Le contrat de travail de Boualem Annad, le pilote qui a commis une infraction en assurant le vol retour Pékin-Alger avec une licence périmée puis prolongée sans passer la visite médicale, a été prolongé de deux années par la direction générale d'Air Algérie. L'information a fait le tour des pilotes de la compagnie nationale et même des retraités qui dénoncent la «politique de deux poids deux mesures» appliquée par la direction générale. Le contrat a été prolongé alors que le pilote en infraction avait affirmé la veille de son départ que le vol «Alger-Pékin» a été son dernier d'où l'accord qu'il avait obtenu par le directeur général de la compagnie après que la direction des opérations eut été saisie par le chef des pilotes pour son remplacement, sans que cela ne soit pris en considération. Le pilote en infraction a été convoqué par cette même direction jeudi. Aucune information n'a filtré sur cette rencontre, vu que les tentatives de joindre M. Aouf, directeur des opérations aériennes, sont restées vaines. De son côté, M. Azzi, directeur-adjoint de l'aviation civile, a nié toute connaissance de cette affaire, rejetant toute la responsabilité sur le directeur de l'aviation civile. «Il faut s'adresser au directeur. C'est lui qui donne les instructions et qui peut répondre aux questions. Moi, je ne suis pas au courant de cette affaire», a-t-il affirmé, sachant que c'est lui qui a signé la prolongation, sans respecter la procédure du passage de la visite médicale. «Il n'en est pas à sa première infraction. Il a été licencié du temps du défunt Benouis pour une faute professionnelle après qu'un vol présidentiel ait atterri à Londres sans qu'il ne soit attendu dans ce pays. Le pilote en question n'a pas préparé son vol et n'a pas prévu les terrains de dégagement sur le plan de vol. Plusieurs crashs ont eu lieu lorsqu'il était responsable. Ça n'en finit pas», affirment des pilotes. On apprend par ailleurs que ce même pilote a décidé de porter l'affaire en justice. Au moment où les pilotes s'attendaient à des décisions sanctionnant ce type d'infraction grave, mettant en péril la vie de milliers de passagers, portant atteinte à l'image de la compagnie, la décision de prolonger son contrat de travail en a choqué plus d'un. «Plus de 10 pilotes ont été mis à la retraite le 31 décembre dernier alors que la réglementation de l'aviation civile internationale (OACI) a prolongé l'âge d'exercice des pilotes à 65 ans à condition que le groupe de pilotage à bord d'un appareil ne cumule pas 120 ans. Les pilotes ont respecté la décision de la direction générale de mettre à la retraite tous les pilotes dont l'âge a atteint 60 ans mais ils «n'admettront jamais un tel comportement considéré comme une marginalisation grave», diront les pilotes. Mercredi soir, certains d'entre eux se sont déplacés à l'aéroport pour se renseigner et demander des explications sur cette décision qu'ils dénoncent fortement. «Nous n'allons pas nous taire. Nous ne comprenons pas les raisons de la prolongation d'un contrat de travail après une infraction aussi grave surtout que ce même pilote aurait dû être mis à la retraite depuis deux ans vu qu'il a 62 ans», dira un pilote, annonçant la préparation d'un mouvement de protestation. La direction a décidé de reprendre tous les pilotes mis à la retraite le 31 décembre 2010 Pour légitimer l'acte de prolongation de contrat et apaiser les esprits des travailleurs, la direction générale d'Air Algérie a décidé de reprendre tous les pilotes mis à la retraite le 31 décembre 2010. Une décision loin de plaire aux pilotes qui pensent déjà aux conséquences de cet acte et dénoncent «le cafouillage inadmissible» qui caractérise la gestion de la compagnie nationale. «Nous allons avoir un surnombre de pilotes, surtout que les jeunes pilotes censés remplacer les partants sont en formation à l'étranger. Un budget énorme a été déboursé pour assurer ce cycle de formation. Résultat : créer des relations conflictuelles entre les pilotes qui se demandent qui aura la priorité de piloter les avions. Le second scénario, c'est de réduire les heures de travail, ce qui n'est pas un acte de bonne gestion», diront nos interlocuteurs. D'autre part, les pilotes se sont révoltés contre la déclaration de Wahid Bouabdellah dans un quotidien arabophone où il les appelle au dialogue. «Cela veut-il dire que nous devons nous taire sur ces infractions et sur l'inconscience qui met la vie des gens en danger portant préjudice aux moyens de l'Etat ? Veut-il faire appel aux pilotes pour éteindre le feu qui finira par brûler tout le monde si les choses continuent d'être gérées de la sorte ?», s'interrogent les pilotes. Ils estiment qu'ils sont les enfants légitimes de cette compagnie qui appartient à l'Etat et à personne d'autre. «Nous restons dans cette compagnie pour la défendre. On n'ira nulle part ailleurs. Ce sont des infractions graves qu'on tente de camoufler par tous les moyens qui portent atteinte à la stabilité de la compagnie et à sa réputation. Les pilotes sont là et ont fait preuve de compétence et de savoir-faire qui les épargnera du chômage, des accidents et des fautes professionnelles», ont-ils affirmé.