«Eminemment» politique, le dossier des disparus est «clos» pour Farouk Ksentini, qui a tenu à expliquer sa position par «l'aspect juridique» alors que les pouvoirs publics ont accepté l'envoi d'un groupe de travail onusien sur la question à la faveur de la visite effectuée par la commissaire des Nations unies aux droits de l'homme, Mme Navanethem Pillay. «Il n y a pas de contradictions entre mes déclarations et la décision des pouvoirs publics. Je me fie au texte de la Charte pour la réconciliation nationale. Je suis obligé de respecter la loi», répond Farouk Ksentini, président de la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l'homme (CNCPPDH), à la question du Temps d'Algérie, lors de son passage, hier, au Forum du quotidien El Wassat. «Maintenant, s'il y a une ouverture des responsables politiques, il n'y a aucun problème pour moi', justifie-t-il encore, avant de préciser : «Je m'en tiens seulement à l'aspect juridique. Je m'interdis de faire de la politique.» Pour Ksentini donc, le dossier est seulement clos du point de vue «juridique». L'avocat de Blida, qui a tenu tout de même à rappeler que 95% des familles de disparus ont accepté le principe de l'indemnisation et ont donc tourné définitivement la page, avoue qu'il a de la compassion pour ces familles. «C'est pour cela que j'ai été pour le principe d'indemnisation, chose qui n'était pas facile à faire admettre à l'époque aux pouvoirs publics. J'ai présenté l'indemnisation comme acte de solidarité, a-t-il dit, même si, poursuit-il, tous les milliards du monde ne peuvent soulager les familles». Dans le même contexte, le président de la CNCPPDH souhaite voir des «dispositions supplémentaires», se greffer à la charte pour la réconciliation nationale, notamment l'élaboration d'un statut particulier pour les familles de disparus, l'institution journée nationale des disparus mais aussi l'intégration dans le cadre du texte des «oubliés de la charte», comme les déportés dans le Sud qu'il a estimés entre 15 000 et 18 000 personnes et les femmes violées au maquis lors de la décennie noire. «Il faut suivre la philosophie de la charte et ne laisser personne au bord de la route», commente-t-il. L'institution qu'il préside reste ouverte, selon lui, à toutes les propositions. Pour mettre un terme «aux supputations» à propos de la CNCPPDH, qui dépend, rappelle-t-on, de la présidence de la République, Farouk Ksentini a révélé qu'il a sollicité le chef de l'Etat pour qu'elle soit constitutionnalisée. «Nous avons demandé au président de la République à ce que la CNCPPDH soit inscrite dans la prochaine Constitution. Elle doit être une institution constitutionnelle», a-t-il révélé. S'exprimant sur l'état des droits de l'homme en Algérie, 50 ans après l'Indépendance, Ksentini considère que le pays est «en bonne voie», mais relèvera qu'il y a encore beaucoup à faire, même si l'Etat a fait des efforts considérables. «Il y a une volonté politique et une demande incessante de la société civile. Tout le monde réclame aujourd'hui un Etat de droit», a-t-il noté. Mais un Etat de droit passe résolument par une justice indépendante et «compétente». Sur ce point, Ksentini considère qu'il y a un manque flagrant de «véritable qualification professionnelles», en témoignent, selon lui, les détentions provisoires «arbitraires», les décisions de justice qui ne sont pas toujours «bonnes» et qui aboutissent…au surpeuplement des centres de détention.