«C'est une blague (...) Ne vous inquiétez pas pour le parti», a lâché ironiquement le secrétaire général du FLN, Abdelaziz Belkhadem, en deux sorties différentes, pour discréditer le mouvement de redressement qui le vise particulièrement. La contradiction à ses propos, qui ne rassurent désormais personne, est venue immédiatement avec l'installation d'un bureau national. A la base comme au sommet, la crise s'amplifie, d'autant plus qu'une troisième voie «travaillerait dans l'ombre», alors que Belkhadem, qui a réuni le bureau politique la semaine dernière, a évoqué pour la première fois sa disponibilité à lâcher les rênes du parti si le comité central lui retire sa confiance. Ainsi, le mouvement de redressement dont fait l'objet le Front de libération nationale (FLN) se matérialise. Les choses s'accélèrent au niveau du clan des redresseurs, dont le bureau «parallèle», qui serait installé à Hydra, rendra public incessamment, comme nous l'avons annoncé dans l'une de nos précédentes éditions, un communiqué. La «crise morale» qu'ils dénoncent se poursuit, pour sa part, au niveau local. L'on apprend que de nombreux militants FLN d'Alger-Centre ont tenu samedi dans la soirée une réunion pour dénoncer le nouvel exécutif de la kasma. Qui tire alors les ficelles de ces contestations du moment que les redresseurs s'en lavent les mains ? «Je n'ai aucun clan à El Oued», déclarait El Hadi Khaldi, un des chefs de file des redresseurs qui a révélé que «l'actuel mouhafedh a boycotté la liste du FLN et soutenu celle d'autres partis». Des «affairistes» ont-il investi le FLN ? «La maison FLN abrite tous les Algériens, parfois de tendances idéologiques qui n'ont rien à voir avec celles édictées par le parti», affirmait un ex-ministre FLN, alors que le chargé de la communication actuelle, qui a remplacé au pied levé Saïd Bouhadja, soutenait qu'«ils ont voulu faire main basse sur les structures de base du parti», et accuse, pour sa part, Kassa Aïssi, alors qu'un ancien ministre affirmait : «Une troisième voie est-elle en train de faire son chemin au sein de l'ex-parti unique ? Est-ce le recommencement de l'histoire ?» Si la crise du MTLD de 1949 avait pour objectif, selon les leaders du mouvement, d'«œuvrer à unifier les rangs du mouvement national en un front unique», la crise du FLN tourne autour des questions d'intérêts, de «placement et/ou replacement sur la scène politique». Il faut que le «parti soit au service du valeureux peuple algérien et de notre pays, et non au service de personnes et de leurs ambitions politiques», déclarait Salah Goudjil, l'un des meneurs du mouvement de redressement, qui a, dans une missive adressée aux militants – un message direct à l'adresse de Belkhadem – proposé «la mise sur pied d'un directoire composé des sages du parti issus du comité central», un directoire qui se chargera «de trouver des solutions de sortie de crise». Le mot est lâché : la crise. La dérive du FLN, dont l'opération de renouvellement des instances locales a mis à nu touts les conflits d'intérêts, la bataille inavouée, en perspective des élections législatives de 2012, est-elle en train de se concrétiser ? Les redresseurs voient en la démarche de Belkhadem and co une trajectoire qui mène droit vers le mur et qui risque de faire perdre à l'ex-parti unique son assise et surtout son hégémonie sur les assemblées élues. «Je ne leur permets pas de mener le parti à la dérive», menaçait aussi El Hadi Khaldi, alors que Goudjil insiste sur la «mobilisation concrète permanente et efficace, sans perdre de vue les échéances électorales de 2012, à l'occasion desquelles nous devons présenter une image d'unité et de cohérence réelles afin de mériter de nouveau la confiance de notre peuple». Belkhadem ne serait pas également resté les bras croisés puisqu'il prépare «une contre-attaque». Sa propre contre-attaque. «Nous répondrons lorsque ces personnes que nous invitons à agir dans un cadre légal auront affiché leur position», nous déclarait avant-hier le chargé de la communication du FLN, Kassa Aïssi. Evincé par Belkhadem, cité comme l'un des «instigateurs» du mouvement de redressement, Saïd Bouhadja s'en démarque. Tout en invitant la direction actuelle «à prendre conscience de ses dérives», il nie dans une déclaration au Temps d'Algérie avoir des contacts avec les redresseurs. Que se passe-t-il concrètement au FLN ? Notre interlocuteur nous propose de faire une «lecture juste» des évènements. Dans ces «dérives» reconnues par tous, une chose est sûre : l'éclatement du FLN est une réalité à éviter à… tout prix. Si à la base, c'est une bataille à couteaux tirés dont les visées sont désormais identifiées, au sommet du FLN, l'on tente des deux côtés (direction actuelle et clan des redresseurs), par le biais de déclarations diamétralement opposées, accusatrices, de prouver que la seule finalité dans ces remous est la stabilité du parti. Certains analystes parlent d'un changement imminent à la tête du FLN dans le sillage des bouleversements qui attendent la scène politique.