La maison du peuple a été envahie hier par une marée humaine. La vaste cour du siège de la centrale syndicale s'est avérée trop exiguë pour contenir le nombre important de retraités du centre du pays qui se sont rassemblés dès les premières heures de la matinée pour revendiquer une réponse claire de la part de la Centrale syndicale concernant la revalorisation de leurs pensions. Une fois sur place, les retraités en colère ont décidé de marcher jusqu'au siège de la présidence de la République, mais ils en ont été empêchés par un imposant cordon de sécurité déployé à l'entrée de la maison du peuple. Les agents de police ont bloqué le portail du siège de l'UGTA, empêchant ainsi les retraités d'envahir la rue. Ces derniers ont dénoncé cette pratique, estimant qu'ils ont le droit de faire porter leurs revendications à qui de droit. «Certains retraités ont été empêchés de rejoindre Alger. On les a fait descendre des bus pour qu'ils ne viennent pas renforcer le mouvement. Les policiers nous ont tabassés avec force et nous ont empêchés de sortir. Ils n'ont même pas eu de respect pour nous, âgés et malades. Nous sommes venus pour demander des droits et défendre notre dignité déjà assez bafouée comme ça», affirment certains. Après un dur quart d'heure de heurts avec les forces de l'ordre, les retraités se sont rassemblés au niveau du hall du siège pour exprimer leur colère et leur indignation. Pour eux, seule une décision souveraine du président de la République peut apporter une solution à leurs problèmes après qu'ils aient été déçus par la Centrale syndicale qui a failli à ses engagements. «Nous interpellons le président de la République pour qu'ils interviennent pour nous rendre justice, réhabiliter notre dignité et nous sauver de la situation de la misère noire dans laquelle nous vivons en raison des maigres pensions que nous percevons», ont-ils mentionné dans une déclaration lue pendant le rassemblement. Une augmentation de 80% exigée Tout en critiquant la maigre revalorisation de 10% décidée en leur faveur en mars dernier, les retraités exigent «une augmentation de 80% de leur pension, la hausse de la prime de la femme au foyer à 6000 DA, la fixation d'une hausse de 30% pour les retraités sortis entre 1984 et 2005, la suppression du contrôle médicale pour les retraités âgés de plus de 65 ans et leurs épouses et la révision de la politique de payement des médicaments au profit de cette catégorie». Les retraités ont dénoncé l'injustice pratiquée à leur égard par le gouvernement, «lequel a procédé à l'augmentation des salaires de tous les travailleurs et a marginalisé les retraités». Ils placent leur seul et dernier espoir en la personne du chef de l'Etat qui «peut prendre une décision souveraine de revalorisation de nos pensions. La caisse de retraite n'est pas déficitaire et peut encore couvrir le payement des pensions», estiment-ils. Les retraités n'ont pas manqué de soulever l'absence d'un représentant crédible après avoir perdu confiance en la Fédération nationale des retraités affiliée à l'UGTA. «Nous avons organisé ce mouvement entre nous. Nous revendiquons un syndicat autonome non affilié à la Centrale syndicale pour nous représenter d'une façon meilleure, et surtout préserver notre dignité», ont-ils indiqué. Hausse de 40% dès novembre, selon Sidi Saïd L'arrivée de Sidi Saïd, SG de la Centrale syndicale, n'a pas été un grand événement pour les retraités. Sa sortie à l'extérieur du siège a été faite après plusieurs tentatives pour convaincre les retraités de rentrer dans la salle de réunion pour discuter de leurs revendications. Les retraités ont été divisés, et une bonne partie a préféré rester dehors. «Sidi Saïd nous a trahis. Il a pris l'engagement de prendre notre dossier en charge et de le défendre comme s'il défendait sa propre cause ; finalement, il est sorti souriant de la tripartite où il n'a rien fait. Il s'est moqué de nous. On n'a plus rien à se dire», nous ont dit des contestataires déçus. Le SG de l'UGTA a eu du mal à calmer les retraités pour placer un mot. «Que vous ai-je fait pour mériter ça ? Je ne suis pas venu pour vous faire des promesses. Laissez-moi parler», a-t-il répété dans la salle pour imposer le silence. «Je suis à votre service à condition que vous me respectiez ; il y a une relation de confiance entre nous. Vous avez raison d'être en colère», a-t-il poursuivi. «Je ne suis pas à votre service», a-t-il lâché, en colère, après avoir perdu espoir de se faire entendre. Sidi Saïd a fini par réussir à placer une brève déclaration. «Le PV de vos revendications est chez moi. Vous aurez une augmentation des pensions de 40% qui vous sera versée en novembre. On attend juste la tenue du conseil des ministres pour valider la décision. C'est mon engagement pour vous. Soyez juste patients et ne me perturbez pas trop», leur a-t-il dit. Les retraités ont sollicité le SG de l'UGTA pour plus de précisions et d'explications sur cette mesure. Mais il n'a donné aucun détail et ils sont ressortis déçus, promettant de patienter jusqu'à fin novembre avant de durcir leur contestation. «Nous sommes deux millions de retraités. Nous allons envahir la rue puis boycotter les élections législatives nous et nos épouses si nos revendications restent lettre morte», ont-ils promis.