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R�flexion
Scenarii de changement dans le monde arabe
Publié dans Le Soir d'Algérie le 30 - 03 - 2011

Les r�volutions pour la d�mocratie dans le monde arabe se suivent et se ressemblent � leur d�but, mais se diff�rencient dans leur d�nouement. Tablant sur les vertus instructives de l�exemple, consid�rons les pays o� l�irr�parable n�est pas encore survenu : Alg�rie, Soudan, monarchies du Golfe� Comme tout le monde, leurs dirigeants ont suivi ce qui s�est pass� et constat� que la r�pression ne servait � rien, sinon � alourdir inutilement la facture. Ont-ils tir� les le�ons de ces �v�nements qui se reproduiront immanquablement chez eux � plus ou moins long terme ? Se sont-ils mis � la recherche de ce qu�il convient de faire pour pr�munir leurs pays contre de tels drames ? D�ploient-ils dans le secret de leurs palais une rare intelligence pour les �viter ?
Ou se contentent- ils de marmonner, un chapelet � la main, �Allah yastar !�, tout en se pr�parant � r��diter chez eux ce qu�ont vainement fait Ben Ali, Moubarak, Kadhafi et Saleh ? Le premier �tait sourd, le second aveugle, le troisi�me hyst�rique et le quatri�me autiste. Eux, pour l�instant, entendent, voient, ont tous leurs esprits et sont en plus ou moins bonne sant�. Ce qu�on a remarqu� jusqu�ici, c�est que les pouvoirs contest�s se comportent comme s�ils �taient condamn�s � passer par le m�me cycle : manifestations, r�pression, discours d�cal� On vient de le voir en Syrie : le cap des cent morts atteint, le r�gime c�de : lev�e de l��tat d�urgence, multipartisme, libert� de la presse, augmentation des salaires� Pourquoi ne pas l�avoir fait avant que le sang ne coule ? En Tunisie et en �gypte, nous avons eu droit, � peu de choses pr�s, au m�me sc�nario. L�existence dans ces pays d�Etats solides et d�arm�es bien organis�es a emp�ch� des d�rapages plus graves et des pertes humaines plus lourdes. Les forces arm�es, contrairement � la police, n�ont pas tir� sur les manifestants et leurs chefs, chose jamais vue, sont descendus dans la rue pour leur parler. Elles ont pris position en faveur du peuple et justifi� le d�ploiement de leurs unit�s par le souci d�assurer sa s�curit�. Elles sont rest�es unies, sous le m�me commandement, et beaucoup pensent qu�elles ont aid� � convaincre les despotes de partir pour �pargner au pays de plus grands malheurs. C�est le bon sens m�me : il est plus facile de faire d�m�nager un homme ou un groupe d�hommes, qu�un peuple r�solu. Il faut dire que les chars n�impressionnaient pas grand monde. On �crivait au spray des slogans sur leurs flancs, on montait dessus pour fraterniser avec l��quipage, et on se couchait dessous pour les emp�cher de se mettre en mouvement. A Benghazi, on a vu des insurg�s jouer dans la rue avec des chars comme avec des auto-tamponneuses dans une foire. Le deuxi�me sc�nario est celui qui a pr�valu au Y�men et en Libye. Dans ce dernier pays o� n�existait pas un Etat structur� et une arm�e classique, on n�a pas vu de d�tachements des forces anti-�meutes, de bombes lacrymog�nes ou de matraques, mais tout de suite les blind�s, les RPG et les bombardements a�riens. Les manifestations ont tr�s vite d�g�n�r� en affrontements arm�s, suivis de d�fections dans l��quipe dirigeante et dans le corps diplomatique. Puis ce fut la guerre, la cr�ation du Conseil national transitoire, la division du pays et finalement l�intervention de l��tranger. Kadhafi n�a pas suivi l�exemple tout frais de Ben Ali et de Moubarak. Il a d� trouver plus h�ro�que celui de Saddam : rester au pouvoir jusqu�au bout, jusqu�� la destruction du pays, jusqu�� sa capture dans un trou, son examen sommaire par un m�decin et enfin sa pendaison. Au Y�men, la r�pression n�avait pas pris de dimension catastrophique avant la journ�e fatidique du vendredi 18 mars o� une soixantaine de manifestants ont �t� abattus d�un coup, provoquant