Le discours tenu par les Pieds-noirs sur leur rapatriement au lendemain de l'indépendance de l'Algérie est "réducteur, éloigné de la vérité et ignore la souffrance vécue par le peuple algérien", a relevé jeudi soir à Alger, le journaliste français, Pierre Daum. Selon cet homme de presse, auteur du livre "Ni valise ni cercueil, Les Pieds-noirs restés en Algérie après l'indépendance" paru récemment, l'épisode du rapatriement des Pieds-noirs a été "instrumentalisé en France depuis cinquante années et ne dit pas un mot de ce qu'a subi le peuple algérien". S'exprimant lors d'une conférence au Centre d'études diocésain d'Alger, consacrée à son nouveau livre préfacé par l'historien Benjamin Stora et paru chez Actes Sud, en France, et Média Plus, en Algérie, l'orateur a rappelé que le rapatriement des Pieds-noirs était un sujet toujours abordé avec "un regard fermé sans désir de recul ni objectivité". Il a tenu à préciser que le fait qu'il y ait eu des Pieds-noirs restés en Algérie après l'indépendance a toujours été ignoré en France car l'idée dominante était liée au mot d'ordre "La valise ou le cercueil" qui signifiait, a-t-il rappelé, que tous les Pieds-noirs devaient quitter l'Algérie parce qu'ils n'avaient pas d'autre choix face à la menace de mort. Pour lui, les témoignages des personnes rapatriées en France sur la période allant de l'annonce du cessez-le-feu en mars 1962 jusqu'à l'automne de la même année, ne sont alimentés que par des évènements tragiques, à savoir "massacres", "assassinats", "fusillades", "enlèvements", et "menaces d'extermination", tous attribués au peuple algérien, en occultant, a-t-il dit, la "terreur" que semait l'Organisation armée secrète (Oas), qu'il a qualifiée d' "organisation d'assassins". A propos du nombre des Pieds-noirs restés en Algérie qui serait, selon des archives qu'il a consultées, de 200.000 personnes, ce journaliste a fait savoir que ce chiffre était ignoré en France au moment où tout est focalisé sur les 4.100 Pieds-noirs morts entre la période 1954-1962, "considérés comme des victimes innocentes par définition", a-t-il déploré car "aucune précision sur la proportion de leur participation aux meurtres commis par l'Oas n'est apportée". Journaliste au "Monde" puis à "Libération", Pierre Daum collabore actuellement comme grand reporter au "Monde diplomatique" et à quelques autres journaux. Il se trouve en Algérie pour la présentation de son nouveau livre.