Les centaines d'anciens rappelés du service national durant la décennie noire n'ont pas pu entamer leur marche, hier matin, à partir de la ville de Draâ Ben Khedda vers la capitale. Leur action a été étouffée dans l'œuf. Un impressionnant dispositif sécuritaire, composé de plusieurs centaines de policiers antiémeutes, a empêché les marcheurs, venus de plus de 40 wilayas, de sortir même de la ville. Les hommes en tenue bleue ont bouclé toutes les issues de la ville dès les premières lueurs du jour. Les anciens rappelés, n'ayant pas d'autre choix, ont décidé sur place d'annuler leur action. Une marche, pour rappel, qui devait être entamée de la wilaya de Tizi Ouzou jusqu'à la capitale, sur une distance de plus de 100 km. Une décision qui a été prise suite à leur interdiction de marcher à Alger, le 1er octobre dernier. «Nous ne voulons pas entrer en confrontation avec les services de sécurité. Notre combat et pacifique et demeurera ainsi jusqu'à l'aboutissement de nos revendications légitimes», a réagi le chargé de communication du collectif des anciens rappelés, Ali Babassi. «Nous sommes armés de patience et de sagesse. Nous ne voulons pas de violence. Nous sommes parmi les Algériens qui ont payé un lourd tribut durant la décennie noire. Nous connaissons les conséquences de la violence, donc nous ne tomberons pas dans ce piège. Vraiment, c'est indigne de la part de nos responsables de nous empêcher d'exprimer pacifiquement notre revendication. Je profite de cette occasion pour dire aux Algériens et à ceux qui nous gouvernent que si la décennie noire est derrière, nous, les anciens rappelés, nous vivons toujours dans le noir et nous ne pouvons pas rester ainsi pour le restant de notre vie», dira un ancien rappelé de la région de Sétif. Les responsables du collectif des anciens rappelés tiendront dans les deux prochains jours une réunion pour décider d'autres actions de protestation. «Nous restons mobilisés et nous n'allons pas abandonner le terrain. Nos rangs ne cessent de grossir d'une action à l'autre et nous n'abdiquerons jamais tant que la plate-forme des revendications remise aux autorités concernées n'est pas entièrement satisfaite», souligne le chargé de communication des anciens rappelés. Hier à Draâ Ben Khedda, les marcheurs qui sont venus de plusieurs régions du pays ont décidé de renter chez eux, la mort dans l'âme. Ils sont très déçus que leur action a été empêchée, eux, qui étaient déterminés à rallier la présidence à pied pour faire valoir leurs droits. Certains d'entre eux n'ont pas caché leur colère. Il a fallu l'intervention de leurs collègues pour calmer les esprits. Depuis presque deux ans que ces anciens rappelés, dont le nombre est estimé à 250 000, ont entamé un combat sans relâche. Un combat qu'ils ne comptent «pas lâcher quel que soit le prix à payer», ne cessent-ils de répéter. Les anciens rappelés durant la période de 1994 à 1998, dans le cadre de la lutte antiterroristes, exigent, dans une plate-forme, la satisfaction de 11 revendications, dont un statut officiel, des indemnités, l'accès aux soins, au logement, au travail, etc. «Il n'est pas normal que des repentis qui ont mis le pays à feu à sang soient pris en charge dans le cadre de la loi de la charte sur la réconciliation nationale, alors que des anciens rappelés sont écartés», dénonce un ancien rappelé hier à Draâ Ben Khedda tout en exhibant des traces de balle sur son corps, souvenir d'un accrochage durant son service national.