Il a un peu plu dans le centre du pays, il a plu un peu plus à l'est comme toujours, c'est toujours l'été à l'ouest où on est encore tenté par la plage, ignorant que la sécheresse, c'est fait pour s'inquiéter, pas se baigner et bronzer. Mais la pluie aussi, c'est fait pour angoisser, même - ou surtout - dans un pays où il n'en tombe pas beaucoup, comme l'Algérie. Pendant qu'il pleut un peu dans le centre, qu'il pleut un peu plus à l'est et qu'on regarde avidement les plages d'Aïn Témouchent, se tient à Béni Maouche, pas loin de Béjaïa, la fête de la figue. Béjaïa ne sait pas encore vraiment si elle est située à l'est ou au centre, mais elle sait qu'elle n'est pas l'ouest, puisque ça fait déjà un bon bout de temps que personne ne lorgne vers les plages avec un autre regard que celui de l'ennui ou du désespoir. C'est connu, les figues se gâtent par le soleil ou par la pluie et elles sont plutôt bien servies. Des étés précoces qui accélèrent la maturation jusqu'au désastre, puis des pluies inattendues qui gâtent le reste. Ce n'est pas la seule raison qui fait que notre production de figues soit si indigente alors qu'on n'arrête pas de nous rabâcher que nous avons les meilleures conditions climatiques pour être leaders en la matière. Elle est quand même bien paradoxale, cette pluie. Déjà qu'à l'échelle du monde, elle fait plus de dégâts, parfois des drames, chez ceux qui en ont le plus besoin. C'est aussi valable à l'échelle d'un pays comme l'Algérie. C'est là où on guette le plus les cumulus que ça fait le plus mal quand ça tombe. Y compris dans la capitale. Il n'y a pas de céréales à irriguer, il n'y a pas d'arbres fruitiers à protéger et il n'y a pas de bétail à faire boire, mais tout le monde attend la pluie pour «dépoussiérer la situation». Mais quand elle vient, ce sont les maisons des plus vulnérables qu'elle prend, si ce n'est les plus vulnérables eux-mêmes. Les autres vont fulminer dans d'impossibles embouteillages, insulter les maires incapables de nettoyer à temps les voies d'évacuation et rappeler encore que les couvertures destinées aux victimes des inondations se retrouvent au marché de Oued Kniss. Puis ils oublieront. Comme oublient les maires de nettoyer, comme oublient les ministres de bien construire les immeubles et les routes, de réhabiliter le vieux bâti et de faire… leur métier de ministres pour que, si on n'a pas la pluie, on puisse en souhaiter et l'attendre tranquillement. Cet e-mail est protégé contre les robots collecteurs de mails, votre navigateur doit accepter le Javascript pour le voir