Résolument décidés à ne pas courber l'échine, les huit commandants de bord et neuf pilotes de ligne, laissés sur le carreau depuis le « krach » de la compagnie privée Khalifa Airways, n'hésitent pas à frapper à toutes les portes afin de faire valoir leur droit au travail. Après avoir demandé audience au chef du gouvernement, en vain, ces aviateurs délèguent un représentant qui ira aujourd'hui à la rencontre du patron de l'UGTA, Abdelmadjid Sidi Saïd, à la Maison du peuple (Alger). Ce dernier a été déjà destinataire d'une lettre de doléances dans laquelle les contestataires avaient mis l'accent sur le fait que la compagnie aérienne publique, Air Algérie, en situation de monopole depuis la fermeture du ciel algérien aux privés, refuse de les réintégrer. Le motif invoqué par le directeur général de la compagnie est qu'ils (les pilotes) l'ont abandonnée en temps difficile. Cet argumentaire a été battu en brèche par les contestataires en expliquant la situation d'Air Algérie à l'époque de leur départ vers les compagnies privées. « Nous avons quitté Air Algérie à cause de l'impasse de la direction d'alors quant à la satisfaction de nos revendications d'ordre salarial. Notre combat pour l'amélioration de nos revenus, notamment en ce qui concerne la prime liée à la profession, remonte au début des années 1990. A titre illustratif, je vous rappelle les grèves cycliques de 1996 et le bras de fer qui était engagé entre le Syndicat des pilotes de ligne algériens (SPLA) et la direction. Cette grève s'était soldée malheureusement par une vague de licenciements et des condamnations de pilotes grévistes. Certains responsables de la compagnie avaient prétexté que la compagnie ne pouvait pas répondre à nos revendications parce qu'il y avait déjà un surplus de près de 100 pilotes dont il fallait se débarrasser », a souligné un commandant de bord, chômeur depuis 2001. Ces aviateurs, avant leur démission, avaient même suggéré à la direction d'Air Algérie de les détacher dans d'autres compagnies privées, sans obtenir l'écho souhaité. Ainsi, l'insupportable dégradation de leur situation sociale à Air Algérie, a expliqué notre interlocuteur, avait cédé face aux offres alléchantes des compagnies privées. C'était toutefois la règle de la concurrence. Aujourd'hui, ces pilotes et commandants de bord, qui n'ont plus de ressources pour subvenir aux besoins de leurs familles, interpellent les hautes autorités du pays pour prendre en charge leur revendication - celle d'être réintégrés - comme d'autres dans leurs postes au sein de la compagnie publique. « Si nous revendiquons cela, c'est pour la simple raison qu'Air Algérie a besoin de pilotes, car elle a déjà recruté des gens qui ont zéro heure de vol, comme elle a ramené une centaine de pilotes de l'étranger », a indiqué un autre commandant de bord. En plus de la politique de deux poids, deux mesures, ce dernier considère que la compagnie publique emploie des étrangers qui lui reviennent dix fois plus cher que les nationaux. M'hamed-Tayeb Benouis, directeur général de la compagnie, avait jugé en 1999, juste après le départ de ces pilotes, qu'ils ne seront pas réintégrés. Paroles tenues ? Le directeur général se refuse depuis quelque temps à tout commentaire sur cette question qui ne semble pas être de son ressort. A cela s'ajoute le silence étonnant du SPLA. Il faut dire que ces aviateurs laissés en rade se sont adressés à plusieurs institutions concernées de l'Etat, sans résultat. Après avoir essayé de prendre langue avec le directeur général de la compagnie en vain, ils ont adressé, entre autres, des demandes d'audience aux ministres des Transports et du Travail. Aucune suite n'a été donnée à leur requête. Rien. Le silence absolu. Néanmoins, les contestataires espèrent beaucoup de leur audience avec le secrétaire général de l'UGTA pour une éventuelle prise en charge de leur cas.