Alors que les statistiques exactes concernant les personnes classées en dessous du seuil de la pauvreté sont toujours inexistantes, l'affaissement de la classe moyenne se précise jour après jour dans la troisième wilaya du pays. A défaut de postes de travail, en plus de la hausse vertigineuse des prix des produits de large consommation, des milliers de personnes vivent dans la précarité. Le nombre des pauvres, estimé par les services concernés dans la wilaya de Constantine, est souvent critiqué. Les chiffres révélés représentent une partie seulement de la population démunie. Au niveau de la direction de l'action sociale (DAS), on parle de 36 323 pauvres, comptabilisés récemment à travers le territoire de la wilaya. Un nombre jugé loin de la réalité, d'autant que le nombre des habitants avoisine le million, dont des milliers de chômeurs. En l'absence de critères cohérents, qui permettent aux concernés d'établir les listes des pauvres selon les normes, la partialité et la problématique «faux et vrai pauvre» sont toujours d'actualité. De l'avis de plusieurs sources au fait du sujet, le profil du démuni, désigné par les parties concernées, est à revoir. Dès les premières heures du matin, des centaines de personnes déambulent dans les différentes artères de la ville des Ponts et d'autres squattent les trottoirs, pour mendier. Une scène décevante, qui abîme l'image de marque de la capitale de l'est du pays. «La majorité de ces personnes sont de faux mendiants. Ils sont originaires de plusieurs wilayas limitrophes», confirmera un cadre de la DAS. Beaucoup de personnes bénéficient illicitement de l'aide de l'Etat destinée spécialement aux démunis. Ces pseudo-pauvres usent des failles des règlements liés au profil de l'individu qui ouvre droit à l'aide de l'Etat. «Parmi les faux pauvres figurent des commerçants illicites», révélera un cadre de la DAS de la wilaya. Les commerçants en question activent sans registre du commerce et sans local, ce qui leur permet de profiter des réglementations en vigueur et d'arracher la carte de démuni. «Cette carte est généralement utilisée durant le mois de jeûne et la rentrée scolaire», expliquera notre interlocuteur. Ainsi, se faire passer pour un démuni n'est pas difficile, surtout lorsque le nom de l'imposteur ne figure pas dans les registres des personnes actives. Des centaines de personnes, qualifiées de sans revenus alors qu'elles vivent décemment, envahissement les bureaux des différents établissements et des directions chargées de ces dossiers, afin de bénéficié du couffin de Ramadhan et de la célèbre prime de 3000 DA accordée par le président de la République. Notons qu'environ 84 000 écoliers, issus de familles démunies, ont bénéficié de ladite prime durant la dernière rentrée scolaire. Un chiffre qui en dit long. «Nos services découvrent malheureusement, chaque année, que plusieurs personnes, qui ont bénéficié des différentes aides octroyées par l'Etat, nous ont bernés. Il faudrait mettre en place un nouveau système ou de nouvelles méthodes pour distinguer le vrai pauvre du faux. L'enquête sociale est l'un des moyens efficaces», soulignera la même source. Certains observateurs locaux proposent la formule «investigation sur terrain» et faire participer l'assistante sociale dans cette action. Pour établir des listes incontestables comportant les noms des individus classés en dessous du seuil de la pauvreté, les services concernés sont appelés à étudier cas par cas, en se basant sur les résultats des enquêtes effectuées sur le terrain. Les documents, exigés par les services des communes et la DAS, ne sont plus la seule référence pour dire que telle personne est pauvre. «L'ère de l'étude basée sur la paperasse seulement est révolue, la contribution des assistantes sociales est indispensable», dira une employée de la DAS. Nombreux sont les pauvres qui refusent de faire le parcours du combattant pour bénéficier d'une attestation nommée démunie. «Les familles démunies, qui souffrent en silence, sont nombreuses. Pour ces pauvres gens, s'inscrire dans les listes des démunis est synonyme de mendicité», conclura notre interlocutrice.