une vague de d�missions de ministres, de hauts grad�s militaires, de diplomates, de d�put�s et de chefs de tribu, encore plus spectaculaire que celle observ�e en Libye. Alors que le pays se d�robait sous ses pieds, que l�Etat perdait ses piliers, que son parti se d�peuplait, Ali Abdallah Saleh r�p�tait mot pour mot les menaces entendues dans la bouche des Kadhafi p�re et fils : le peuple est arm�, la soci�t� est tribale, la guerre civile est in�vitable, le pays sera d�pec� Le despote a tout envisag� et pass� en revue les pires cauchemars, mais l�issue la plus honorable pour lui, la plus pacifique pour son peuple et la moins co�teuse pour tous ne lui a pas travers� l�esprit : s�en aller. Sa proposition de tenir des �lections parlementaires et pr�sidentielle � la fin de l�ann�e, venue trop tard, a �t� repouss�e. Le Y�men est une soci�t� tribale certes, mais c�est l�unit� nationale et la d�mocratie qui ont �t� revendiqu�es et martel�es par les manifestants depuis le d�but. La r�volution n�est pas n�e dans les tribus, elle est apparue sur une place publique. Ce sont elles qui sont venues � la r�volution. Les personnes sont venues � l�id�e et se sont plac�es sous son �gide. Et cette id�e, c�est la d�mocratie, la r�publique, le r�gne des institutions et des libert�s. Les chefs de tribu ont d�fil� � �Sahat Taghyir� pour soutenir les demandes de la jeunesse et afficher leur adh�sion aux id�aux unionistes et d�mocratiques de la r�volution. Ils ont proclam� leur ralliement � des jeunes qui ne poss�daient ni �tat-major ni moyens quelconques. L�adresse du peuple en p�riode de r�volution, c�est la rue. Il si�ge en plein air et dort � la belle �toile ou sous des tentes. C�est l� qu�il re�oit les all�geances et les m�dias. Le despote, lui, occupe toujours un palais de plus en plus d�sert�. En Libye et au Y�men, le pouvoir a encourag� et nourri le syst�me tribal parce qu�il ne concevait pas de meilleur r�le pour lui que celui d�arbitre au-dessus de la m�l�e, de gardien du temple, de garant de la coh�sion et de l�ind�pendance nationales. Or, voici que tribus, chefs de guerre, imams et g�n�raux rejoignent la revendication populaire. La sentence politique que connaissent sans exception les despotes arabes et qu�ils ont prononc�e des milliers de fois dans leurs discours est �diviser pour r�gner�. Ils se sont �vertu�s � instiller dans l�esprit des peuples le sentiment que, sans eux, le pays sombrerait dans l�anarchie et la guerre civile avant d��tre envahi par l��tranger pour piller ses richesses. �a a �t� leur cheval de bataille, leur argument ma�tre, pour emp�cher l�av�nement d�une vie politique d�mocratique. La �non-ing�rence dans les affaires int�rieures � � laquelle ils semblaient si attach�s leur servait en r�alit� � cacher au regard �tranger leurs abus, leurs exc�s, leurs rapines et la transmission du pouvoir � leurs h�ritiers. Ils ont longtemps glos� sur �l�autod�termination des peuples�, mais quand ceux-ci ont voulu s�autod�terminer, recouvrer leur souverainet�, choisir leurs gouvernants, ils n�ont eu pour r�ponse que la r�pression � balles r�elles et les bombardements a�riens. C�est la premi�re fois dans l�histoire des r�volutions que l�on a vu les autorit�s militaires d�un pays se d�tacher du pouvoir pour prendre le parti des manifestants. Dans les quatre pays, l�arm�e s�est rang�e en totalit� (Tunisie, �gypte) ou en grande partie (Libye, Y�men) du c�t� des manifestants, et a reconnu qu�ils incarnaient la l�gitimit� populaire. Elle n�a pas man�uvr� pour confisquer les fruits de leur courage et de leurs sacrifices, et ne s�est pas propos�e comme alternative au despote d�chu. Elle a fusionn� avec les masses dont elle �mane, au service desquelles elle �tait nominalement, mais pas r�ellement. Voil� qu�elle l�est d�sormais, pr�te en Libye et au Y�men � en d�coudre avec le despote et ceux qui lui sont rest�s fid�les. Bient�t, on pourra dire sans rire