Les dirigeants des six monarchies du Golfe se se sont réunis lundi à Abou Dhabi en l'absence du roi Abdallah d'Arabie saoudite, hospitalisé aux Etats-Unis, au moment où les révélations de WikiLeaks montrent des relations empreintes de méfiance avec Washington. Embarrassés par les câbles diplomatiques américains diffusés par WikiLeaks, qui ont montré l'ampleur de leurs craintes à l'égard de leur voisin iranien, les responsables du Conseil de coopération du Golfe (CCG) ont passé sous silence ces fuites au premier jour du sommet, dont le coup d'envoi a été donné en début de soirée par le président émirati Khalifa ben Zayed Al-Nahyane. La veille du sommet, qui se tient en l'absence du roi Abdallah et du sultan Qabous d'Oman, de nouveaux câbles américains ont désigné les dons privés en Arabie saoudite comme "la principale source mondiale de financement de groupes terroristes sunnites". Dans ces documents, des diplomates américains accusent des pays du Golfe, Qatar et Koweït en tête, de laxisme dans la lutte contre le financement de ces groupes. "Les pays du CCG sont très consternés par les révélations de WikiLeaks", note l'analyste arabe Abdelwahab Badrkhan, spécialiste des affaires du Golfe. Il se dit "surpris" par celles relatives au financement de l'extrémisme, "Washington ayant loué la coopération de ces pays notamment ces deux dernières années".. Les rapports entre Washington et ses alliés du Golfe vont en pâtir, a averti l'universitaire émirati Abdel Khaleq Abdallah, selon qui ces monarchies "doutent désormais de la capacité de Washington d'assurer la confidentialité" de leurs contacts. "La prudence sera de rigueur" dans les rapports CCG/Washington après les révélations de WikiLeaks "qui, à mon avis, n'auront pas d'impact direct sur leurs relations", a estimé M. Badrkhan. "Les pays du Golfe ont besoin des Etats-Unis, et ces derniers ne peuvent pas se passer de ces pays où ils ont des intérêts pétroliers et stratégiques". Selon les câbles diplomatiques américains, les monarques saoudien et bahreïni ont explicitement réclamé une intervention militaire contre l'Iran, le roi Abdallah d'Arabie saoudite demandant même à Washington de "couper la tête du serpent" pour détruire le programme nucléaire iranien. Les pays du CCG, redoutant l'influence grandissante de leur voisin chiite, ne cachent plus leur frustration d'être écartés des négociations sur le programme nucléaire iranien, qui ont repris lundi à Genève. "Pourquoi le Golfe n'a aucun rôle dans le dialogue avec l'Iran ?", s'est interrogé le ministre émirati des Affaires étrangères, cheikh Abdallah ben Zayed Al-Nahyane. "Toute solution doit venir de la région (...) et le Conseil de coopération du Golfe doit avoir un rôle dans ce dialogue", a-t-il ajouté cette semaine, lors d'un forum sur la sécurité régionale à Manama. L'émir du Koweït, cheikh Sabah al-Ahmed, a prôné "le dialogue" pour un règlement "pacifique" de la crise du nucléaire iranien et appelé Washington notamment à "exercer des pressions sur Israël pour mettre fin à la colonisation" dans les territoires palestiniens. La paix au Proche-Orient "passe par l'établissement d'un Etat palestinien indépendant et viable", a-t-il ajouté en sa qualité de président sortant du CCG. Le sommet doit évoquer la situation au Yémen, menacé par Al-Qaïda, et en Irak, sans gouvernement depuis neuf mois, et faire le point sur le lent processus d'intégration économique du groupe. La désignation du Qatar, pays membre du CCG, pour organiser la Coupe du monde de football de 2002 a été saluée par l'émir du Koweït comme "un acquis" pour tous les Arabes et les musulmans. "C'est un acquis sans précédent", a commenté pour sa part le secrétaire général sortant du CCG, Abderrahman al-Attiya, auquel succède en 2011 le Bahreïni Abdellatif al-Zayani.