Pris entre ce qui se passe en Tunisie et ses prolongements, les Algériens ont presque oublié qu'un bateau algérien est aux mains des pirates, quelque part au large des côtes somaliennes, avec à son bord 27 membres d'équipage dont 17 compatriotes. L'Algérie a retrouvé son calme après une semaine de folie, voilà qu'on nous promet qu'une folie furieuse nous viendra d'ailleurs. Les Tunisiens retrouvent leurs esprits et les Algériens le prix de l'huile et du sucre. Les Tunisiens ont un nouveau gouvernement qui ressemble trop à l'ancien pour être honnête. Ils ont alors décidé de marcher. Ils ont déclenché des émeutes pour faire partir Ben Ali et seulement des marches BCBG pour dissuader son reliquat de ministres. Normal, la grosse artillerie pour les gros poissons, la petite pour les petits. On ne va tout de même pas sortir tout ce qu'on a dans le ventre pour quelques ministres RCD. D'abord, parce qu'on l'a déjà sorti dans la première phase, plus déterminante, ensuite parce que les ministres, échaudés par ce qui est arrivé à leur ancien patron et sa famille, n'ont pas vraiment besoin que la rue tunisienne sorte les gros moyens pour renoncer à la pige de la transition qu'on leur a proposée. Les Algériens, eux, n'ont rien choisi paraît-il. Quelqu'un avait dit qu'il y avait un problème de sucre, d'huile et de pain et qu'on allait protester pour ça. Et on a protesté. En 1988, quelqu'un d'autre, ça ne peut pas être le même, parce qu'il aurait trop vieilli, a dit qu'on allait avoir besoin d'un peu de démocratie et qu'il fallait une révolte pour ça. Et on l'a faite sa révolte, que d'autres appellent les «événements». On aura remarqué que nos étapes à nous sont drôlement espacées. Mais on a fait comme nos frères. Pour la démocratie, c'était il y a vingt-deux ans et on avait mis le paquet. Les dirigeants de l'époque aussi. Il y a eu des morts, des emprisonnés et des torturés. Cette fois-ci, c'était juste une petite histoire de bouffe. On a fait la petite protesta pour «celui qui a dit» et quelqu'un d'autre nous a remis l'huile et le sucre à leur prix, en promettant aux commerçants de ne pas payer les impôts comme d'habitude, aux grossistes de ne pas payer par chèque comme d'habitude et en «rassurant» les trabendistes qu'il n'y a aucune lutte contre eux comme on le fait de temps en temps. Ce serait aussi intéressant qu'on nous dise si on a des nouvelles du vraquier Blida et si les otages sont en bonne santé. Mais personne n'a rien dit sur la question. Il ne se passe rien quand personne n'a dit. Et c'est énervant. Cet e-mail est protégé contre les robots collecteurs de mails, votre navigateur doit accepter le Javascript pour le voir