dans les pays arabes que l�arm�e appartient au peuple, car auparavant c�est l�inverse qui �tait vrai. L�arm�e avait un pays, un drapeau, et exer�ait son autorit� sur les habitants sans tenir compte de leurs aspirations et droits politiques. Les seules victoires reconnues aux arm�es arabes �taient celles remport�es contre leurs peuples. Les coups d�Etat se faisaient au nom de la �r�volution � et se retournaient syst�matiquement contre les peuples en devenant des dictatures. Cette page est en train d��tre tourn�e. Ce qu�on a dit dans les pr�c�dents articles sur les peuples arabes pour expliquer leur m�tamorphose vaut pour les arm�es tunisienne et �gyptienne, et en partie pour les arm�es libyenne et y�m�nite. Elles se sont mentalement renouvel�es avec l�arriv�e � des postes de commandement de g�n�rations qui ont regard�, �cout� et int�gr� ce qui se passait dans le monde. Esp�rons qu�il en sera de m�me en Syrie o� l�arm�e n�a pas tir� depuis quarante ans une seule balle contre Isra�l qui a annex� le Golan et bombarde p�riodiquement ses batteries de missiles ou ses installations nucl�aires civiles. Il va de soi que c�est ce que nous esp�rons aussi pour notre pays le jour o� le peuple se soul�vera, car il se soul�vera pour les raisons que nous avons esquiss�es avant-hier et sur lesquelles nous reviendrons encore demain. Dans cette perspective, les responsables de l�am�nagement du territoire devraient songer � construire rapidement de grandes �places de la Libert� dans les villes de plus de cent mille habitants, en commen�ant par Alger o� la �place du 1er Mai� et la �place des Martyrs� ne peuvent accueillir que quelques centaines de manifestants selon des �valuations pr�cises, et toutes fra�ches, �manant du minist�re de l�Int�rieur. Etant donn� l�urgence, la t�che peut �tre men�e en quelques semaines, mais il ne faut pas qu�on propose aux Alg�rois de manifester � Boughezoul. On ne communie pas que dans les mosqu�es. D�s lors, le faramineux budget r�serv� � la Grande Mosqu�e d�Alger qui n�est plus dans le contexte actuel une priorit� pourrait financer ces projets, et le terrain d�assiette pr�vu pour elle � Mohammadia r�affect� au futur �Maydan Tahrir� de la capitale. Des deux scenarii �voqu�s, lequel est susceptible de se r�aliser chez nous ? Le changement � �moindre frais� qui a eu lieu en Tunisie et en �gypte, ou l�impasse tragique dans laquelle se sont retrouv�s la Libye et le Y�men ? Imaginons ce que pourrait �tre le premier sc�nario : apr�s plusieurs tentatives infructueuses, la �g�n�ration Facebook� alg�rienne r�ussit � mobiliser � travers les principales villes un vaste mouvement de protestation durement r�prim� par les forces de l�ordre. Apr�s plusieurs centaines de morts et l�indignation de l�opinion publique mondiale, les militants et les leaders des organisations de la soci�t� civile et des partis politiques se pr�cipitent � la �place de la Libert� pour apporter leur appui, leur notori�t� et la couverture de leur l�galit� au mouvement de la jeunesse. Celle-ci ne d�sempare pas malgr� les provocations de �baltaguia� des �partis administratifs �,
et continue d�exiger le d�part du pouvoir, la dissolution des partis de l�alliance qui le soutient, le d�mant�lement de la police politique, l��laboration d�une nouvelle Constitution et la mise sur les rails d�une nouvelle Alg�rie. Devant le blocage de la situation, la recrudescence de la violence et le risque d�une condamnation par l�ONU, l��quivalent chez nous du g�n�ral Rachid Ammar se rend � Mohammadia pour assurer de son soutien la jeunesse. Puis c�est l��quivalent du g�n�ral Omar Souleimane qui re�oit une d�l�gation de jeunes en son bureau sous les projecteurs des t�l�visions, et discute avec eux la feuille de route � appliquer pour sortir le pays de la crise. Les demandes sont toutes satisfaites et les choses rentrent progressivement dans l�ordre sous l��gide de la nouvelle R�publique. Deuxi�me