Tizi Ouzou s'est réveillée hier avec la gueule de bois. Les événements des quatre derniers jours et particulièrement ceux de la veille (samedi) ont laissé place à une vive tension qui était perceptible partout, avec plus d'intensité au centre-ville, qui était le théâtre de violents affrontements. La circulation, d'habitude impossible au premier jour de la semaine, était d'une extraordinaire fluidité. De nombreux débris et restes de pneus brûlés jonchent encore les trottoirs et les rues. L'agence Actel, sise au centre-ville et qui a subi d'importants dégâts, est restée fermée, ses employés sont repartis chez eux aussitôt arrivés au même titre que les employés de la Cnep dont la bâtisse a subi d'importants dégâts. Juste en face, l'agence BNA, qui n'a pourtant pas été touchée, est également restée fermée. Les émeutes ont touché la nouvelle ville durant la soirée de samedi : l'agence postale a été saccagée. En ville, on commentait encore les décisions annoncées par le gouvernement dans toutes les places publiques, dans les cafés. Vers 11h30, un attroupement s'est formé au niveau du rond-point. Quelques minutes plus tard, les gens se sont dispersés. Il est à signaler que les moteurs des bus de transport urbain de voyageurs n'ont pas ronflé et que des commerçants en électroménager établis au centre-ville ont évacué leurs produits de nuit de peur d'être ciblés par les casseurs. 13h : reprise des affrontements Vers 13h, les premières barricades ont été dressées au niveau de la rue Abane. Pneus brûlés et tout le décor replanté. Les commerçants baissent rideau en un clin d'œil. Les jets de pierres commencent. Puis les forces antiémeutes se déploient et place à l'affrontement : jets de pierres d'un côté, riposte avec des gaz lacrymogènes de l'autre. En un clin d'œil, la grand-rue est livrée aux deux parties. «Ce n'est pas seulement pour les prix. Nous voulons crier notre ras-le-bol», nous dira Hamid, deux grosses pierres dans les mains. «On est des morts vivants. Qui s'inquiète de notre avenir ?», peste-t-il encore. Les gaz lacrymogènes sont particulièrement irritants. «Ces cartouches ne devaient pas être utilisées au-delà de 2009», nous apprend-on. C'est ce qui explique la grande agressivité des gaz. A Oued Aïssi, la RN12 a été fermée à la circulation et la ville de Tadmaït a vécu une autre nuit chaude et les commerçants ont baissé rideau durant la journée d'hier. A Aïn El Hammam où l'agence BDL a été incendiée, la colère est loin de retomber aussi. Nous avons appris de sources locales que des personnes qui se sont autoproclamées «notables» ont échappé de justesse à un lynchage en essayant de «raisonner» les jeunes en colère. Rassemblement et grève à l'université et certaines écoles désertées Les étudiants de l'université Mouloud Mammeri de Tizi Ouzou ne sont pas en marge de la contestation sociale. Depuis hier, ils sont entrés en grève illimitée en guise non seulement de soutien au mouvement social de ces derniers jours mais aussi pour dénoncer la situation dans laquelle baigne l'université en général, en particulier l'insécurité ambiante qui règne notamment au niveau du nouveau pôle de Tamda. Un important rassemblement a été observé hier matin devant la bibliothèque centrale du campus Hasnaoua. Les différents intervenants ont dénoncé le système LMD et la suspension des examens d'entrée en magister et surtout exigé la prise de mesures de sécurité. Un autre rassemblement se tiendra aujourd'hui au campus Bastos. Quant aux écoles, plusieurs ont été désertées et dans d'autres on a préféré renvoyer les élèves de peur de dépassements. Nous avons même rencontré des parents qui sont allés chercher leurs enfants à 10h.