Le destin est capable de frapper durement. Et il est capable de taper plus d'une fois. Sinon, comment expliquer que H'nifa avait divorcé très jeune, avec une fillette sur les genoux. Et la fille grandira dans l'ombre de sa maman, car le papa divorcé était rentré chez lui à plus de deux cents bornes à l'ouest du lieu de résidence de H'nifa et sa fille, Sadika. Cette dernière ira à l'université. Elle y rencontre Fayçal, un enseignant en langue étrangère. C'est le coup de foudre. Par bonheur, le futur couple est du même patelin et les deux familles se connaissent très bien. Les deux mamans s'adorent même. Il y eut une très belle fête. Une fête si belle que la belle-mère eut peur pour son fils : «Attention au mauvais œil», avait-elle recommandé au frais marié, qui allait pourtant s'apercevoir au fil des jours que sa dulcinée était une fille à maman. Elle n'entreprenait rien sans consulter H'nifa qui a eu la mauvaise idée de voir en Sadika sa propre image. Erreur, erreur... Et la première erreur de H'nifa avait été d'empêcher sa fille de suivre son époux. Ce dernier un taciturne pourtant sympathique avait déjà une mauvaise image de sa belle-mère mais sa propre mère a fait tout pour qu'il garde la tête froide afin de ne pas demander la... tête de la vieille chipie qui entama une course poursuite derrière le destin afin de garder pour elle sa chère Sadika. - «C'est un mauvais pressentiment. Ton mari a le même caractère que ton c... de père Ammar qui était lui aussi un...» - «...Maman, maman. Arrête de mettre mon père à toutes les sauces. A chacun sa place. Je t'en prie maman...» - «Quoi ? quoi ? Tu me tiens tête ?» rugit H'nifa au bord d'une ire qui ne dit pas son nom. - «Mais non maman, de toutes les façons, tout ira mieux pour tout le monde lorsque nous irons à la capitale, car Fayçal y a trouvé du boulot et un bon poste.» - «Ah ! Voilà la triste réalité. Tu veux partir loin et me laisser seule, moi qui t'ai prise dans mes bras alors que tu n'avais même pas six mois avec mon statut de divorcée. C'est tout ce que je mérite ? N'est-ce pas ? Fayçal est subitement devenu tout pour toi ?» - «Mais non, mais non, maman. Nous t'emmènerons avec nous. Il va être logé dans un trois-pièces. Il y en aura une pour toi. Ne t'en fais pas...» - «Non, non, ma fille. Je m'en fais. S'il a décidé de quitter sa ville natale, c'est pour me balancer de ta vie...», s'entête la belle-mère qui entend la clé tourner à deux reprises dans la serrure. Fayçal vient d'entrer les bras chargés de tout ce dont un foyer nouveau a besoin. Sadika se lève et fait la bise à son chéri. H'nifa vocifère : «Personne ne m'embrasse moi, ni ne me fait la bise !» Et Fayçal de rétorquer : «Moi la seule bise que j'offre est pour ma mère.» H'nifa voit double. Le conflit enfle. Deux mois après, le couple s'installe avec la bombe à retardement : H'nifa allait si mal se conduire que Fayçal contacta maître Bachir Mecheri pour un divorce à l'amiable. Malheureusement, Sadika était enceinte. Une catastrophe, car le pauvre mari demande l'avis de ses meilleurs amis qui lui conseillèrent de laisser tomber : «Un enfant sera mieux que quatre futurs orphelins», lui conseilla Salah, Abdelkader et Larbi, ses meilleurs amis. Mais la maman eut peur : «Elle s'identifie à sa fille et n'est pas près de céder un pouce d'amour de sa protégée. Non, mon fils, allez à la séparation à l'amiable. C'est mieux pour tous», dit la maman. Le divorce sera prononcé deux mois plus tard. Dommage.