Des journalistes des secteurs public et privé, rassemblés par dizaines hier à la maison de la presse Tahar Djaout à Alger, déterminés à «exploiter la conjoncture actuelle marquée par des formes de protestation menées par différentes catégories sociales» ont demandé au gouvernement l'élaboration d'un statut particulier du journaliste, l'activation de la loi sur l'information de 1990 et la création d'un haut conseil de l'information. Ils ont également demandé au gouvernement d'ouvrir un débat officiel sur la réalité de la profession avec une participation forte de journalistes ainsi que la constitution de commissions chargées de prendre en charge les problèmes des journalistes et à leur tête le logement et les augmentations des salaires. Les journalistes ont convenu d'une grève générale le 3 mai qui coïncide avec la journée mondiale de la liberté de la presse pour appuyer leurs revendications. «Nous vous avons beaucoup écouté, aujourd'hui nous parlons, alors écoutez-nous», a été le slogan brandi par les journalistes lors de leur premier sit-in, en attendant la réunion de mardi prochain qui déterminera le lieu et le jour de la première protestation avant la grève générale. «Nous avons écrit sur toutes les catégories sociales, il est temps de nous réhabiliter». Lors de ce sit-in, un communiqué a été distribué aux journalistes dans lequel il est mentionné que «cette initiative est née d'une vision libre qui découle de la réalité sociale et professionnelle vécue par les journalistes algériens depuis des dizaines d'années. Cette initiative est le fruit d'un contexte national caractérisé par le retard injustifié de l'adoption du statut du journaliste professionnel». «Aujourd'hui l'ensemble des journalistes algériens sont embourbés dans une situation sociale de plus en plus dégradée. La précarité que connaît notre métier n'est que l'accumulation d'entraves et de problèmes qui n'ont pu être résolus. La conjoncture qui prévaut actuellement est très appropriée pour gagner en dignité, une conjoncture marquée par des revendications émanant de différents secteurs d'activité», a ajouté le communiqué. Kamel Amarni, secrétaire général du syndicat national des journalistes (SNJ), nous dira que «cela fait 12 ans que nous revendiquons le statut particulier après deux années de négociations, avant qu'il ne soit adopté par le parlement mais sans être doté de textes d'application jusqu'à présent». «Le problème est d'ordre juridique», selon lui, expliquant que «lors de son adoption, le parlement était constitué d'une seule chambre, alors qu'il est composé, aujourd'hui, de deux chambres». Pour ce qui est du «conseil supérieur de l'information, il y a eu deux propositions à ce sujet : il devait être composé de 9 membres, six élus par la corporation et trois par le parlement», lance le secrétaire général du SNJ. «Pour les augmentations de salaires, je dénonce le fait que des journalistes acceptent d'être payés à 3 000 DA par mois sans être déclarés à la sécurité sociale, dira Kamel Amarni. La presse qui, à longueur de colonnes et d'articles, rapporte des cas de licenciements, n'est pas épargnée par des faits pareils. «J'ai en ce moment les dossiers d'un journaliste de l'ENTV et de dix autres du quotidien El Khabar, licenciés, et que nous devons défendre», dira Kamel Amarni. «Il faut d'abord s'organiser» Beaucoup diront, d'autre part, n'avoir pas été informés de la tenue du sit-in d'hier, et ne pas disposer du texte du communiqué distribué aux journalistes présents sur place, estimant «les revendications exprimées imprécises quoique légitimes». «C'est beau de demander un statut particulier ou une quelconque réglementation régissant la profession, mais il faut d'abord nous organiser, apporter des propositions et débattre pour sortir avec du concret», expliquent-ils. Les pouvoirs publics avaient invité les professionnels des médias à s'organiser pour débattre de l'avenir de la profession à travers l'élaboration d'un code de l'information, d'un statut particulier et des critères de délivrance de la carte professionnelle. «La corporation n'est pas composée uniquement par les journalistes, mais également par des agents techniques, imprimeurs, diffuseurs, agences de communication et tous ceux qui appartiennent au métier. Chacun doit s'organiser dans ce cadre avant de passer à autre chose», estiment beaucoup de professionnels, qualifiant le sit-in d'hier de «démarche pas très claire».