L'enlèvement jeudi matin de cinq Français, d'un Togolais et d'un Malgache à Arlit, au Niger, n'est pas de nature à rassurer le gouvernement français, déjà sérieusement préoccupé par la situation sécuritaire interne. Cette opération intervient au moment où Brice Hortefeux, ministre français de l'Intérieur, s'inquiète du niveau élevé de la menace terroriste en France. Un mois et demi après l'épisode Germaneau et sa gestion plus que controversée, la France est à nouveau dans la ligne de mire du terrorisme islamiste. Jeudi matin, à Arlit, dans le nord du Niger, 5 Français, un Malgache et un Togolais salariés de la multinationale Areva et son sous-traitant Sogea-Satom, une filiale du groupe Vinci, ont été enlevés par un groupe d'hommes armés «parlant arabe et tamasheq», lié à la mouvance Al Qaïda. Bernard Kouchner, ministre français des Affaires étrangères, dit n'avoir aucune indication précise sur l'identité des ravisseurs mais demeure convaincu que l'opération a été exécutée sinon par les mêmes groupes qui se sont illustrés dans l'enlèvement de ressortissants européens au Sahel, du moins par des groupes proches de la mouvance Aqmi. Les otages auraient été transférés au nord du Mali, à la frontière avec l'Algérie, dans une zone supposée être le sanctuaire des ravisseurs. Une source sécuritaire au Niger a déclaré que les assaillants seraient probablement des éléments d'Al Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) ou des bandits qui revendent leurs otages aux jihadistes. Le plus inquiétant pour le Quai d'Orsay – et les entreprises occidentales présentes dans le Sahel – c'est le mode opératoire utilisé par les ravisseurs. Des témoins oculaires affirment que les trois salariés de Sogea-Satom étaient chez eux dans la zone sécurisée d'Arlit. Le salarié d'Areva et son épouse étaient aussi dans leur habitation d'Arlit. Selon un salarié d'Areva résidant dans la même ville, les assaillants se sont rendus jusqu'aux quartiers où vivent des salariés de Satom et Areva. Les premières informations avaient laissé entendre que les ressortissants français étaient sortis sans escorte et ont été enlevés par un groupe de ravisseurs enturbannés. L'opération d'Arlit montre par ailleurs les limites des mesures de sécurité prises par les entrepreneurs français dans la région. Areva, qui a déjà eu affaire aux groupes armés (4 de ses employés ont été enlevés par la rébellion touarègue) avait pris des précautions supplémentaires pour protéger son personnel. Le groupe, qui exploite deux gisements d'uranium et emploie 2500 travailleurs dont une cinquantaine de Français, avait annoncé le 27 juillet le renforcement de sa vigilance au Niger, proposant également de rapatrier ceux qui le souhaitent vers la capitale Niamey. L'opération d'Arlit a précipité les départs puisque on s'attend au rapatriement vers la France de plusieurs employés. Dès l'annonce de la nouvelle, Nicolas Sarkozy a eu à présider, dans la soirée de jeudi, un conseil restreint de défense à l'Elysée. Une cellule de crise a été montée au ministère des Affaires étrangères. Dans les pays du Sahel, la tension est montée d'un cran. Le Burkina Faso, qui se croit également menacé, a renforcé le dispositif de sécurité, notamment dans les zones du nord où activent quelques associations étrangères et entreprises employant des Occidentaux. Pour l'instant, les autorités françaises affirment qu'elles n'ont reçu aucune revendication ni demande de rançon. Le Quai d'Orsay croit savoir que les otages sont aux mains du même groupe qui avait détenu Michel Germaneau, ce qui n'est pas pour rassurer sur les véritables intentions des ravisseurs.