Le recasement des 270 familles du bidonville El Djazira, dans la commune de Bab Ezzouar, a permis à celles-ci d'avoir un toit digne et aux voisins de vivre désormais dans le calme et la sécurité. Les habitants du quartier El Djorf, où se trouvait le bidonville rasé le 18 juillet, ont beaucoup souffert de la présence de ce site où des gens pratiquaient le commerce de la drogue, le crime et la prostitution. «C'est l'indépendance pour eux et pour nous !» Il n'y a pas de meilleures expressions pour décrire l'ambiance qui règne actuellement au sein du quartier El Djorf, dans la commune de Bab Ezzouar, après l'évacuation totale du fameux bidonville El Djazira. La coexistence entre les locataires des immeubles et les gens des baraques était difficile, voire impossible. Les conflits naissaient au quotidien. La solution idéale n'était autre que le divorce à l'amiable. Ce qui fut fait. Dans le cadre de la mise en œuvre du programme portant éradication progressive de l'habitat précaire, la wilaya a officiellement relogé, le 18 juillet, 270 familles vivant dans ce baraquement dont les premières y étaient depuis le début des années 1990. Contrairement au brouhaha habituel, la cité était très calme hier matin. Cela fait maintenant dix jours que l'agglomération a été débarrassée de ces centaines de masures infectes, hauts lieux de prostitution, du crime et du commerce de la drogue, avec toutes les nuisances que cela provoquaient, au grand désespoir des voisins mis devant le fait accompli. La circulation automobile est devenue plus fluide entre l'entrée de l'université Houari Boumediene et l'intérieur de la cité. Une fois arrivé au pied des bâtiments, on a l'impression qu'il y a moins de monde qu'auparavant. Chez les habitants, c'est la grande joie de (re)trouver le calme. Ils ne le cachent pas. «C'est l'indépendance pour eux et pour nous !», se réjouit en fait un résident qui loge en face du site évacué de ses occupants. «Eux ont eu des logements, malgré quelques injustices commises envers certaines familles qui ont été jetées à la rue ; et nous, nous avons retrouvé le calme», ajoute-t-il. Les voisins ont eu droit au calme mais aussi et surtout à la sécurité. «Nous n'avons plus peur de traverser cet endroit. Avant, si vous étiez de passage devant les baraques, il y avait des grands risques que vous soyez agressé à l'arme blanche ou même verbalement. Parfois, nous étions obligés de présenter nos papiers quand la police fermait les accès pour des contrôles d'identité. Maintenant, tout cela a disparu. Même les véhicules Mazda se font rares !», affirme un jeune. El Djazira tenait sa réputation de par l'activité qui est la sienne : la délinquance. Chaque fois qu'un vol, un crime ou une agression sont commis dans la commune de Bab Ezzouar ou ailleurs, les services de l'ordre dressaient aussitôt des barrages de contrôle dans les entrées du bidonville, cherchant des suspects. Ils les connaissent tous pour les avoir vus plusieurs fois dans les commissariats. Une forte présence policière Quand on pénètre à El Djorf, du côté du parc roulant de l'APC, l'ancien bidonville se fait signaler par la forte présence policière. Le dispositif de sécurité a été mis en place de manière à protéger le périmètre de tous les côtés. Dans tous les coins, à l'ombre, on voit des policiers et des agents de la garde communale en train de discuter entre eux. Ils sont environ une cinquantaine de personnes mobilisées sur place afin d'empêcher toute intrusion dans le site. Leur présence est plutôt dissuasive. Les instructions sont fermes : même les journalistes, surtout les photographes, n'ont plus le droit d'y pénétrer «sans autorisation». Un véhicule de la police est stationné à l'entrée. En face, dans un garage dont le rideau a été vandalisé le jour du recasement, une vieille dame issue du bidonville s'y cache encore faute d'un logement. Après le passage des engins de démolition, El Djazira a été submergée. Ce qui en reste rassemble beaucoup plus à des bateaux rejetés sur la rive par la tempête. Les familles relogées le 18 juillet occupaient une centaine de baraques construites en parpaing et les appartements de deux bâtiments laissés en chantier depuis l'arrêt des travaux de construction, il y a de cela près de vingt ans. Les façades des deux immeubles ont été arrachées. L'intérieur devient ainsi visible même de loin. De ce fait, un intrus ne peut plus passer inaperçu. Les masures ont été complètement démolies et les gravats évacués. Dans l'autre extrémité du site, les gens d'El Djazira avaient monté leurs habitations précaires sur les fondations d'un autre bâtiment. Là, les opérations de démolition ont été réalisées de façon sommaire. Le but étant de rendre impossible une nouvelle occupation des lieux. Les voisins croient savoir que c'est l'autorisation qui n'a pas été donnée afin de mener à terme la destruction des parties déjà réalisées des trois immeubles. En tout cas, les engins des travaux publics ont été évacués et rien n'indique qu'un chantier y est ouvert. Le devenir de cette importante assiette reste donc à déterminer, même si la relance du projet de la construction de logements est plus que plausible. D'ailleurs, une soixante de logements sont mis en chantier dans un terrain mitoyen, où la réalisation a atteint un taux très avancé. Toujours des baraques à El Djorf ! L'évacuation des familles d'El Djazira et la démolition de leurs habitations précaires n'a pas réglé de façon définitive le problème de la présence des baraques dans le quartier. En fait, à la sortie de la cité El Djorf, du côté du cimetière El Alia, d'autres masures continuent d'être occupées au vu et au su de tout le monde. Les deux sites sont situés dans le même périmètre, à une distance de 200 mètres environ. Ce deuxième baraquement est construit de la même manière que le site démoli. Il est planté au pied d'un immeuble et les «portes» donnent directement sur la chaussée. Pas même un trottoir ! Ces familles seront-elles aussi évacuées ?