La commission juridique du Parlement européen est en train de réexaminer le statut avancé concédé il y a deux ans par l'Union européenne au Maroc pour déterminer si son élargissement au Sahara occidental est légal ou non. De nombreux parlementaires européens ont émis des réserves sur l'application d'un tel accord à l'ancienne colonie espagnole que le Maroc occupe militairement depuis 35 ans. Ils considèrent, en effet, que le territoire sahraoui n'est pas placé sous souveraineté marocaine, du point de vue du droit international, et que l'ancienne colonie espagnole sur laquelle Rabat exerce une «administration de fait» est toujours classée dans le fichier des Nations unies comme territoire non-autonome dont la décolonisation doit être parachevée. L'élargissement au Sahara en question Du point de vue du droit international, tout accord qui s'appliquerait à ce territoire encore colonisé serait donc frappé de nullité. Le Français José Bové a même fait valoir un précédent, en ce sens, lorsqu'en 2004 le Maroc avait dû céder aux conditions de Washington en acceptant d'exclure le Sahara occidental de l'Accord de partenaire privilégié conclu avec les Etats-Unis. C'est cette condition à laquelle pourrait parvenir la Commission juridique du parlement de Strasbourg. La répression marocaine contre les populations sahraouies depuis la prise d'assaut par les forces marocaines, le 8 novembre dernier, du camp de toile de Gdeim Izik, a beaucoup joué dans le réexamen de l'accord d'association liant les «27» au Maroc. Pour la première fois depuis le début de cette vague de répression qui a choqué l'opinion internationale, et laissé de marbre certains gouvernements européens qui ont opté pour la «prudence» pour sauvegarder leurs intérêts économiques et géostratégiques avec le Maroc, l'Union européenne a décidé d'ouvrir un débat sur ce qui s'est passé à Al Ayoune. Elle devait le faire dans les prochains jours mais sous la pression de la France et de l'Espagne, elle a reporté ce débat au 13 décembre prochain. C'est-à-dire à la date à laquelle doit se tenir la réunion du Conseil d'Association UE-Maroc. Madrid et Paris encore et toujours Paris et Madrid ne souhaitaient, visiblement, pas prendre le risque d'une condamnation du Maroc par les «27» à laquelle appellent les eurodéputés et la société civile. Selon la ministre espagnole des Affaires étrangères, Trinidad Jimenez, «l'Union européenne a jugé préférable d'aborder la situation qui prévaut au Sahara occidental au sein de ce conseil» pour permettre «un débat plus ample dans ce cadre en présence du Maroc». Un débat où les «27» écouteront un autre son de cloche. D'ici là, espère-t-on à Madrid et Paris, le climat de tension au Sahara occidental se serait apaisé. A ces arguments juridiques, les eurodéputés font valoir aussi les aspects économiques et sociaux du territoire sahraoui dont les richesses naturelles sont systématiquement pillées par la force d'occupation étrangère et ne profitent en aucun cas aux populations sahraouies. Ces raisons sont à l'origine de l'organisation du camp de toile d'Al Ayoune où s'est exprimé le sentiment indépendantiste sahraoui. Le constat avait déjà été fait tout au long de l'année en cours par les euro-parlementaires, à leur tête les communistes espagnols et les verts catalans, qui ont régulièrement interpellé la Commission européenne sur le caractère illégal de l'accord de pêche UE-Maroc qui doit parvenir à expiration en mars 2011. La colère des agriculteurs européens A l'origine du réexamen de l'accord d'Association UE-Maroc, il y a enfin le souci de sauvegarder les intérêts des agriculteurs européens. Les agriculteurs espagnols surtout qui avaient protesté contre un tel accord, soutenus à bout de bras par leur propre gouvernement, qui ouvrait la voie à la concurrence «déloyale» des produits agricoles marocains. Au sein de cette corporation, on espère que la Commission juridique déclare la nullité de l'Accord UE-Maroc pour qu'il soit renvoyé devant la Commission des agriculteurs.