Hier, c'était le jour le plus long. ça devait coïncider pertinemment avec la fin des consultations politiques les plus longues de l'histoire politique du tiers monde et d'Afrique du nord. ça devait aussi coïncider avec la mort de Khadafi, mais les bombardements n'ont pas pu le localiser. ça devait aussi coïncider avec la mort politique de Berlusconi, mais quand ses opposants politiques lui ont demandé une dernière fois de rentrer à la maison, ils ont été incapables de lui préciser laquelle : il en a une vingtaine. Le vingt et un juin est le jour le plus long, ou solstice d'été, selon que l'on aime les tons graves ou poétiques. A Béchar, le jeune vendeur ambulant qui s'est immolé par le feu n'a pas jugé utile d'attendre le jour le plus long pour mourir. Son idole tunisienne Mohamed Bouazizi s'est brûlé en hiver pour annoncer le printemps, mais à Béchar, c'était déjà l'été avant le printemps, tellement il fait chaud. Le jeune de Béchar a patienté des mois, mais il n'a pu patienter quelques jours. Non pas parce qu'il n'en pouvait plus d'attendre le printemps arabe dans un pays où il n'y a pas de printemps tout court, mais d'attendre de mourir de chaleur, d'ennui ou d'une morsure de scorpion alors qu'on peut mourir tranquillement par le feu, avant le solstice d'été de préférence. Le jeune homme est mort, il y a bien eu une émeute dans la foulée de son enterrement. Mais l'émeute n'a pas reçu l'iso «printemps arabe» pour une histoire ridicule de timing. Les règlements sont les réglements. Légèrement plus âgé que Bouazizi, il vendait quand même des fruits et légumes illégalement. Il y avait une intervention de police dans les deux cas où il était aussi question de «délocalisation d'un marché parallèle». Solstice d'été ou non, printemps arabe ou canicule toute l'année, tout cela n'explique rien. ça ne se passe peut-être pas tout à fait comme ça avant le jasmin en Tunisie, mais ici, c'est tout de même terrible ces histoires de marchés parallèles légaux. On laisse les gens «travailler» sous prétexte que «c'est toujours mieux que de voler», puis un jour on leur explique que ce qu'ils sont en train de faire c'est du… vol ! Il n'y a peut-être pas de quoi s'immoler mais on ne s'immole pas pour une seule raison, mais pour ce qu'on a accumulé comme patrimoine «colérique» et surtout pour l'ensemble de l'œuvre de l'Etat. La seule différence est dans le timing. L'histoire d'iso n'est qu'une récompense symbolique, décernée à titre posthume qui plus est. C'est connu, ceux qui déclenchent les printemps ne voient jamais le printemps, même en été. Cet e-mail est protégé contre les robots collecteurs de mails, votre navigateur doit accepter le Javascript pour le voir