Cinq personnes ont été blessées par balle hier en Syrie dans la ville côtière de Banias, signe que la tension reste forte dans le pays, deux jours après des manifestations qui ont fait 26 morts à Deraa (sud), épicentre de la contestation contre le régime. Cinq personnes ont été touchées par des tirs à l'aube devant une mosquée à Banias, dans le nord-ouest, a indiqué un témoin. Les auteurs des tirs sont «des sbires du régime dont les noms nous sont connus», a affirmé ce témoin selon lequel les communications téléphoniques étaient coupées à Banias. Il a indiqué qu'une «manifestation pacifiste» appelant à la chute du régime avait eu lieu samedi après-midi dans cette ville et que les habitants, craignant des descentes des pro-régime, avaient formé des comités populaires et érigé des barrages pour protéger les quartiers. Des renforts ont été envoyés hier par les autorités syriennes dans la ville côtière de Banias, où des manifestants se rassemblaient pour de nouvelles manifestations contre le régime de Bachar Al Assad, d'après l'opposant Haitham El Maleh. Selon ce dernier, l'armée a installé des barrages routiers aux entrées de la ville, qui n'était plus possible de joindre par téléphone. Ces nouveaux incidents sont intervenus après les violences vendredi à Deraa. Selon un nouveau bilan fourni hier par des ONG syriennes, 26 personnes avaient été tuées dans cette ville rurale à 100 km au sud de Damas lorsque les forces de l'ordre ont tiré sur des milliers de manifestants. Deux autres étaient mortes dans le gouvernorat de Homs (centre-ouest). Samedi, les forces de sécurité ont à nouveau ouvert le feu sur les manifestants qui enterraient leurs morts à Deraa. Le bilan est de deux blessés légers, selon un militant des droits de l'homme. Les ONG ont exprimé «leur inquiétude sur la détermination des autorités syriennes à continuer leurs violations des droits et des libertés essentielles, tels le droit à manifester pacifiquement et la liberté d'opinion et d'expression». Pour sa part, le président Bachar Al Assad, qui ne s'était plus exprimé depuis son discours devant le Parlement le 30 mars, a affirmé hier que «la Syrie avançait sur le chemin des réformes généralisées» et souhaitait profiter des expériences européennes, selon l'agence officielle Sana. Il parlait lors d'un entretien à Damas avec le ministre bulgare des Affaires étrangères. Alors que depuis le début du mouvement de contestation du régime, à la mi-mars, les autorités imputent les coups de feu à des «bandes armées», le quotidien Al Watan, proche du pouvoir, a affirmé hier que le pays venait de basculer dans le «sabotage, les intimidations et les assassinats, et la démolition de la Syrie». «Nous sommes entrés dans une ère (...) qui n'a rien à voir avec les réformes demandées», a estimé le journal dans un éditorial. «Le temps de trancher est venu, et l'Etat syrien, appuyé par le peuple, a commencé à le faire», ajoute-t-il, proposant d'«armer les gardes des institutions gouvernementales et privées», et d'«assurer la protection nécessaire pour arrêter (les saboteurs) ou ouvrir le feu sur ceux qui tentent de saboter les institutions», dit-il. Le ministère de l'Intérieur avait prévenu samedi qu'il allait agir fermement et allait préserver «la sécurité de la patrie». Sur le plan diplomatique, le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon a souligné samedi lors d'une conversation téléphonique avec le président syrien Bachar Al Assad qu'il était «très troublé» par les informations faisant état de manifestants tués et blessés vendredi. Selon un compte-rendu de sa conversation téléphonique, «il a dit que la mort de manifestants pacifiques était inacceptable et devait faire l'objet d'une enquête». «Il a pris note de l'intention du président d'enquêter». M. Ban Ki-moon a demandé la libération des manifestants arrêtés dès que possible et a pris note des réformes annoncées par le président Assad et déclaré qu'il était convaincu qu'il n'y avait pas d'alternative à un dialogue immédiat et inclusif sur des réformes globales.