Malgré les réformes engagées par l'Etat et qualifiées de «répressives», et malgré la levée de l'état d'urgence, la situation des droits de l'homme en Algérie est dans un état de «stagnation», a estimé hier le président d'Amnesty International (AI) lors d'une conférence de presse au cours de laquelle a été présenté le rapport annuel, 50e du genre. «Stagner en matière de droits humains, c'est reculer», a noté le président d'Amnesty International section Algérie, M. Ali Yemloul, qui critiquera au passage les lois initiées dans le cadre des réformes politiques et adoptées au Parlement. «Les promesses de réformes sont contredites par des lois répressives», fait-il remarquer, citant celles relatives aux associations et à l'information. Pour le président d'AI Algérie, il est inutile «de mettre en place une batterie de réformes sur le plan économique et donc accorder des augmentations de salaires et le droit au logement, tout en restreignant le droit de s'exprimer et d'émettre ses opinions», estimant dans la foulée que les droits sont universels et indivisibles. «Les autorités continuaient de restreindre la liberté d'expression et de prohiber les rassemblements publics non autorisés. En janvier, des manifestations de masse à Alger, à Oran et dans d'autres villes ont été dispersées violemment par des milliers d'agents de la police antiémeute et autres forces de sécurité ; plusieurs personnes ont été blessées ou tuées. Dans les semaines qui ont suivi, des milliers de membres des forces de sécurité ont été déployés alors qu'étaient lancés des appels à manifester le 12 février à Alger et dans d'autres villes. Dans certaines régions, les autorités auraient également bloqué l'accès aux réseaux sociaux Facebook et Twitter afin d'entraver l'organisation et la coordination des manifestations», note le rapport d'AI dans son volet consacré à l'Algérie. Tout en rappelant la levée de l'état d'urgence après 19 ans, le rapport relève que «des restrictions sévères sur la liberté d'expression, d'association et de réunion ainsi que sur les pratiques religieuses» sont maintenues. Le rapport revient aussi sur les disparitions forcées. «Cette année encore, les autorités n'ont pris aucune mesure pour enquêter sur les milliers de disparitions forcées et autres violations graves des droits humains qui ont eu lieu au cours du conflit interne des années quatre-vingt-dix», faisant remarquer que «les forces de sécurité ont dispersé des manifestations organisées par des familles de disparus». Par ailleurs, le rapport déplore que «le gouvernement ait autorisé les rapporteurs spéciaux des Nations unies sur la liberté d'expression et le logement à se rendre en Algérie, mais, comme les années précédentes, il n'a adressé aucune invitation au rapporteur spécial sur la torture ni au Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires, qui sollicitaient pourtant de longue date l'autorisation de se rendre dans le pays». Le rapport évoque enfin les droits des femmes qui «continuent de subir des discriminations dans la législation et dans la pratique», ainsi que la liberté de religion et de conviction, la peine de mort et la lutte antiterroriste.