L'industrie agroalimentaire algérienne, balbutiante et qui plus est centrée sur la production d'une gamme limitée de produits agro-alimentaires, continue de subir les contrecoups de l'envolée des cours des matières premières sur le marché international. Elle fait également face à une très forte concurrence imposée par les importateurs. Le cas des producteurs de concentré de tomate est édifiant à cet égard. En dépit de la ténacité de quelques industriels qui résistent, tant bien que mal, à la concurrence que leur imposent les importateurs, et à la flambée des cours des matières premières, force est de constater que toutes les filières de l'agro-industrie sombrent dans une crise dont on craint de graves conséquences. Le Conseil supérieur du patronat algérien (CSPA), qui compte dans ses rangs de nombreux producteurs agro-industriels, tire la sonnette d'alarme sur ce qu'il considère comme une véritable menace sur la sécurité alimentaire du pays. En cause : la flambée des cours des matières premières, importées dans leur quasi-totalité, mais aussi la concurrence déloyale que leur livrent les importateurs. Pour les dirigeants de l'organisation patronale, il ne fait aucun doute que l'ouverture du marché national aux productions étrangères a permis de rompre avec les pénuries héritées de la gestion centralisée de l'économie et du monopole de l'Etat sur le commerce extérieur. Mais, avertissent-ils, si des mesures de protection nouvelles s'ajoutant aux décisions courageuses du gouvernement de favoriser l'émergence d'une production nationale forte et compétitive ne sont pas prises rapidement, c'est toute la filière qui risque de s'écrouler. Plus grave, notent-ils, c'est le citoyen qui en payera les conséquences. «Il faut sauver l'industrie agro-alimentaire» Saïd Kahoul, le président du CSPA, estime que les activités du secteur de l'agroalimentaire sont «particulièrement sensibles» de par l'effet direct qu'elles induisent sur les populations en termes de disponibilité, de qualité des produits mis sur le marché et de pouvoir d'achat du citoyen. D'où, selon lui, «l'impérieuse nécessité de l'implication de l'Etat dans la protection de ce secteur, voire son développement continu de façon à asseoir le bases d'une industrie agro-alimentaire intégrée et performante». Le patron du CSPA explique que la situation actuelle n'est pas pour rendre le sourire aux producteurs de la filière, qui subissent de plein fouet les dérèglements nés de la crise financière mondiale, ajoutés aux pratiques déloyales constatées dans la mise en œuvre de la zone de libre-échange arabe (Zale) et l'accord d'association avec l'Union européenne outre l'importation de produits douteux acquis sur les marchés émergents. «Le marché étant libéré, les producteurs algériens continuent toujours d'évoluer dans un environnement complexe et peinent à trouver un juste équilibre lié aussi bien à l'inflation qu'accuse la matière première sur le marché mondial qu'à une concurrence déloyale de produits issus de «l'import-import», ajoute-t-il, souhaitant que soient mis en œuvre des mécanismes de contrôle et de régulation, «d'abord pour que les produits mis sur le marché soient conformes aux critères de qualité, ensuite pour que le citoyen ait les moyens de les acquérir». Produire localement les matières premières A ce propos, indique notre interlocuteur, les mesures fiscales prises par le gouvernement pour plafonner les prix des produits alimentaires devront avoir des effets positifs sur la reprise de l'activité dans le secteur. Mieux, si elles sont suivies d'autres «décisions souveraines», elles permettraient une véritable relance de l'investissement dans l'agro-industrie en général et l'agroalimentaire en particulier. Pour ce faire, dit M. Kahoul, «nos gouvernants sont tenus d'asseoir une politique de mise à niveau encourageant les producteurs nationaux avec, pour objectif à court terme, de réduire la dépendance étrangère pour ce qui est de certaines matières premières». Cette politique implique selon lui «la mise en place par l'Etat d'un plan d'action à moyen terme s'inscrivant dans une vision stratégique du développement économique». Plus précis, le président du CSPA estime que le gouvernement doit avoir comme «préoccupation quasi permanente «l'encouragement de l'investissement dans le domaine de l'agriculture et de l'agro-industrie». L'Etat, d'après ses dires, ne doit avoir aucune hésitation à faciliter la tâche aux investisseurs Algériens et à les encourager à investir dans ce secteur aussi sensible que vital. Concrètement, conclut M. Kahoul, la politique d'encouragement de la filière agroalimentaire doit se traduire par «l'assurance que les matières essentielles comme le sucre, l'huile, la semoule, la farine et les légumes secs soient à la portée de tous les citoyens».