Qu'elle soit l'œuvre d'Abu Zeïd, de Belmokhtar ou de tout autre chef terroriste affilié à Al Qaïda, l'embuscade de Tinzaouatine est un événement suffisamment grave pour ne pas rester sans suite. Il ne fait nul doute que l'attaque sanglante de Tinzaouatine, qui a coûté la vie à 11 éléments de la Gendarmerie nationale, soit l'œuvre de l'Aqmi. La branche maghrébine d'Al Qaïda, qui en a d'ailleurs revendiqué la paternité à travers des tracts jetés sur les lieux de l'embuscade, confirme à travers cet acte sa capacité de nuisance et, surtout, son aptitude à réussir des coups de main spectaculaires dans une région supposée être sous la loupe des services de sécurité. De surcroît contre un corps d'élite de l'armée algérienne, la Gendarmerie nationale, qui s'est brillamment illustrée dans la lutte antiterroriste et contre le crime organisé depuis sa création. L'affaire de Tinzaouatine est grave et nécessite plus qu'une riposte de circonstance qui consisterait, entre autres, à traquer les groupes terroristes le long de la bande frontalière ou, carrément, à l'intérieur du territoire malien, comme cela est suggéré par quelques sources qui affirment que le président Amadou Toumani Touré aurait accordé à l'armée algérienne le droit de poursuivre les criminels de l'Aqmi sur son territoire. Si la première est une action permanente de l'armée algérienne, la seconde est une éventualité qui ne risquera pas de se produire car l'Algérie, fidèle à ses principes fondateurs, n'admet pas de recourir à ce concept aux forts relents néo-colonialistes. Pour rappel, le droit de poursuite a été développé par la France coloniale qui s'en est servi contre le FLN en territoire tunisien. Ce «droit» est à l'origine du massacre de la population civile de Sakiet Sidi Youcef. L'apport du renseignement occidental La riposte viendra, et c'est l'hypothèse la plus plausible, d'une action concertée décidée par les armées des 4 pays saharo-sahéliens avec l'accord de leurs gouvernements respectifs (Algérie, Mali, Niger, Mauritanie). C'est le commandement unifié des 4 armées, installé depuis avril à Tamanrasset, qui décidera du moment, de l'opportunité et de la consistance des «contre-attaques». Celles-ci, avaient rappelé des experts militaires algériens, ne sauraient être massives, avec engagement simultané de forces terrestres héliportées et aéroportées. Bien au contraire, ce sont des opérations ciblées, ponctuelles et exécutées avec rapidité, qui dépendent en grande partie de la fiabilité du renseignement militaire. La traque des bandes circulant à bord de quelques véhicules légers ou se fondant dans les convois civils, voire parmi la population nomade, impose le recours à des actions commandos et des attaques-éclair d'une extrême minutie. Les experts rappellent que le quadrillage des territoires concernés par des unités militaires est quasiment impossible, à moins d'une étroite collaboration des pays occidentaux, notamment les USA, qui disposent de systèmes de surveillance par satellites très sophistiqués. Le partage des données est essentiel, sinon fondamental pour le succès des opérations militaires que le commandement unifié de Tamanrasset est appelé, tôt ou tard, à déclencher. Le président Bouteflika l'a d'ailleurs fait comprendre aux grands de ce monde, lors du dernier G8, en exigeant leur contribution, précisément, dans les domaines particuliers du renseignement, de l'équipement et de la formation. La population choquée Des sources à Tamanrasset indiquent que la population est en état de choc depuis l'attaque meurtrière de mercredi. Beaucoup ne comprennent pas comment autant de gendarmes ont pu être tués en même temps, au moment où toute la région est sur le qui-vive. D'autres estiment qu'«il faut venger cet affront qui ternit l'image de l'Algérie». Un opérateur touristique dit ne pas admettre pareil relâchement des services de sécurité, avouant toutefois avoir mal que des militaires algériens se fassent massacrer par des bandes de mercenaires. Notre source confirme qu'à travers cet acte odieux, les criminels portent un double coup à l'Algérie : «Ils tuent ses enfants et empêchent son développement.» Enfin, pour un autre opérateur, «l'attentat de Tinzaouatine signe la fin du tourisme dans la région». Pour les autres catégories de la population, l'idée partagée est que «l'Etat doit utiliser tous les moyens en sa possession pour nous débarrasser de tous les criminels qui ont pris en otage notre wilaya».