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Mauvaises conduites à...
Koléa
Publié dans Le Temps d'Algérie le 21 - 05 - 2010

La conduite en état d'ivresse va-t-elle pousser les pouvoirs publics à revoir leur copie de code moult fois revu ? La conduite en état d'ivresse va-t-elle casser le mur qui sépare le juge du siège et le casier où la récidive est quasi présente ? La conduite en état d'ivresse va-t-elle perdurer, ou ira-t-on jusqu'à interdire la consommation d'alcool, sa vente et autres mesures privatives ?
De toutes ces questions, les motards tous corps confondus s'en fichent éperdument. Eux sont des robots. Ils font leur travail sans état d'âme, et les procès-verbaux tombent chez le juge du siège qui sait à quoi s'en tenir, même s'il ne sait pas si un jour il aura en face de lui un... collègue pris en flagrant délit au volant. Ce qui est certain, nous n'avons pas encore vu un seul magistrat comparaître avec cette grave inculpation. Et là, il vaut mieux ne pas y penser. L'affaire du jour concerne un cultivateur, et le mot «fellah» a été oublié par respect à la profession des enfants de la terre...
Un jeune cultivateur avait été surpris au volant en état d'ivresse manifeste, à la suite d'un accident de la circulation du côté de la plage Si Haouès. Même s'il n'était pour rien dans le sinistre, l'inculpation avait été retenue contre Abdelouaheb.
- «Vous voilà éméché. Devant vous, il y a une petite collision. Et dans l'état où vous étiez, vous n'aviez pas pu freiner à temps, et pan ! C'est l'inévitable qui était arrivé», avait rappelé Hadj Rabah Barik, le président de la section correctionnelle du tribunal de Koléa (cour de Blida) et que l'on dit partante sur la future cour de Tipaza, une cour encore sur le papier, à cause, dit-on, d'un déficit d'encadrement. Passons. L'inculpé détenu n'est pas bien. Il n'est pas bien du tout. Il répond d'une manière gauche.
- «Mais monsieur le président, il n'y a pas eu de mort ni de blessés.»
Le juge refuse cet argument tout en rendant grâce à Allah. «Un an de prison ferme et un autre pour le retrait du permis de conduire», balance Samir Hamel, le procureur, qui s'était d'abord fait un plaisir de commenter le faux argument de l'inculpé.
- «Non, inculpé. Il y a eu conduite en état d'ivresse. Voilà la triste réalité. Le reste relève des élucubrations d'un partisan de Bacchus qui devrait réfléchir la prochaine fois avant de prendre un véhicule après avoir pris quelques verres qui, eux, ne sont pas interdits...»
Maître Karima Bouziani effectue des observations autour de cette histoire d'accident fâcheux.
Elle refuse de commenter les propos du représentant du ministère public qui est, dit-elle, «libre de requérir comme la loi l'entend, de faire des commentaires comme nous le faisons maintenant librement. Mais ce qui est inhumain, c'est l'exagération dans les proximités. Quatre verres d'alcool ! C'est quoi pour empêcher un automobiliste de prendre le volant. Ce qui est plutôt condamnable, c'est le point d'interrogation autour de celui qui a causé la petite collision». «Les circonstances atténuantes sont vivement réclamées», avait marmonné l'avocate. Le juge avait même pris des mots et c'est bon signe pour la mise en examen.
Maître Laadjel, le second conseil, estime que le taux relevé n'était pas si assassin. Avec 0,89 g, il n'était pas ivre mort, mais le fait qu'il a tamponné le véhicule a fait que ce 5 juillet le petit cultivateur avait fêté cette mémorable journée à sa manière et c'est manqué», dira encore le défenseur qui a tout fait pour dédramatiser la situation. Le sourire en coin, l'avocat avait rendu hommage au président qui a su mener les débats que demandaient les faits, seulement les faits : «N'oubliez pas monsieur le président l'absence de maux.
N'oubliez pas Monsieur le président le taux insignifiant relevé sur Abdelouaheb qui ne manquera pas, lors du prononcé du traditionnel dernier mot que la loi lui accorde, de vous dire ses malheurs nés en prison», avait plaidé maître Laadjel qui sera ravi à l'issue de la lecture du verdict – une année avec sursis – et encore plus ravi que le juge les ait suivis lui et sa jeune consœur. L'inculpé, lui, se voyait déjà sur la terre qu'une grosse pluie bienfaisante avait ramollie et préparée, pas pour un verre mais pour un... soc.


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