Son entretien avec Mahmoud Abbas terminé, le président Nicolas Sarkozy a joint par téléphone le Premier ministre israélien pour lui signifier sa grande déception. La colonisation ne peut pas reprendre comme si de rien n'était. Il faut que cesse cette mascarade, on ne peut faire preuve de retenue quand on se remet à 300 000 à construire des colonies, censées garantir demain la pérennité du peuple juif. Avigdor Liebeman, le chef de la diplomatie israélienne, peut prétendre aujourd'hui que durant les 10 mois qu'a duré le moratoire sur le gel de la colonisation, les Palestiniens n'ont fait que perdre du temps. Toujours est-il que si les pourparlers directs viennent à échouer, les Vingt-deux de la Ligue arabe se réunissent le 4 octobre prochain afin d'aider le chef de l'Autorité palestinienne à prendre sa décision, seul le gouvernement de Tel-Aviv endossera l'entière responsabilité. Ne serait-ce que pour faire avancer la paix, au lieu de la conclure, il ne faut pas gâcher cette chance. Probablement, la dernière. Partielle ou totale et quitte à ce qu'elle attire les foudres sionistes, la colonisation doit être stoppée. Nicolas Sarkozy est assez contrarié comme ça et il ne serait pas bon de le pousser à sortir de ses gonds. La faute à Netanyahou qui ne sait plus comment ménager ses frères colons sans prendre le risque de faire sauter sa coalition gouvernementale ? S'il n'y avait que lui, le maître de l'Elysée aurait su lui dire deux mots au téléphone. Ce qui inquiète le plus le président Sarkozy, c'est le fait que son homologue américain continue de tirer le tapis des négociations de paix vers lui. Ce n'est pas juste que cette initiative porte la seule marque de fabrique US. Surtout que les deux hommes s'étaient entendus pour lancer une action automnale commune en faveur de la paix au Proche-Orient. L'ami Obama doit le savoir aujourd'hui mieux que demain : il ne peut y avoir d'avancées réelles si l'Amérique continue de botter en touche l'Union européenne, avec ou sans la libre circulation des Roms. L'UE doit être associée aux discussions en cours. Aussi, l'Union pour la Méditerranée que la France et l'Egypte tentent de sauver du naufrage. Depuis Camp David, les Etats-Unis ne sont pas parvenus à faire avancer les choses en matière de paix. Et ce n'est pas parce que la France n'est pas partie guerroyer en Irak qu'elle doit être exclue des pourparlers palestino-israéliens. Son engagement aux côtés de l'empire Yankee en Afghanistan et son ambition à faire renverser le régime iranien, ce qui n'est pas rien, plaident pour son attachement à la relation transatlantique post Irak. «Grand pays» de l'Europe, malgré son moteur économique en panne, et fine connaisseuse des affaires de l'ensemble du Moyen-Orient, la France a toute sa place dans l'aboutissement du plan de paix US. Si celui-ci venait à réussir, il lui permettrait demain de ne pas se laisser aspirer par les sables mouvants aux quatre coins de cette région. Par son insistance à vouloir être associée au plan de paix US, la Ve République voudrait-elle sa part de galette avant que les grandes puissances la grignotent jusqu'à ne laisser aucune miette ? Surtout qu'en Afrique - où elle a perdu le luxe de se servir à la pompe -, elle n'a de yeux que pour ses otages, enlevés à tour de bras par les djinns de l'Aqmi ? Maintenant qu'Areva n'est plus l'ombre d'elle-même au Niger et que la rumeur sur l'implantation de l'Africom court les déserts du Sahel, la France de Sarkozy se retournerait-elle vers le Proche et Moyen-Orient pour tenter de remplir son grenier vide ? S'il veut continuer d'être l'ami de Paris, le président Obama doit aussi apprendre à tendre la main vers ses alliés et doit respecter la règle du partage. Il y va du bien-être commun dans la maison transatlantique dont l'un des murs vient d'être fissuré des mains de Netanyahou.