Bien qu'ils aient été destinataires d'une copie de l'ordonnance du tribunal exigeant l'arrêt immédiat de la grève qu'ils observent depuis lundi matin, les travailleurs du complexe sidérurgique d'El Hadjar ont voté pour la poursuite de leur mouvement. Lors d'un rassemblement qui a regroupé les grévistes dans l'enceinte du site ArcelorMittal, ceux-ci ont décidé à l'unanimité de faire fi de la décision de justice et de ne pas reprendre leur poste tant que la direction n'aura pas acquiescé à leur plateforme de revendications salariales. Leurs représentants syndicaux que nous avons contactés expliquent que les salariés du complexe ont perçu l'ordonnance du tribunal d'El Hadjar exigeant le gel du mouvement comme un déni de droit et qu'ils ont dit leur volonté de poursuivre leur combat quoi qu'il advienne. Interrogé sur leur propre position, les membres du conseil syndical ont répondu comme un seul homme que «nul n'est au-dessus de la loi mais que leur lutte pour les droits des travailleurs doit se poursuivre». Le secrétaire général du syndicat d'entreprise, Smaïn Kouadria, est lui-même effaré par la fermeté du jugement mais il estime que ce qui a été entrepris par ses camarades et lui depuis le début du conflit ne souffrait d'aucune infraction aux textes régissant les conflits sociaux. Pour lui, le recours à la grève est un moyen légalement reconnu pour faire aboutir les revendications des travailleurs. «Nous avons respecté à la lettre la procédure de conciliation. A commencer par les relances effectuées auprès de l'inspection du travail à laquelle nous avons adressé au moins trois correspondances pour l'inviter à nous délivrer en vain le procès-verbal de non-conciliation après l'échec avéré des négociations. Ensuite, nous avons convoqué l'assemblée générale des travailleurs il y a dix jours pour recueillir l'avis des salariés sur la décision d'observer une grève de protestation ou pas», signale Kouadria. Selon lui, la direction a tout fait pour empêcher les travailleurs de s'exprimer. «Elle a commencé par contester le mode de scrutin en dénonçant le vote à main levée et en insinuant que le nombre des travailleurs présents à l'assemblée générale du 10 juin était inférieur à celui que nous avons nous-mêmes recensé en présence d'un huissier dûment assermenté et qui est de 5000.» Stoïque pourtant, Kouadria attend avec sérénité la décision du tribunal relative à la deuxième plainte pour grève illégale introduite par Vincent Le Gouic. Le syndicaliste assure qu'il a confiance malgré tout en la justice algérienne et qu'il est prêt à assumer ses responsabilités quel que soit le verdict du tribunal d'El Hadjar. La direction confortée par la justice La direction d'ArcelorMittal se dit quant à elle confortée par la position des magistrats qui ont rendu ce premier jugement, mais est contrariée par l'attitude de désobéissance des travailleurs. Un des responsables assure pourtant que les mesures appropriées seront prises pour amener les récalcitrants à se conformer à l'ordonnance d'arrêt de grève et à reprendre le travail au plus tôt. Notre interlocuteur indique que d'autres plaintes pourraient être déposées auprès de la justice si les travailleurs maintiennent la grève. Nous apprenons que les dirigeants de l'entreprise Sider, partenaire algérien d'ArcelorMittal, qui ne s'étaient pas manifesté dans ce conflit jusqu'ici ont entamé des discussions avec le directeur général de l'entreprise de sidérurgie, Vincent Le Gouic, hier en fin d'après-midi au niveau de l'hôtel Solb du complexe d'El Hadjar. Par ailleurs, les travailleurs des sites miniers d'ArcelorMittal de l'Ouenza et de Boukhadra ont marqué leur soutien aux métallos en observant un débrayage de 2 heures hier.