Tizi Ouzou a replongé dans la violence, hier, après la venue de Bouteflika. Des affrontements parfois violents ont opposé des jeunes se réclamant des archs aux URS. C'est dire que, le scénario tant redouté a fini par se traduire sur le terrain. Ainsi, la rue Abane-Ramdane, le quartier des Genêts et la Cité Cnep squattés par les émeutiers et les URS se sont transformés en véritables champs de bataille. A ce titre, les barricades, les jets de pierres, les cocktails Molotov, les camions chasse-neige, les grenades lacrymogènes et les balles en caoutchouc ont refait surface. Hier, pourtant, rien ne laissait présager une telle tournure aux premières heures de la matinée. En effet, la ville s'est réveillée brutalement en cette journée particulière. Une atmosphère lourde et une vive tension régnait sur une cité littéralement paralysée par la grève générale à laquelle avait appelé la Cadc la veille. Selon des sources, 7000 éléments de la sécurité ont été mobilisés pour permettre au candidat Bouteflika de réussir son meeting. Cela va sans dire que Tizi Ouzou était sous tension en dépit du timide pavoisement qui s'efforçait de donner un air festif pas comme les autres. Vers 9h, les délégués des archs commençaient à affluer vers l'esplanade de l'ancienne mairie pour tenir leur rassemblement. Le rassemblement capote et des pierres fusent de partout sur le siège de la Fédération nationale des fils de chahid, pro-Bouteflika (Fnfc). C'est là qu'interviennent les brigades anti-émeutes pour donner le la aux affrontements. Les manifestants acculés se replient sur l'avenue Abane Ramdane et c'est l'embrasement. Pendant ce temps, le président sortant est accueilli en grande pompe à la Maison de la culture Mouloud-Mammeri. Dans la foulée, la Bmpj procède à la chasse aux manifestants, la confusion est totale. Une dizaine d'interpellations sont opérées dont cinq délégués, parmi eux, Mohamed Nekkah et Mustapha Mazouz, ainsi que deux membres du collectif des femmes du Printemps noir. Les foyers de tension se propagent et le quartier des Genêts est à son tour en feu. La tension monte crescendo et la rue est livrée aux émeutiers et aux URS. Un épais nuage de gaz lacrymogènes entourait le quartier des Genêts. Les manifestants ripostaient par des jets de pierres et de cocktails Molotov. Par à-coup, les policiers étaient dépassés. Dans la foulée, les arrestations se sont multipliées, on dénombre également plusieurs blessés dans les rangs des manifestants. Dans le feu des affrontements une caravane électorale de Djaballah est prise à partie par les manifestants. A la sortie ouest de la ville, sur la route d'Alger, le cortège présidentiel est arrosé de pierres, et obligé de faire un long détour par le village de Boukhalfa pour échapper à l'ire des Tizi Ouzéens. Des rumeurs faisant état de l'évacuation de Bouteflika par hélicoptère à partir de Boukhalfa ont été démenties par des sources proches de son directoire de campagne. En début d'après-midi, la tension baissait d'un cran. Les assauts multipliés par les URS ont fini par gagner à l'usure les manifestants. A 15h, une seule poche de tension était encore localisée aux Genêts. Là, le chassé-croisé continuait inlassablement entre les deux camps. A 16h, le calme commençait à revenir et les gens s'évertuaient enfin à pointer le nez dehors. Toutefois, la ville offrait un visage sinistre et les rues étaient encore jonchées de pierres, de tessons de bouteilles, de douilles de grenades lacrymogènes et d'autres objets hétéroclites. Ainsi, Tizi Ouzou aura vécu une journée extrêmement tendue qui n'est pas sans rappeler les douloureux souvenirs du passé.