Quel est le profit réalisé par Naguib Sawiris, PDG d'Orascom Télécom Holding (OTH) de la cession d'Orascom Télécom Algérie (Djezzy) à l'opérateur de téléphonie mobile VimpelCom ? La question mérite d'être posée dans la mesure où la plus-value réalisée sur la transaction doit être imposable, a estimé Salah Mouhoubi, expert en économie, contacté hier à ce sujet. L'expert, qui s'est posé la question quant au prix payé par l'opérateur russe à Naguib Sawiris, est convaincu que ce dernier a engrangé une importante plus-value sur la transaction conclue avec l'opérateur russe. Il devra en conséquence s'acquitter des impôts sur les profits qu'il a réalisés. En outre, Naguib Sawiris devra être imposé sur les superprofits réalisés en Algérie par OTH, conformément à la loi de finances complémentaire 2010. Sollicité à propos de la proposition de cession avancée par VimpelCom (8 milliards de dollars) pour revendre OTH à l'Algérie, M. Mouhoubi considère que le prix devra être fixé soit sur la base du marché ou conformément à un arrangement entre l'Algérie et le groupe russe. Pour rappel, la réglementation algérienne prévoit que la cession d'une licence de téléphonie mobile exige au préalable une autorisation de l'Agence de régulation des postes et télécommunication (Arpt). C'est ce qui justifie le droit de préemption que pourra exercer l'Algérie sur la vente d'OTA, explique M. Mouhoubi, estimant que «l'Algérie doit être ferme et ne doit pas subir un préjudice financier suite à la conclusion de la transaction avec l'opérateur russe». L'expert économique a même évoqué l'hypothèse de la possibilité de «la nationalisation des biens matériels et immatériels de Djezzy», du moment que le propriétaire initial qui est Orascom Telecom Holding a transgressé la réglementation algérienne en cédant OTH sans respecter la réglementation en vigueur. Il trouve, par la même occasion, curieux le fait que la cession soit annoncé la veille de la visite du président russe en Algérie. Hind Benmiloud, avocate agréée près la Cour suprême, avait indiqué dans un précédent entretien accordé au Temps d'Algérie que notre pays «dispose de toutes les lois pour exercer ses droits de reprise d'OTA». Elle avait expliqué que «supposer qu'Orascom Telecom Holding (OTH) pourrait vendre ses actions partiellement ou totalement ou fusionner ou se faire absorber par des sociétés tierces ou seulement négocier sans en avoir à référer à l'ARPT l'exposerait au retrait de la licence d'OTA». Le holding a signé tous les accords, cahier des charges et même la convention d'investissement entre l'Etat et OTH approuvée par le décret exécutif n°01-416 du 20 décembre 2001. Tous les textes prévus par l'Etat algérien sont opposables aussi bien à OTH qu'à OTH et ces deux dernières ne peuvent l'ignorer. Selon l'avocate, les nouvelles dispositions de la loi de finances complémentaire 2009 obligent, en cas de changement d'actionnariat, à se conformer à l'obligation de céder une part de 51% du capital de la société OTH Spa à un ou plusieurs actionnaires résidents nationaux, qu'ils soient publics ou privés. Elle a expliqué que «l'Etat algérien, en sa qualité de concédant, dispose de moyens tout à fait légaux pour s'opposer à toutes transactions commerciales qui se feraient en violation de la loi par tout opérateur quel qu'il soit, de nationalité algérienne ou étrangère, dès lors que ces opérateurs ont signé des cahiers des charges». Et d'ajouter, à l'occasion, qu'«en droit des télécommunications, la licence octroyée encadre l'activité de l'opérateur qui en a bénéficié et définit ses droits et obligations». Cette licence est attribuée pour une durée limitée, et est assortie de conditions spécifiques. C'est à OTH pour le compte et au nom d'OTA que la licence a été attribuée. Donc c'est aux deux entités que le décret exécutif n°01-219 du 31 juillet 2001 et le cahier des charges sont opposables. Dans le décret suscité, l'article 3 rappelle que «la licence objet de ce décret est personnelle et ne peut être cédée ou transférée que dans le cadre et conformément aux dispositions législatives et réglementaires en vigueur et aux conditions fixées dans le cahier des charges.» L'article 39 du même décret dans son alinéa 1 précise encore le caractère personnel de la licence «sous réserve du présent cahier des charges, la licence ne peut être cédée ou transférée à des tiers qu'aux conditions et procédures définies à l'article 19 du décret exécutif n°01-124 du 9 mai 2001. Ce dernier dispose ce qui suit : «La licence ne peut être cédée ou transférée à des tiers qu'aux conditions et procédures définies à l'article 19 du décret exécutif n°01-124 du 15 Safar 1422 correspondant au 9 mai 2001 portant définition de la procédure applicable à l'adjudication par appel à la concurrence pour l'octroi des licences en matière de télécommunications».