scenario : plus d�un million d�Alg�riens campent depuis quinze jours sur la �place de la Libert� � Alger, et quelques centaines de milliers d�autres � Oran, Tizi-Ouzou, Constantine, Annaba, B�char, etc., pour demander le d�part du �syst�me� dans sa totalit�. Le pays est paralys� et les Alg�riens � l��tranger tr�s actifs aupr�s des m�dias, des Etats, des ONG et des institutions internationales. Le pr�sident a d�j� fait un discours pour assurer qu�il n�y aura pas de quatri�me mandat, d�mentir qu�il pr�parait la transmission du pouvoir � son fr�re, et qu�il veillerait � ce que de v�ritables r�formes soient men�es au lieu de celles annonc�es quelques jours plus t�t. Les manifestants ne veulent rien entendre et campent sur leurs exigences. On a d�nombr� 874 morts et 3 964 bless�s dans diverses op�rations de r�pression depuis le d�but, et les cha�nes satellitaires couvrent H24 les �v�nements. L�opinion internationale n�a d�yeux que pour l�Alg�rie et les pr�sidents Sarkozy et Obama ne dorment plus de lire les rapports alarmants sur les islamistes qui sont revenus en force et tentent de circonscrire la jeunesse r�volutionnaire. Des unit�s de la VIe flotte et de l�OTAN ont pris position au large des c�tes et le Conseil de s�curit� de l�ONU �tudie un projet de r�solution. Il n�y a plus de canaux de communication entre le pouvoir et les insurg�s. C�est alors que deux chefs de r�gions militaires et une trentaine d�officiers sup�rieurs entre g�n�raux et colonels de diff�rents corps, n�en pouvant plus de voir leur pays aller � la d�rive, apparaissent sur les �crans d�Al Jazeera pour d�clarer dans un arabe impeccable leur alignement sur les revendications du peuple� Je ne saurai vous dire ce que pourrait �tre la suite. Il y a un troisi�me scenario de changement possible dans les pays o� il ne s�est encore rien pass� : le despote comprend que le temps est au changement. Il pr�f�re pr�c�der les �v�nements et appelle � des �lections l�gislatives et pr�sidentielle � laquelle il pourra concourir s�il veut �tre fix� sur les sentiments du peuple � son �gard. Ceci pour les �r�publiques�. Dans les monarchies, le probl�me se pr�sente autrement. Les revendications portent sur l�instauration d�une monarchie constitutionnelle. Si elles sont jug�es recevables, la contestation cesse et le dialogue commence. Si elles sont rejet�es �globalement et dans le d�tail� comme aiment � dire les gouvernants arabes, l�antagonisme, nourri par la violence et la contre-violence, s�exacerbe et le niveau des revendications s��l�ve : les manifestants exigent d�sormais la transformation de leur pays en R�publique. Au fait, � qui appartient un pays ? A ses habitants ou � ses dirigeants ? Tant que les habitants n�avaient pas pos� la question, tant qu�ils n�en avaient pas r�clam� la propri�t�, les monarques faisaient accroire que c��tait un bien familial transmis par h�ritage, et les pr�sidents � vie un butin arrach� par la force au colonialisme. Maintenant que les peuples ont engag� des proc�dures en r�appropriation, les despotes pourront-ils leur opposer un titre de propri�t� homologu� par la Cour de La Haye ? Car ce qui se passe �voque une querelle d�h�ritage. En �gypte, au Y�men et en Libye, c�est la pr�sidence � vie, suivie de l�intention du despote de transmettre le pouvoir � son fils apr�s un simulacre d��lections, ou sans dans le cas libyen, qui a �t� le facteur d�clencheur de la r�volution. Le co�t de la r�volution a �t� d�environ quatre cents morts en Tunisie pour dix millions d�habitants, et d�un peu plus en �gypte pour une population de quatre-vingt-cinq millions d�habitants. La r�volution �gyptienne a donc co�t� huit fois et demie moins cher qu�en Tunisie. Au Y�men, on n�a pas encore atteint, � l�heure o� j��cris, la centaine de morts pour une population de vingt-cinq millions d�habitants, alors qu�en Libye on a d�pass� les huit mille morts, hors victimes cons�quentes � l�intervention �trang�re. Les prochaines r�volutions devraient co�ter moins cher, mais on ne peut jurer de rien. On va voir comment r�agira dans les prochains jours, semaines ou mois, le march� des valeurs mobili�res r�volutionnaires au Maroc, au Soudan, en Alg�rie, en Jordanie et en Syrie. Dans ce dernier pays, il y a eu cent morts en une seule salve et dans la seule ville de Deraa, puis d�autres les jours suivants. Ce n�est pas une nouveaut�. Al-Assad p�re a tu� d�une seule traite plusieurs milliers de �Fr�res musulmans� dans les ann�es quatre-vingt, et d�truit totalement la ville de Hama. Dans les monarchies du Golfe, hors Bahre�n et Oman o� une demande s�est manifest�e, on ne sait pas s�il existe une demande sur ces actions. Il y a vingt ans, j�ai fortuitement parl� dans une �mission t�l�vis�e de �gh�chi�. Je n�ai pas invent� ce mot, il appartient au lexique alg�rien depuis des si�cles, et tout le monde l�utilise cent fois par jour pour d�signer une foule ou un regroupement de personnes. Beaucoup ont r�agi comme si j�avais cr�� le mot qui est sorti de ma bouche pendant que j�essayais de formuler une id�e tr�s simple : celle de la diff�rence entre une foule et une soci�t� organis�e. Certains ont pr�tendu que je voulais offenser mes compatriotes. Aujourd�hui, tout le monde peut voir clairement ce que je voulais dire. La diff�rence entre les anciennes foules arabes et les nouveaux peuples arabes saute aux yeux. Quelqu�un, voulant m��difier sans doute, m�expliqua un jour que n�importe qui pouvait utiliser cette expression, sauf un homme politique. C�est vrai, si l�on part du principe que la politique c�est l�art de plaire et de duper les gens. Ce n��tait pas ma vocation. Puisque j�en suis aux mises au point, encore un mot.
1) On s�est demand� pourquoi j��cris �en ce moment pr�cis�. R�ponse : parce que c�est maintenant que les r�volutions arabes ont lieu, et parce que l�histoire m�inspire. Quand il y a eu la r�volution iranienne en 1979, je me suis rendu sur les lieux, j�en ai v�cu une des principales phases, et publi� dans la presse un compte rendu presque aussi long que la s�rie que M. Fouad Boughanem, le directeur du Soir d�Alg�rie auquel je renouvelle mes remerciements, a bien voulu accueillir dans ses colonnes. De m�me que je suis parti en Turquie l�ann�e suivante, apr�s le coup d�Etat qui venait de se produire. Si ma �r�apparition� co�ncide avec d�autres faits, pr�sents ou � venir, je n�y suis pour rien. Si mes �crits provoquent des �remous�, il en a chaque fois �t� ainsi quand j��crivais dans les ann�es 1970, 1980 et 1990, et je suis habitu� aux rumeurs qui les ont immanquablement entour�s.
2) On s�est demand� pourquoi je suis rentr� du Liban o� je me serais install�, �en ce moment pr�cis� ? R�ponse : je ne me suis pas install� dans ce pays que j�aime mais que j�ai visit� pour la derni�re fois il y a quatre ans. La PAF peut confirmer. Outre que j�ai le droit, comme n�importe qui de me rendre l� o� il me pla�t et de m��tablir o� je veux, je me suis rendu aussi en Cor�e du Sud, aux Etats-Unis, � Qatar et dans divers pays d�Europe sans que cela ne soit signal� � la nation par un ragot.
3) On s�est demand� pourquoi je suis entr� au gouvernement que je critique aujourd�hui. R�ponse : pour d�fendre les id�es que je d�fends par �crit et la parole depuis 1970. Je les ai d�fendues dans les m�mes termes, avec les images et la franchise employ�es ici, si ce n�est plus, en Conseil de gouvernement, en Conseil des ministres, et devant le pr�sident de la R�publique.
Les amis, comme les adversaires honn�tes, peuvent en t�moigner. MM. Benbitour et Benflis, qui ont retrouv� leur libert� de parole, le peuvent aussi. Que mon entr�e au gouvernement n�ait servi � rien, je suis le premier � en convenir et � le regretter. Notre pays est comme �a.
N. B.
(A Suivre)
(VIII) Au royaume des aveugles�


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