La question de l'environnement et la gestion des déchets, qu'ils soient hospitaliers, ménagers, de bâtiment ou autres, n'a peut-être jamais suscité autant d'intérêt dans la wilaya de Tizi Ouzou, où la dégradation du cadre de vie et de l'environnement avec tous les dangers qui pèsent sur les citoyens et la santé publique a atteint un stade alarmant. La question est cruciale, et c'est dans l'optique de trouver des issues à ce quiproquo qu'une journée d'étude a été organisée mercredi dernier par l'Assemblée populaire de wilaya (APW) à l'hémicycle Rabah Aïssat. D'emblée, le président de l'APW, Mahfoudh Bellabas précisera dans son allocution : «Pendant longtemps, nous avons considéré l'environnement comme une ordinaire option politique parmi tant d'autres. Il y a eu une deuxième étape où nous le considérions comme un chapitre nécessaire, voire incontournable dans tout programme politique. Il faut maintenant passer à une troisième étape et considérer l'environnement comme la condition incontournable de toute action politique» et de relever les responsabilités des uns et des autres, avant d'ajouter : «Nous avons vécu et vivons une politique aveugle et sourde vis-à-vis d'un problème très important : la sauvegarde de l'environnement.» Le président de l'APW regrettera le faible niveau de prise en charge d'un chantier aussi important que l'environnement, ce qui «renseigne sur l'absence de volonté politique à appréhender cette thématique avec la mise à disposition des compétences et moyens qu'il requiert.» Pour étayer ses dires, il fera savoir qu'en «2010 l'Etat n'a consacré à l'aménagement du territoire, à l'environnement et au tourisme qu'une enveloppe de 5 784 069,00 DA, alors que celui de la solidarité, réduit à l'entretien des clientèles (…) reçoit 92 935 539,00 DA, soit 16 fois plus que les trois départements sus-cités». Des chiffres alarmants L'intervention du P/APW a été suivie par l'entrée en lice des participants à cette journée dont des élus, des représentants de la Direction de l'environnement, des universitaires et des parlementaires ainsi que des experts français en l'occurrence. Gilles Vanrdernoot, Marc Dutti, Djamel Mathamania et Patrick Pirron qui ont exposé chacun leur expertise et surtout proposé une formule efficace et pas du tout coûteuse pour régler ce problème nuisible et dangereux à plus d'un titre. Selon les chiffres communiqués par la représentante de la Direction l'environnement, les quantités de déchets ménagers produites sont de 300 000t/an pour une population estimé à 1 116 484 habitants, et le nombre de décharges sauvages occupant environ 75 ha s'élève à plus de 1500. Quant aux déchets inertes rejetés par le secteur du bâtiment et des travaux publics, ils s'élèvent à 500 t/j, soit une production annuelle de 197100 t. Les déchets hospitaliers produits par quelque 400 établissements hospitaliers (publics et privés) sont estimés, pour leur part à 2190 t/an. Sur l'ensemble de ces établissements, sept seulement sont dotés d'incinérateurs. Ajouté à cela les 43 000 lots de déchets d'appareils électroniques et électroménagers, les pneus usagés du fait que 30 % du parc automobile ont plus de 16 ans, voire 20 ans, les 255 t/an générés par les 170 stations de lavage et graissage, etc. Il faut noter, par ailleurs, que le directeur du centre hospitalo-universitaire Nédir Mohamed de Tizi Ouzou a indiqué, à la veille de la tenue de cette journée, que 500 t de déchets sont stockées au niveau du CHU et qu'il a été procédé à la délocalisation de l'opération d'incinération de ses déchets d'activité de soins à risques infectieux (DASRI) vers le centre d'enfouissement technique de Oued Falli, les deux incinérateurs, l'un d'une capacité de 200 kg/h et l'autre de 50 kg/h, se trouvant à l'hôpital Belloua ont cessé de fonctionner à cause d'une opposition des habitants de Redjaouna. Pour arriver à une meilleure gestion des déchets hospitaliers, le CHU de Tizi Ouzou sera prochainement doté d'un banaliseur, un appareil qui broie puis décontamine les déchets qui peuvent ensuite être acheminés à la décharge. Vers la réalisation d'une centrale de tri et de compostage Dans leur intervention, les experts français spécialisés dans le domaine du traitement des déchets ont mis en avant deux suggestions. Il s'agit, en premier lieu de la création d'une centrale de tri et de compostage au niveau du chef-lieu de la wilaya qui assurera la collecte, le tri, le compostage en plus du recyclage des déchets valorisables et des unités secondaires à la périphérie de la centrale. En matière d'investissement, la centrale qui s'étalera sur une superficie d'une vingtaine d'hectares traitera une moyenne annuelle de 500 000 t de déchets de différentes natures pour un investissement de 250 millions d'euros tandis que les petites unités, faciles à gérer et pas du tout chères, et dont le prix varie entre 1,9 et 4, 3 millions d'euros pour une capacité de traitement entre 10 000 t et 40 000 t par année. En second lieu, les participants ont retenu l'idée de création d'une entreprise algéro-française de traitement des déchets. Aujourd'hui plus que jamais, et face à l'ampleur de ce défi, tout le monde s'accorde à dire qu'il est plus que nécessaire de définir une politique orientée de la lutte contre la dégradation effrénée de l'environnement. Outre l'implication de l'Etat, cette politique devrait intégrer la formation de la population, des investissements sérieux dans la recherche et l'éducation, etc.