Le président tunisien Moncef Marzouki a dénoncé vendredi le trafic d'armes en Afrique du Nord, source d'insécurité dans le contexte de l'occupation du nord du Mali par des islamistes extrémistes armés. « Des quantités d'armes ayant appartenu au régime libyen sous Kadhafi sont passées aux mains des islamistes non seulement en Libye, mais aussi en Algérie et en Tunisie », a déclaré M. Marzouki dans un entretien en anglais publié par la revue britannique The World Today. Pour le président tunisien, le danger vient en particulier de ceux qui « se rendent au Mali pour s'entraîner au jihad, comme en Afghanistan, pour retourner ensuite en Tunisie ». « Le rétablissement de l'ordre au Mali sera un enjeu principal pour la diplomatie tunisienne durant les trois prochaines années », a-t-il souligné. Tunis est favorable à une solution politique au conflit dans le nord du Mali, une région tombée fin juin sous le contrôle de trois groupes islamistes armés, dont Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi). Le président tunisien a en outre indiqué avoir été « surpris, tout comme le gouvernement » par l'attaque de l'ambassade américaine le 14 septembre à Tunis par des extrémistes protestant contre un film islamophobe. « Nous n'avions pas mesuré à quel point les salafistes jihadistes pouvaient être violents et dangereux », a-t-il dit. « Nous avons sauvé la vie à l'ambassadeur (...) mais l'image de la Tunisie a été sérieusement endommagée aux Etats-unis et en Europe », a déploré M. Marzouki. Selon lui, les salafistes jihadistes ne représentent qu'une « petite minorité dans une petite minorité ». Ils « ne peuvent constituer une menace pour la société ou le gouvernement, mais ils peuvent être nocifs pour l'image du gouvernement », a-t-il expliqué. Le président tunisien a encore défendu son alliance avec le parti islamiste Ennahda, estimant que la Tunisie « avait la chance » d'avoir des islamistes modérés, en référence au parti qui domine le Parlement et gouverne le pays avec deux partis de centre-gauche. « Le centre doit tenir le coup », a-t-il insisté. Sur le retard pris dans l'élaboration de la Constitution, M. Marzouki a évoqué « plusieurs divergences ». « Nous devons nous trouver un consensus sur la nature du régime », a-t-il ainsi déclaré. Les islamistes souhaitent d'un régime parlementaire, le centre et l'opposition un régime mixte. Et il faudra ensuite « discuter de la loi électorale, ce sera sans doute plus problématique que la Constitution elle-même », a prévenu le président. « Tous les investisseurs locaux et étrangers attendent la nouvelle Loi fondamentale et un nouveau gouvernement, alors que situation empire de jour en jour » sur le front socio-économique en Tunisie. « Nous devons nous dépêcher (...), Le peuple sortira dans la rue si on ne lui redonne pas l'espoir de vivre mieux! », a-t-il lancé.