Les attaques systématiques contre des civils en Libye peuvent être considérées comme des crimes contre l'humanité, a estimé le secrétaire général de l'Alliance atlantique, Anders Fogh Rasmussen. Le colonel Mouammar Kadhafi ne prête aucune attention à ces menaces à peine voilées. De violents bombardements de l'armée libyenne sur la ville de Misrata ont eu lieu, pour lesquels l'ONU a demandé un «accès urgent aux victimes blessées et mourantes» (21 morts dont un enfant). Dans une autre localité côtière de l'Est libyen, à Ben Jaouad, un bilan actualisé hier a précisé qu'au moins sept personnes sont mortes et plus de cinquante ont été blessées dans les combats entre pro et anti-Kadhafi. Plus à l'ouest, selon des chaînes satellitaires arabes, les forces de l'opposition ont attaqué hier celles de Kadhafi à Zintan, une ville à 160 km au sud-ouest de Tripoli. Ils auraient réussi à arrêter dix soldats en plus d'un colonel qui aurait été gravement blessé. Mais l'opposition, peu expérimentée, ne parvient pas à faire des miracles à chaque attaque. Les rebelles ont été contraints de fuir Ben Djaouad sous le feu des forces loyalistes. Après avoir reconquis cette ville, à l'est de Syrte, les forces de Mouammar Kadhafi se dirigeaient hier vers le port pétrolier de Ras Lanouf. La prise de Ras Lanouf a constitué une victoire majeure des insurgés vendredi mais leur progression vers Syrte, ville natale de Kadhafi, a été interrompue par les hommes du colonel. Les opposants craignaient le pire, et c'est justement ce qui est arrivé. Les forces loyales au colonel Mouammar Kadhafi ont lancé une nouvelle attaque aérienne contre le port de Ras Lanouf, dont s'étaient emparés les insurgés. Les rebelles libyens venaient d'annoncer qu'ils tentaient de se regrouper et d'obtenir des armes lourdes pour lutter contre les attaques des fidèles à Mouammar Kadhafi, qui ont recours à des hélicoptères d'attaque, de l'artillerie lourde et des roquettes afin de contrer l'avancée rapide des insurgés sur la capitale Tripoli. Mohamad Samir, un colonel de l'armée qui combat aux côtés des rebelles, a déclaré que ses forces avaient besoin de renforts de l'est après l'attaque des hommes de Kadhafi dimanche. «Les ordres sont de rester ici et de garder la raffinerie parce que le pétrole fait tourner le monde», a déclaré Ali Suleiman, un combattant s'exprimant à un point de contrôle installé près de Ras Lanouf. Mais les opposants à Kadhafi rencontrés aux points de contrôle semblaient moins confiants que par le passé, racontant que des familles avaient fui Ras Lanouf et Ben Djaouad. Au 20e jour de la révolte militaire, la question qui revient le plus souvent est toujours la même : les combattants de la liberté tiendront-ils longtemps face à la puissance de feu de l'armée de Kadhafi ? La nouvelle en provenance de Paris devrait leur permettre de garder le moral. Selon le Quai d'Orsay, la Ligue arabe soutient le projet d'une zone d'exclusion aérienne au-dessus du pays. Un premier signe qui fait dire à l'opposition armée que les choses commencent à bouger sur le front diplomatique. Mais ce n'est qu'un premier pas, la position de la Ligue arabe ne suffirait pas à stopper la «folie meurtrière de Kadhafi». Le chemin demeure long jusqu'à Tripoli et un peu plus jusqu'au Conseil de sécurité. Le Conseil national libyen ne songe qu'au début de cet embargo tant attendu.