Dans le box des accusés, il donnait l'image d'un vieux «pépé» qui attendait son tour dans la salle d'attente d'un médecin ou d'une gare. Personne ne pouvait imaginer que ce vieillard, âgé de 75 ans, était poursuivi pour des faits aussi graves que le viol d'une fillette de cinq ans. Son regard n'était pas fuyant et ses réponses au juge étaient teintées d'une assurance déconcertante. Pourtant, il comparaissait hier en appel devant le tribunal d'Oran pour répondre d'un viol sur enfant, perpétré au mois de mai. L'accusé, rasé de près, portait des vêtements qui ne lui allaient pas. Ils ne sont pas pour son âge, le jean et la redingote pouvaient donner plus d'allant à un jeune Don Juan, tout juste sorti de l'adolescence. H. Houari avait comparu une première fois devant la cour d'Oran qui l'avait condamné à une peine de 8 ans de prison ferme pour le viol de la petite Samira, qui n'était pas présente à l'audience le jour du procès. «Même ses parents, la mort dans l'âme, n'ont pas fait le déplacement», dira un jeune avocat constitué d'office pour la victime. Au mois de mai, l'accusé avait attiré Samira dans un petit bois situé à El Hassi. Il lui avait donné des bonbons et la petite, ne voyant en lui qu'un voisin gentil qui l'adorait, l'avait suivi sans inquiétude. Il lui fera subir les pires sévices avant de la laisser repartir chez elle. De retour à la maison, sa mère qui avait remarqué qu'elle portait des traces de violence avait alerté le père et tous les deux s'en iront déposer plainte au commissariat. La petite a dénoncé son bourreau qui fut arrêté et traduit devant la justice qui le condamnera pour son acte. Hier, il avait arboré devant la cour le costume de la parfaite victime d'un complot. Il avait affirmé que les parents de la petite ont inventé cette histoire pour se venger de lui. «J'ai refusé de leur louer une partie de ma maison et au retour ils m'ont collé cette accusation», dira-t-il au juge. Il s'en tiendra à cette piste, montrant même de l'assurance pour s'attirer la compassion des jurés. Voulant lui faire regretter son geste en lui tenant un discours moralisateur, le juge fut étonné par son attitude. «Mais vous avez bien une femme qui peut satisfaire vos besoins», dira-t-il sur un ton mesuré. «Non, elle est chez ses parents, fâchée depuis cet événement», répondra l'accusé. La plaidoirie de son avocat sera bâtie sur la thèse du complot et de la vengeance. «Mon client avait l'habitude de se montrer gentil avec les enfants du quartier. Ses intentions ont été toujours bonnes. Et si aujourd'hui il comparait devant vous, c'est parce qu'il a été victime d'un complot fomenté par les parents de la petite. Regardez-le, il ne peut pas faire de mal à une mouche. Il a des enfants et des petits- enfants, il n'osera jamais faire un geste déplacé», dira son avocat. Le représentant du parquet s'appuyant sur les aveux de l'accusé et sur le procès-verbal d'audition par le magistrat instructeur a requis à son encontre une peine à la mesure de son acte ignoble. Après délibération et jugeant que l'accusé n'a pas apporté d'éléments nouveaux pour sa défense, la cour le condamnera à purger la peine prononcée à son encontre en première instance, 8 ans de prison ferme, une période qui lui permettra de méditer sur son geste et regretter d'avoir fait du mal à une enfant.