«Les combattants islamistes du Mali sont une menace pour la Tunisie, qui est en train de devenir un corridor pour les armer», a estimé samedi le président tunisien Moncef Marzouki, alors que Tunis, Alger et Tripoli ont décidé de lutter ensemble contre le trafic d'armes. «La situation au Mali nous inquiète depuis toujours parce qu'on commence à savoir que nos propres jihadistes entre guillemets sont en relation avec ces forces terroristes. On a l'impression que la Tunisie est en train de devenir un corridor entre l'armement libyen et ces régions-là du Mali», a-t-il dit dans un entretien à la chaîne d'informations en continu France 24. M. Marzouki fait référence à un trafic d'armes issu de l'arsenal du colonel déchu Mouammar Kadhafi, qui vient alimenter via la Tunisie et l'Algérie les forces islamistes dans le nord du Mali. «Nous suivons avec beaucoup d'attention ce qui se passe dans ce nid de frelons, car il s'agit bien d'un nid de frelons qui peut menacer la sécurité de l'ensemble des pays, dont la Tunisie», a-t-il ajouté. Interrogé sur sa position concernant l'intervention militaire française au Mali pour appuyer l'armée contre les combattants islamistes, M. Marzouki s'est gardé d'apporter un soutien clair à Paris. «La situation est tellement complexe, bien-sûr, nous aurions préféré une solution politique négociée», a-t-il souligné. La France est intervenue au Mali, à la demande des autorités de Bamako, à la suite d'une offensive islamiste vers le Sud cette semaine. Le Nord est depuis début 2012 sous la coupe de groupes armés jihadistes, devenant un sanctuaire pour Al Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi). Dans ce contexte, les Premiers ministres libyen, Ali Zeidan, algérien, Abdelmalek Sellal, et tunisien, Hamadi Jebali, réunis samedi à Ghadamès, dans le sud-ouest de la Libye, ont décidé de créer des points de contrôle communs et d'intensifier la coordination et la coopération dans le domaine sécuritaire, pour lutter contre le trafic d'armes. Concernant la situation au Mali, avec qui l'Algérie partage des frontières, les trois Premiers ministres ont mis en avant la nécessité de trouver une solution politique à cette crise par le biais de l'incitation au dialogue entre les différentes composantes de la société malienne, de manière à préserver la souveraineté et l'unité de son territoire, selon leur communiqué. Une situation économique et sociale difficile Lors d'une conférence de presse à l'occasion de la clôture de la rencontre sur la sécurité au Maghreb, le chef du gouvernement tunisien, Hamadi Jebali, a prononcé une allocution dans laquelle il a souligné que «ceux qui ont lancé un appel à manifester sont certes libres puisque nous sommes dans un pays démocratique, mais il y a une responsabilité nationale à assumer». En effet, le chef du gouvernement a souligné qu'en plus de l'absence du développement régional à Ben Guerdane, le commerce parallèle a proliféré ainsi que la contrebande, mais également il subsiste encore des éléments de l'ancien régime en Libye, les trafiquants de drogue et, plus grave encore, les trafiquants d'armes. Selon Hamadi Jebali, tous ces éléments «dénotent d'une situation économique et sociale difficile dans la région et tous devraient assumer leur responsabilité afin d'y remédier. Il ne suffit pas d'appeler à manifester ou protester, car lorsque cela dégénère personne ne veut assumer ses responsabilités». En outre, le chef du gouvernement tunisien indique que la situation socio-économique est certes difficile, mais cela ne justifie, en aucun cas, les actes de vandalisme qui sont allés jusqu'au vol des armes dans le district de Ben Guerdane, même si ces dernières ont été restituées.