«Zorro est arrivé, sans se presser, le grand Zorro, le beau Zorro, avec son cheval et son grand chapeau». Le regretté Henri Salvador ne croyait pas si bien dire lorsqu'il fredonnait les paroles de cette chanson relatant les exploits de l'homme au masque et à la cape. Dès que le danger se précisait, Zorro arrivait et réglait tout en un tour de main. Voilà que le football algérien où rien ne va plus avec son équipe nationale fait appel à son Zorro, celui qui va faire de cette équipe nationale une grande sélection capable de battre n'importe qui, elle qui, jusqu'ici, pouvait s'incliner devant le dernier de la classe. Ce Zorro-là est un Bosniaque d'origine et a pour lui d'avoir été un très bon buteur du temps où il était joueur. Il est, aujourd'hui, entraîneur et a une bonne expérience en ce domaine. Vahid Halilhodzic arrive mais sa venue est différemment appréciée. Tous les titres de la presse nationale y sont allés de leurs questions à des acteurs, anciens ou actuels, du football algérien au sujet de ce recrutement. Nombreux ont été ceux qui ont fait savoir qu'il aurait été préférable que la FAF choisisse quelqu'un de chez nous alors que d'autres expliquent que le Bosniaque, par ses compétences et sa manière de diriger, va remettre l'équipe d'Algérie sur la voie des succès. Nous retiendrons, pour notre part, que Halilhodzic s'il a obtenu quelques bons résultats en clubs a échoué en équipe nationale. D'aucuns diront que c'est faux puisqu'il a mené les Eléphants de Côte d'Ivoire à la CAN et à la Coupe du monde de 2010. C'est exact mais il est bon de préciser que Halilhodzic a bénéficié de la plus forte équipe ivoirienne de l'histoire, une équipe constellée d'étoiles, des joueurs dont certains émargent dans les plus grands clubs du monde. Pour quel résultat ? Un double échec, les Ivoiriens ne passant pas le premier tour en Coupe du monde et se faisant éliminer en quart de finale de la CAN par les Algériens. En 1992, un Ivoirien du nom de Martial Yeo avait mené les Eléphants à la victoire finale de la CAN et lui entraînait une équipe où les stars étaient rares. Comme quoi il ne faut vraiment pas se précipiter pour faire de quelqu'un celui qui va tout sauver. Attendons pour voir et jugeons une fois les résultats sur le terrain connus. Saâdane n'a pas été compris Rabah Saâdane lui a été jugé et en mal. On avait seulement oublié que ce gars là avait été nommé sélectionneur national au moment où les Verts venaient de rater le wagon de la CAN 2008. On l'avait appelé pour prendre une équipe au creux de la vague dont on n'attendait presque rien. On lui avait demandé, voire supplié, de tout faire pour permettre à cette sélection de retrouver une phase finale de CAN et lui n'avait rien promis expliquant que notre football était tombé si bas qu'il faudrait une révolution et un grand chambardement pour qu'il se remette à être rentable en terme d'équipe nationale. Il n'empêche que Rabah Saâdane avait fait avec ce qu'il avait sous la main c'est-à-dire pas grand-chose, le produit algérien n'étant vraiment pas de qualité aussi bien au niveau local qu'à l'étranger. Il avait fait confiance à des joueurs sans talent exceptionnel, comparés aux grands d'Afrique qui jouent dans quelques uns des plus grands clubs de la planète. Avec ces joueurs il avait réussi à monter un groupe compétitif à qui il avait su insuffler le goût de se battre et l'envie d'aller de l'avant. Il ne lui était demandé qu'une qualification à la CAN de 2010. Pas question de parler de la Coupe du monde dont on disait que c'était un Everest pour les apprentis alpinistes qu'étaient les footballeurs algériens. Mais ce Saâdane là avait poursuivi son œuvre jusqu'à dépasser l'objectif de la CAN. La Coupe du monde était là qui tendait ses bras à un onze algérien sorti d'on ne sait où. Et il s'y était jeté comme un gamin le ferait dans les bras de sa tendre maman. Il l'avait fait grâce à Saâdane et au mental de joueurs qui ne partaient plus avec l'esprit de perdants d'avance. Dénier ce mérite à Saâdane c'est faire preuve de très mauvaise foi. C'est oublier où était cette équipe quand l'intéressé l'avait prise en novembre 2007. Mais on a poussé le bouchon un peu trop loin. Sans le dire ouvertement on a pensé : «ya Si Saâdane, du moment que notre équipe nationale est à la CAN et en Coupe du monde, il faut la mener vers la victoire finale». Rien que cela. Oui, pourquoi pas la CAN et la Coupe du monde pour un football qui dispose d'un championnat national à dormir