Pour fêter le cinquantenaire du cessez-le-feu, le 19 mars 1962, une caravane de sauvegarde de la mémoire, composée de moudjahidine, de bénévoles et d'associations, sillonne les six wilayas de la guerre de libération : Wilaya I : Aurès, Wilaya II : nord-constantinois, Wilaya III : Kabylie, wilaya IV : le Centre, Wilaya V : Oran et Wilaya VI : le Sud. Les festivités ont été initiées pas le ministère de la Jeunesse et des Sports, qui s'est chargé de la logistique, et l'association Machaal El Chahid, qui s'est occupée de la partie historique. C'est à l'université Yahia-Farès de Médéa qu'une partie de la délégation a pris part aux hommages rendus, jeudi, au moudjahidine Lakhdar Boulagraa et Ahmed Mahsas, connu sous le nom de moudjahid Ali Mahsas. Une conférence retraçant certains évènements liés à la Wilaya IV a été animée par des historiques de la révolution dont des acteurs eux-mêmes de la Révolution. C'est dans l'ancien théâtre de la ville, transformé entre temps en salles des actes de l'université, qu'une assistance nombreuse est venue écouter Bouragâa et Ali Mahsas. C'est d'abord le valeureux colonel Bouragâa, plein de verve et de ferveur malgré le poids des ans, qui a rappelé l'engagement des moudjahidine sous son commandement. A la tête de la Wilaya IV, le héros se souvient, comme si c'était hier, de ces années de combat. Il a tenu à rappeler la responsabilité qui était la sienne sur un territoire qui s'étendait de l'actuel Zemmouri jusqu'à Tissemsilt, à l'Ouest. L'organisation de la Révolution était chaotique au début du déclenchement de la guerre et ce n'est qu'à partir des décisions du Congrès de la Soummam qu'une véritable stratégie s'est déployée pour devenir le cauchemar des forces de l'occupation jusqu'au cessez-le-feu. Les opérations menées par les djounoud donna du fil à retordre aux forces de l'armée française malgré les opérations de grandes envergures lancées par Challe depuis l'avènement du général de Gaulle, et avec peu de moyens, c'est-à-dire deux mortier de 82 et de 45, 454 mitraillettes et 80 kg d'explosif pour la Wilaya IV. Cependant, le courage chevillé au corps, les moudjahidine ont réussi à arracher la liberté de leur pays et celle de leur peuple. Loin des frontières, les Wilayas IV et III étaient les plus mal loties mais, paradoxalement, elles ont concentré autour d'elles le plus gros des troupes répressives. Le message de Mahsas aux jeunes Récit poignant que celui du combattant lorsqu'il rappelle les souffrances endurées dans le maquis. La faim, la soif et être sur le qui-vive constamment, malgré cela, il fallait harceler un ennemi représentant l'une des premières puissances militaires mondiales. Le 19 mars 1962 fut accueilli avec un sentiment mitigé de joie et de tristesse au sein de la famille des moudjahidine. La joie était liée à la fin des combats qui devaient mettre un terme au malheur et la tristesse associée aux pertes immenses dans les rangs du peuple qui pensait aux frères et aux sœurs tombés au champ d'honneur pour que vive l'Algérie. C'est donc la gorge nouée par le souvenir que Bouragâa a appelé les Algériens à préserver la mémoire de la guerre d'indépendance en faisant que ces rencontres s'inscrivent dans la durée. Quant à Ali Mahsas, un des grands dirigeants de la guerre de Libération en Algérie et grand défenseur de la cause nationale à l'étranger, invité pour être honoré lors de ces festivités, et qui était accompagné de son épouse, a tenu à faire un discours nonobstant son âge avancé et sa fatigue. Son message était destiné à la jeune génération qui n'a pas vécu la colonisation. Il demanda d'ailleurs aux jeunes d'essayer de connaître l'histoire de la Révolution pour ne pas être influencés par des thèses révisionnistes. «Sortie effectivement de la nuit coloniale, l'Algérie a arraché son indépendance et libre à une certaine droite française de continuer à le nier. L'enjeu, aujourd'hui, est plutôt de regarder vers l'avenir à partir du passé», a déclaré le grand révolutionnaire. Après cette remémoration replongeant les aînés dans un passé douloureux mais plein d'espoir et qui fit découvrir aux plus jeunes des facettes de la lutte armée et à l'issue de ce bref retour sur des moments forts de la guerre de libération, le président de l'association Machaal El Chahid a remis respectivement aux moudjahidine Lakhdar Bouragâa et Ali Mahsas une médaille d'honneur et un burnous traditionnel ainsi qu'à l'épouse d'Ali Mahsas.