Le porte-parole du Département d'Etat, Philip Crowley, n'en fait pas un secret : les ventes d'armes US à des alliés tels qu'Israël et l'Arabie saoudite sont dans l'intérêt des Etats-Unis. Ce se serait même de bonne guerre, quitte à ce que la région soit davantage militarisée. L'Egypte peut continuer d'appeler Tel-Aviv à se conformer au traité de non prolifération, Israël s'arme jusqu'aux dents. Spécialement réuni par Benjamin Netanyahou, le Conseil des ministres israélien a ainsi approuvé l'acquisition de 20 avions de chasse F-35, à dix milliards de shekels la pièce. Il faut dire que l'avion américain est considéré comme le plus perfectionné de sa génération. En plus de son prix exorbitant, l'adjonction d'appareils israéliens, finalement acceptée par le grand frère d'Amérique, devrait également coûter une fortune. Peu importe, c'est le prix à payer pour continuer de s'offrir l'irréversible amitié de l'administration américaine qui, en plus de remplir ses caisses, veut préserver ses intérêts au Proche et Moyen-Orient. La Fédération de Russie, qui attend ses Mistral français, a-t-elle le droit d'en faire autant, vendre des armes à la Syrie, contrat et factures faisant foi ? Philip Crowley ne peut que froncer ses sourcils, Washington et Tel-Aviv sont particulièrement inquiets à ce sujet et ils l'ont fait savoir à Moscou, où Benjamin Netanyahou s'était rendu secrètement il y a de cela quelques mois pour en discuter avec les hommes forts du Kremlin. Mais en dépit des protestations américano-israéliennes, apprend-on dans les colonnes du Haaretz, la Russie est bel et bien décidée à honorer ses engagements envers le gouvernement de Damas. Bref, tout comme les Etats-Unis, la Fédération de Russie est elle aussi empreinte de défendre ses intérêts dans la région, en renforçant militairement son allié syrien. Surtout que celui-ci s'estime déçu du fait que les Etats-Unis n'ont pas apporté de proposition nouvelle visant à rétablir la paix entre Damas et Tel-Aviv. Pis, Avigdor Lieberman, le chef de la diplomatie israélienne, a remis une louche : l'Etat hébreu doit écarter toute possibilité d'échanger la paix contre la guerre. C'est-à-dire ne plus réfléchir en termes de «paix des braves», censée conduire au final de normalisation arabo-israélienne. Mais se concentrer exclusivement sur les négociations directes palestino-israéliennes bien que le même Lieberman ne croit pas que celles-ci vont déboucher sur la création d'un Etat palestinien d'ici un an. En raison de ce moratoire sur le gel de la colonisation que l'Etat hébreu refuse de prolonger pour éviter la confrontation avec les colons et l'implosion du gouvernement de coalition ? Tandis que Netanyahou rejette tout prolongement de ce moratoire, du moins publiquement, son ministre de la Défense, Ehud Barak chercherait de son côté une alternative valable qui passerait par un gel de facto des constructions. Ce qui pourrait ouvrir sur un bras de fer au sein même de l'exécutif israélien alors que le ministère de l'intérieur israélien se prépare déjà à la fin du gel de la colonisation. Côté palestinien, la situation risque de prendre une mauvaise tournure. Si les colons venaient à avoir le dernier mot, ne serait-ce qu'à travers une reprise partielle de la colonisation, Mahmoud Abbas mettra-t-il sa menace de démissionner à exécution ? Ce n'est pas la première fois qu'il l'envisage mais la fin des négociations directes signifierait une victoire de ses rivaux politiques qui ont insisté auprès de l'Autorité palestinienne pour qu'elle renonce à reprendre le chemin de la négociation. Ce qui aurait obligé l'administration de Tel-Aviv à déposer une démission collective, en vue d'élections législatives anticipées. Voulant à tout prix entretenir ses intérêts dans la région, les States lieront-ils directement le prolongement du moratoire israélien au contrat de vente des F-35 ? Probablement pas. Toutefois, Hillary Clinton a admis que la poursuite du gel des constructions implique un prix politique à payer. Attendons de voir à quoi il ressemblera.