debout dont les joueurs sont incapables de vous faire une passe correctement sur dix mètres et qui n'ont aucune culture tactique ? Cela personne ne s'en offusque. Non, qu'importe si notre football ne produit plus talent, l'essentiel est de se focaliser sur cette équipe nationale formée d'éléments qui ne doivent rien au système de formation de notre football. Cela personne ne le retient. Ce n'est pas important alors que le drame du football algérien y est résumé. Et ces joueurs ne sont pas si enthousiasmants que cela. La preuve, aucun d'eux n'est signataire dans un grand club européen, du moins ceux qui font partie du top dix de ce continent. Pourtant Saâdane en a fait des combattants et des compétiteurs. Mais quand l'étoile de cette équipe nationale s'est mise à décliner on s'en est pris à ce Saâdane accusé d'être un incompétent, quelqu'un qui ne sait pas mener les hommes, ni de diriger une équipe. Pourtant, il avait eu la délicatesse, même au summum de sa gloire quand tous les clignotants étaient au vert pour le onze national, de déclarer que cela risquait de n'être qu'éphémère, que notre football avait encore énormément de travail à accomplir et que l'équipe d'Egypte était supérieure à la nôtre parce que plus collective et plus aguerrie. Le populisme de la FAF Non on a préféré dire «ouste» au sélectionneur national pour supplier Benchikha de prendre la relève. Oui Benchikha qu'on avait porté aux nues, le qualifiant de général. Et ce Benchika là a été rabaissé au statut d'homme de troupe quand les Verts ont failli face à l'équipe du Maroc. Aujourd'hui on nous donne du «coach Vahid» pour un entraîneur qui s'engage dans un drôle de pari, celui de redonner un semblant de vie à une sélection en pleine déconfiture. On s'inquiète de son staff et de sa composition. On parle Coupe du monde de 2014 et de CAN de 2013. On se met à rêver et à imaginer toute sorte de fééries pour l'équipe nationale et on tire un trait sur tout ce qui est négatif dans notre football. Oublié tout ce qui s'y passe avec ces clubs dont la majorité font du n'importe quoi, dirigés qu'ils sont par des personnes mues par leur propre intérêt. Négligée la vérité que ce football ne forme plus de talent. Omis le fait que parce qu'ils n'ont pas de culture tactique, nos joueurs locaux sont obligés, en catégorie senior, de faire, en entraînement, des séances de placement sur le terrain c'est-à-dire des exercices qu'on apprend en école de football. Oui, il est là l'essentiel, ce dont vers lequel on doit se tourner plutôt qu'une équipe nationale dont on sait qu'elle ne pourra être forte que sil elle dispose de joueurs forts et d'un football fort. Pas forcément d'un grand entraîneur dût-il s'appeler Halilhodzic, Lippi, Capello, Guardiola ou Mourinho. Jusqu'à quand va-t-on subir les contraintes de cette équipe nationale qu'on veut monter et la rendre compétitive alors qu'elle repose sur du vent ? Cela fait des années que le constat est fait que tout doit être revu dans notre football, qu'il faut le révolutionner et mettre les clubs au travail mais on reste figé sur l'équipe nationale et on en arrive à tout négliger. Vous en voulez une preuve ? La voici. Le professionnalisme a été lancé cette année mais à ce jour en dehors de deux équipes, l'USM Alger et la JSM Béjaïa, aucun club n'a daigné ouvrir son capital par la faute de dirigeants qui ne veulent pas lâcher d'une once leurs privilèges. La Fédération trop occupée avec l'équipe nationale a laissé faire, d'où l'impression que le professionnalisme a du mal à s'implanter dans notre football. Cette Fédération se sent obligée d'agir de la sorte parce qu'elle sait qu'elle sera jugée sur les résultats de cette équipe nationale et non sur ce qu'elle fait pour changer le football. Alors on laisse aller, on fait comme avant et qu'importe si ce football se mette ou non au travail. Voilà pourquoi on ramène Halilhodzic. Juste pour faire bien. Juste pour essayer de donner du tonus à l'équipe nationale. Et puis ensuite ? A supposer que cette équipe nationale se remette à gagner est ce que cela va changer l'image de notre football et de son pauvre championnat local ? Autant dire que les Verts vont peut-être se remettre à gagner mais d'une manière éphémère juste le temps que les gens fassent la fête. Après cela, au moindre accroc, «coach Vahid» risque de devenir «cloche Vahid» et sera prié d'aller voir ailleurs jusqu'au prochain sélectionneur qu'on encensera avant tout résultat. Et la roue accomplira un nouveau tour.