Le Conseil national transitoire libyen semble décidé à passer la vitesse supérieure dans la campagne médiatique menée, depuis quelques semaines, contre l'Algérie, l'accusant, contre toute logique, de «transporter des mercenaires» pour soutenir le régime de Mouammar Kadhafi. Cette fois, le conseil autoproclamé «unique représentant du peuple libyen» a adressé avant-hier un mémorandum au secrétaire général de la Ligue arabe, Amr Moussa, reprenant ces accusations et ajoutant d'autres, toutes aussi invraisemblables les unes que les autres. Le document révélé par le quotidien londonien Asharq Al Awsat, dans son édition d'hier, demande au secrétaire général de la Ligue arabe de prendre attache avec l'Algérie et de charger une commission d'«enquêter sur quelques infractions commises par l'armée de l'air algérienne et Air Algérie pour le transport de matériel militaire, armes et mercenaires au régime du colonel Mouammar Kadhafi». Il est rapporté, dans le document de trois pages, que l'association des droits de l'homme (libyenne) «a obtenu des documents officiels prouvant que l'armée de l'air algérienne et Air Algérie ont effectué des vols spéciaux au profit du régime de Kadhafi dans sa guerre contre le peuple libyen». «Ce qui constitue une infraction aux lois du transport aérien des traités internationaux de l'organisation internationale de l'aviation civile et l'organisation internationale du transport aérien.» Au-delà des buts recherchés par cet acharnement médiatique et gesticulations pour le moins douteuses, le mémorandum, en lui-même, comporte des contradictions qui en disent long sur sa «crédibilité». D'abord, le document, classé «officiel» prouvant les accusations portées contre l'Algérie, ajoute que les vols en question, au nombre de 15, selon le mémorandum, en veut, cette fois, une autre preuve, celle du fait que «les vols ne portent pas de numéros». Le Conseil national transitoire libyen se repose, cette fois, sur cette «preuve» dont la véracité ne peut, évidemment, pas être prouvée. Le fait que des vols ne portent pas de numéros constitue, rappelle le «représentant» autoproclamé du peuple libyen, «une infraction aux législations internationales». Personne n'a dit le contraire, encore faut-il que ces vols aient eu vraiment lieu.
La volte-face Cette volte-face, c'en est une, rappelle une autre. Il s'agit de la déclaration faite il y a quelques jours par le général Adelfettah Younès, chef de l'armée des «insurgés» libyens, selon laquelle il y aurait un seul ressortissant algérien détenu, accusé de mercenariat, ajoutant qu'il refuse de le montrer aux caméras des chaînes de télévision. Quelques jours auparavant, des «politiques» du conseil national transitoire avaient annoncé la capture de 15 ressortissants algériens et trois autres tués par les insurgés libyens, promettant de les montrer «très bientôt à la télévision». Des contradictions qui ajoutent au caractère obscur des visées de la campagne médiatique acharnée menée contre l'Algérie par le conseil national transitoire basé à Benghazi, ville devenue un nid des services de renseignements de certains pays, mais aussi d'éléments du Groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPC). Cette même organisation terroriste avait, rappelle-t-on, annoncé dans un communiqué diffusé récemment la mort de nombre de ses éléments dans un raid aérien effectué par les alliés qui invoquaient une «erreur», les prenant, selon ce qui a été rapporté, pour des membres des forces restées fidèles à Mouammar Kadhafi. Le communiqué aurait, selon des observateurs avertis, pour seul but de confirmer l'existence d'Al Qaïda, avec toutes les conséquences que cela pourrait engendrer pour la région. Ce qui est reproché à l'Algérie La sagesse dont a fait preuve la diplomatie algérienne, choisissant le principe de non-ingérence dans les affaires internes des pays, comme l'a réaffirmé le président de la République dans son récent discours adressé à la nation, et donc le refus du pays d'entraîner des éléments au sein des insurgés libyens, parmi lesquels pourraient figurer des membres du GSPC explique, en partie, l'acharnement médiatique en cours, selon des observateurs. «On tente de forcer la main à l'Algérie pour prendre position dans le conflit armé», ajoutent-ils. L'Algérie avait, à maintes reprises, rappelle-t-on, par la voix de son ministre des Affaires étrangères et son ministre délégué aux Affaires africaines et maghrébines, démenti toute implication dans le conflit armé qui oppose les fils d'un même peuple, et exprimé son désaccord quant à une intervention militaire étrangère en Libye. La situation actuelle ne pourrait être que favorable à l'instabilité dans la région, et à un de ses facteurs, le GSPC en l'occurrence, qui trouverait dans la circulation d'armes en Libye une aubaine pour se doter en matériel de guerre. L'intervention militaire étrangère ne pourrait qu'offrir un alibi à cette organisation terroriste pour poursuivre ses effets déstabilisateurs dans la région.