question de la gestion des réserves de change. Selon lui, il n'y a pas de problème d'insuffisance de finances pour le financement de l'économie réelle. «Lorsqu'il s'agit d'importer des biens de service ou des investissements nécessitant des équipements ou de la technologie, l'économie réelle n'est pas dans l'insuffisance financière réelle et dans l'incapacité d'obtenir suffisamment de moyens. Les problèmes sont d'une autre nature. Il s'agit surtout de la réactivité, de la qualité des projets, des capacités des managers pour pouvoir réaliser avec une acceptation par le marché», a-t-il estimé, relevant au passage que l'Algérie n'a pas suffisamment d'entrepreneurs et d'industriels pouvant lancer des projets utiles et profitables à l'économie du pays. L'autre difficulté à laquelle est confrontée l'économie algérienne est le système bancaire qui n'est pas encore réactif. Les problèmes de foncier et d'environnement des affaires ne sont pas en reste. Quant aux disponibilités financières, il n'existe pas de problème d'épargne, tient-il à souligner. Réserves de change :quel rendement ? «S'agissant du rendement attendu des réserves de change, il est évident que le placement dans les circuits bancaires rapporte plus, mais la prudence a été préférée. Les autorités ont décidé de rééquilibrer nos réserves entre l'euro et le dollar. Lorsqu'on constate le recul de l'euro, depuis quelque temps, on va dire que c'est bien de placer les réserves en dollar», a tenu à expliquer l'économiste, soulignant toutefois que «sur le plan mondial, les taux créditeurs des grandes banques centrales européennes et américaines sont trop faibles, surtout en cette période de crise mondiale». Le mieux serait, selon notre interlocuteur, d'enclencher un débat sur la création d'un fonds souverain qui aura la possibilité d'intervenir et d'acheter des actifs à l'étranger. «C'est une opportunité à laquelle il faudrait réellement réfléchir. J'y suis favorable et il va falloir réévaluer cette question parce que les actifs industriels et technologiques sont actuellement en baisse. Il vaut mieux racheter un groupe industriel ou une entreprise de réalisation dans laquelle l'Algérie aura une majorité ou une part même minoritaire. Cette entreprise pourra intervenir à l'échelle nationale de manière à ne pas confier les travaux de réalisation à des sociétés étrangères ou d'importer des produits de l'étranger. C'est ce que réalisent actuellement la Russie et la Chine», suggère-t-il, précisant que «la question de la gestion des réserves de change ne se pose pas en matière de placement». Le ministre des Finances, Karim Djoudi, a indiqué récemment que les réserves de change n'ont pas été entamées en cette période de crise mondiale. Jeudi, le gouverneur de la Banque d'Algérie, Mohamed Laksaci, a annoncé 149 milliards de dollars de réserves de change. Un tel montant peut garantir l'importation durant 36 mois. Selon des sources bancaires, le placement de ces réserves en bons de trésor rapporte près de 2 milliards de dollars par an, une somme considérée comme maigre par les financiers.