Eléments des groupes de légitime défense (GLD) et patriotes se sont rassemblés hier à la place des Martyrs pour exprimer des revendications sociales illustrant «la précarité dans laquelle vivent environ 173 000 personnes, après des sacrifices consentis pour le pays dans le cadre de la lutte antiterroriste». «Nous sommes ici solidaires, éléments des GLD et patriotes, revendiquant des droits légitimes», nous dira Saad Merrouche, un des représentants des éléments GLD. «Nous sommes deux corps distincts mais il n'y a aucune différence entre nous dans cette action de protestation. GLD et patriotes revendiquent des droits légitimes», ajoute-t-il. Les policiers mobilisés sur les lieux pour assurer le maintien de l'ordre se sont contentés d'encadrer la place des Martyrs où aucun dérapage n'a été enregistré d'aucune des parties présentes. Les GLD, qui ont exprimé 7 revendications, dont une plateforme a été déposée au Parlement il y a quelques semaines, avec la réception d'une délégation composée de six éléments des GLD et deux patriotes, expliquent avoir opté pour cette forme de protestation «après l'expiration du délai de 15 jours pour l'étude et la réponse à nos doléances». «Aucune réponse ne nous a été donnée après le sit-in que nous avons tenu ici même, il y a quelques semaines, malgré les promesses qui nous ont été faites au Parlement», diront des éléments des GLD. «Cette fois, nous allons camper ici, jusqu'à la satisfaction de nos revendications», ajoutent-ils. Des patriotes de Aïn Defla et de Bouira sont arrivés en retard mais se sont joints aux contestataires sur place. «D'autres arriveront demain», nous dira-t-on. Des responsables de l'APN demandent à ce qu'une délégation de membres des GLD et patriotes soit désignée pour être reçue. Les éléments des GLD et patriotes présents sur les lieux refusent. «Nous avons été reçus à deux reprises au Parlement, où nous avions remis notre plateforme de revendications sans qu'aucune réponse ne nous soit donnée. Nous refusons donc d'entrer au Parlement. Nous ne voulons pas être reçus par un homme politique mais par un homme de terrain, qui a fait la lutte antiterroriste, c'est lui qui peut ressentir ce que nous endurons», expliquent de nombreux éléments des GLD et patriotes. Les témoignages d'éléments des deux corps présents parmi les contestataires fusent de partout. La misère sociale et les difficultés socioéconomiques endurées par eux sont décrites avec les larmes aux yeux des résistants au terrorisme. 10 000 éléments désarmés depuis le 1er mars 2010 Les éléments des GLD, qui n'ont perçu aucun salaire depuis 1995, dénoncent «le refus» de leur réintégration dans leurs postes de travail, ajoutant «ne pas arriver aujourd'hui à subvenir aux besoins des leurs». Les patriotes, qui diront percevoir une prime mensuelle de 11 000 DA comme salaire, expliquent que pour nombreux parmi eux, «même cette prime nous a été supprimée». «Nous ne sommes pas contre la politique de la réconciliation nationale mais il est injuste que des repentis auteurs d'assassinats soient mieux considérés que nous et mis à l'abri du besoin financier, au moment où nos familles crèvent de faim». «Non seulement ils nous privent de ressources financières mais ils ont également récupéré les armes qu'ils nous avaient remises pour combattre le terrorisme, au nom de l'amélioration de la situation sécuritaire», diront-ils. «10 000 armes ont été récupérées de patriotes et éléments des GLD depuis le 1er mars 2010, alors qu'une partie parmi eux se trouve dans des endroits isolés et est toujours menacée par le terrorisme», selon plusieurs chefs de groupes de patriotes et GLD rencontrés hier sur place. «Pis, les armes ont été récupérées individuellement, et en contrepartie d'aucune décharge», ajoutent-ils. Il est à noter la présence hier à la place des Martyrs de quelques femmes parmi les 400 femmes patriotes du pays. Nombreux parmi les éléments des GLD et patriotes rencontrés hier sur les lieux souffrent de maladies chroniques du fait de la mobilisation et participation à des opérations antiterroristes, de jour comme de nuit, et de blessures enregistrées au cours d'accrochages et affrontements armés avec les terroristes. Certains nous ont montré des traces de balles sur le corps. «Nous n'avons pourtant aucune prise en charge, ni nous ne sommes assurés à la sécurité sociale», dénoncent-ils. «Pis, nous ne disposons d'aucune ressource financière pour acheter les médicaments», ajoutent-ils. Mohamed Debbaghi, patriote, fait partie de ceux-là. «Moi je suis victime de Hassan Hattab dont le groupe a assassiné mon frère à Dergana en 1994. Les terroristes ont assassiné, il y a environ deux mois, mon cousin à Si Mustapha, dans la wilaya de Boumerdès. Si Mustapha est mon père, je suis fils de chahid. Ils ont assassiné d'autres membres de ma famille. Hassan Hattab a aujourd'hui tous les égards, tandis que moi qui a combattu le terrorisme, je suis privé de la moindre ressource financière», nous dira-t-il. «Regardez, j'ai encore une balle dans le corps et je dois acheter un médicament, chaque mois, coûtant 3600 DA», a-t-il dit en nous montrant une blessure au niveau de la jambe gauche. «Mais, malgré cela, vive l'Algérie. J'ai fait ça pour mon pays», lance-t-il. «Je percevais une prime mensuelle de 11 000 DA dont on me prive depuis 1995, malgré cela je continue jusqu'à aujourd'hui à participer à la lutte antiterroriste», ajoute-t-il. D'autres viennent apporter leur témoignage sur un vécu pour le moins difficile. L'un des patriotes nous quitte en nous disant : «Je pars pour tenter de procurer à mes enfants de quoi manger.»