Oran s'est réveillée écrasée par un soleil qui incitait à sortir en bord de mer ou à la montagne. «C'est une journée qui doit être vécue ailleurs, pas dans le centre-ville», affirme Houari, un jeune Oranais qui s'apprêtait à vivre ses deuxièmes législatives. Aux premières heures, les journalistes avaient précédé les électeurs au niveau des centres de vote de Cuvillier et de Tripoli où devait être donné le coup d'envoi du vote. «Nous guettons l'arrivée du wali et des observateurs étrangers qui ont prévu de faire leur première sortie à Tripoli», affirme un confrère. Sitôt les officiels arrivés, les bureaux sont ouverts aux citoyens. «Ne vous fiez pas à l'affluence modeste, Oran est habituée à ne voter que le soir aux dernières heures d'ouverture des bureaux. En 1990, les Oranais s'étaient prélassés en mer et le soir à leur retour, la ville, connue pour son ouverture d'esprit, est tombée dans les mains du FIS-dissous. Il faudra attendre l'après-midi pour voir les gens affluer», dira le responsable d'un bureau du centre de Tripoli. Oran, qui compte 1 104 732 électeurs répartis en 262 centres et 2131 bureaux de vote, a pris comme référence les législatives de 2007. Aussi bien les responsables de la wilaya que ceux des listes et des partis engagés dans ce rendez-vous en parlent avec le défi de faire mieux que la dernière législature. «On prend les chiffres de l'année 2007 comme référence, la population a évolué et le volume du corps électoral aussi», dira le Drag lors d'un point de presse au centre de presse installé à la wilaya. Aux premières heures du vote, les bureaux étaient quasiment vides. Sur les hauteurs du centre-ville, à Es-Sedikkia, le centre Rahal-Abbas, qui regroupe les électeurs de plusieurs cités, était gardé par des agents encadrés par un officier qui tentait, au moment de notre passage, d'expliquer à un automobiliste que le stationnement était interdit. Dans un bureau, les agents semblaient s'apprêter à passer une morne journée. «Il est 9h30 et je n'ai reçu que 3 électeurs sur 570 inscrits. Je ne sais pas comment sera la tendance», dira un agent. Un autre plus optimiste se dira surpris par l'affluence. «Vous savez, en 2007, il n'y avait pas autant de monde. J'ai déjà 35 électeurs pour 500 inscrits. Je pense que les appels au boycott n'ont pas eu d'emprise sur la population de ce quartier qui compte pas moins de deux listes indépendantes engagées et les sièges de deux partis qui sont en course», affirme notre interlocuteur. L'arrivée des observateurs de l'UE à l'origine d'une certaine animation L'arrivée des observateurs de l'UE dans ce centre a créé une certaine animation. «Voilà, vous voyez, ils sont venus tôt alors que les représentants des listes et des partis n'ont même pas encore fait acte de présence», affirme pour sa part le responsable du centre. Dans le quartier de Haï El-Yasmine, qui regroupe une population qualifiée jadis de frondeuse, la cadence du vote ressemblait à s'y méprendre à celle de 2007. «C'est une cité qui regroupe une population issue des Planteurs. Elle est traditionnellement connue pour être frondeuse. Le FIS-dissous y avait trouvé un bon filon. Mais depuis, les choses ont changé et le profil des électeurs aussi», fera remarquer le responsable d'un bureau. Sur les lieux, une personne âgée affirmait à ceux qui voulaient l'entendre qu'elle vit un quotidien difficile mais qu'elle vote. «J'ai été rassurée par l'appel au vote du président de la République. Il faut donner une chance aux jeunes, c'est maintenant leur heure», dira-t-elle en exhibant fièrement son index gauche pour montrer qu'elle est passée dans l'isoloir. Dans le café de la cité, les discussions allaient bon train. Le vote, on en parlait comme s'il s'agissait d'un clasico. «Eh oui, d'habitude on n'est pas branché politique, mais on est obligés de s'y mettre», note Salim, un jeune pêcheur qui a hérité du métier de marin de son père. Pour lui, le choix était très simple. «J'ai choisi une liste indépendante menée par un jeune médecin que je connais. J'espère qu'elle obtiendra des sièges.» Notre première virée au centre de presse de la wilaya coïncidait avec le premier point de statistique. «En 2007, on avait enregistré, à 9h, un taux de 8,6% alors qu'aujourd'hui, il est de 3,01%», dira-t-il, avant de souligner que la journée est encore longue et que les électeurs afflueront comme à leur habitude aux dernières heures d'ouverture. Il fera remarquer que les observateurs de l'UE ont préféré établir seuls le programme. «Contrairement à ceux de l'UA et de la Ligue arabe, ceux de l'UE ne nous ont pas communiqué leur programme de vote», fera-t-il remarquer. Abordant les réserves émises par certains représentants de partis au niveau de la Cwisel sur la disposition des bulletins de vote au niveau des bureaux, il dira : «Tout a été fait pour assurer la transparence et la régularité du scrutin. Les cas signalés ont été pris en charge et tout baigne dans l'huile.» Cette précision était nécessaire après les accusations de volonté de fraude émises par les représentants de certaines listes qui avaient contesté la disposition des bulletins au niveau des bureaux. «Nous avons tiré au sort cette disposition et les responsables des bureaux n'en ont pas tenu compte», affirme le représentant du PNA au niveau de la Cwisel. Aux environ de 16h, le deuxième point de participation donnait un taux de 26,27%, un chiffre qui n'est pas loin de celui de l'année 2007, qui était de 26,45%. «Vous voyez, les gens sont maintenant bien réveillés. C'est l'après-midi que tout se jouera, nous aurons un bon taux de participation», jubile le représentant du FNL à la Cwisel. Les journalistes présents au centre de presse commençaient à s'organiser pour aller faire un dernier tour à travers les centres de vote avant de rejoindre la salle des opérations au siège de l'Emec d'Oran. «Ce sera l'occasion pour avoir les derniers chiffres et surtout de connaître les noms des futurs représentants de la wilaya à l'APN», soutient un confrère qui ne manquera pas de pester contre la qualité du café servi au niveau du centre de presse.