Le bilan de l'attaque du site gazier de Tiguentourine, à In Amenas, s'élève à 37 victimes étrangères de 8 nationalités différentes et un Algérien. Sept de ces victimes ne sont pas encore identifiées. Cinq personnes étrangères sont encore portées disparues. L'opération s'est soldée par l'élimination de 29 terroristes. Trois autres ont été capturés, a affirmé hier le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, lors d'une conférence de presse animée à Alger. Le Premier ministre est revenu sur l'attaque «criminelle et préméditée contre l'Algérie» perpétrée par un groupe terroriste composé de 32 éléments de 8 nationalités, dont 3 Algériens, 11 Tunisiens trafiquants, des Egyptiens, des Maliens, 2 Nigériens, 2 Canadiens et 1 Mauritanien. Cette attaque, poursuit M. Sellal, a été commanditée par le groupe dirigé par Belmokhtar et planifiée depuis deux mois par deux chefs terroristes, Ben Chenab Mohamed Amine, en collaboration avec Abou Bakar El Masri. «Ce groupe est venu de Agalhouk du nord du Mali, non loin de la région d'Aïn Tinzawatine. Il est passé de la frontière algéro-malienne à la frontière algéro-nigérienne avant d'entrer dans la région d'Abid, Ijil et Tiguentourine», a-t-il ajouté. La cible de ce groupe était «le bus qui transportait des travailleurs étrangers vers l'aéroport d'In Amenas. Ils voulaient retourner vers le Mali avec un grand nombre d'otages étrangers afin de pouvoir faire du chantage». Cette tentative a été avortée par les éléments de la Gendarmerie nationale qui escortaient le bus, lesquels ont répondu avec force aux premiers tirs. «Le premier plan des terroriste a donc échoué dans la mesure où parmi les passagers se trouvait le directeur de BP que ces éléments terroristes voulaient prendre en otage», a-t-il dit. «Cette opération s'est soldée par la mort d'un Britannique et plusieurs blessés», dira Sellal. Le groupe terroriste, muni d'un armement lourd et très sophistiqué, s'est ensuite scindé en deux groupes. Un s'est dirigé vers la base-vie et l'autre vers le complexe d'exploitation de gaz. Le ministre souligne que «trois des terroristes étaient des spécialistes en explosifs». Changeant de plan, ces terroristes voulaient «prendre en otage des étrangers et faire exploser le complexe gazier». «L'incursion à la base a été possible grâce à l'aide d'un ancien chauffeur nigérien qui travaillait dans cette base et qui a servi de guide dans cette opération». Le Premier ministre a rendu hommage au gardien de la base, première victime algérienne tuée. «Avant sa mort, il a donné l'alerte et c'est comme ça qu'une bonne partie des travailleurs a pu s'enfuir et non sans prendre le temps de décompresser les équipements», a-t-il ajouté. Les terroristes ont pris en otage les étrangers qu'ils ont «minés» avec des ceintures explosives et ont miné tout le complexe dans la perspective de le faire exploser. La négociation était impossible Sellal nous apprend également que les éléments de l'ANP ont tenté des négociations avec les terroristes mais ces derniers formulaient des exigences «anormales et inacceptables» que l'Algérie ne pouvait satisfaire, comme la libération de détenus et autres. «La négociation est donc devenue impossible», a-t-il soutenu. C'est à ce moment que le premier assaut des unités spéciales a été donné. «La mission a été très difficile durant la nuit dans la mesure où les terroristes avaient préparé des véhicules pour fuir avec les otages vers le Mali. Ils n'ont pas pu le faire vu le dispositif terrestre et aérien mis en place autour de la base», dira le ministre. Les terroristes ont tenté, le matin, de se déplacer vers le complexe de gaz avec les otages pour rejoindre l'autre groupe. «C'est à ce moment que trois véhicules ont explosé et que Ben Chanab Mohamed Amine, l'un des chefs terroristes, est décédé. Le deuxième assaut «d'une grande intelligence et professionnalisme» perpétré par les «snipers» de l'ANP est intervenu dans le complexe avec comme objectif de sauver les otages et éviter de faire exploser le complexe. «L'incendie qui s'est déclenché a été maîtrisé, mais il y a eu assassinat collectif d'otages d'une balle à la tête perpétré par les ravisseurs», a-t-il affirmé. Le complexe gazier de Tiguentourine employait 790 travailleurs dont 134 étrangers de 28 nationalités. Sellal a affirmé : «La position très forte et la réponse de l'ANP sont intervenues au moment où il fallait et avec les moyens qu'il fallait». «Cela démontre la volonté de l'Algérie de ne pas laisser le terrorisme vivre parmi nous et passer par notre territoire», a-t-il dit. Il a estimé la réussite de cette opération «d'acceptable». Pour lui, ce qui s'est passé à Tiguentourine n'est pas «un manque de vigilance» dans la mesure où tous les sites pétroliers sont équipés d'un système de sécurité à trois niveaux. Il n'a pas exclu «la révision prochaine de ce système pour assurer un maximum de sécurité». Pas de recul sur le Mali Le Premier ministre a réitéré la position algérienne vis-à-vis du conflit malien, un des motifs présumés de cette attaque. «Les terroristes voulaient pousser l'Algérie au recul», a-t-il dit. «Nous sommes partisans du dialogue, mais quand la sécurité et la stabilité de notre territoire est en jeu, il n'y a plus rien à discuter», a-t-il dit. «Notre position est claire. L'intégrité du Mali doit être préservée. Mais pour nous, il est question de mettre fin aux activités des groupes terroristes et nous n'allons pas reculer devant la menace», a-t-il dit. «Notre principe est de ne pas nous ingérer dans les affaires internes du Mali et notre armée n'ira pas au-delà de nos frontières. Nous avons décidé cela en toute souveraineté», a-t-il ajouté. A propos de l'autorisation du survol du ciel algérien par les avions français qui mènent une intervention militaire au Mali, le Premier ministre dira : «L'Algérie a agi conformément à la légalité onusienne», rappelant l'adoption «d'une résolution de l'Onu sur cette intervention décidée par tous les pays du monde», a-t-il indiqué. Il a reconnu, cependant, que ce qui se passe au Mali va toucher la sécurité du sud algérien et il est nécessaire de maîtriser la situation au Mali. «On ne va pas nous ingérer au Mali ni permettre aux terroristes de porter atteinte à notre pays», a-t-il ajouté. Selon lui, l'Algérie va renforcer la sécurité au niveau de ses frontières, conformément aux accords signés récemment avec la Libye et la Tunisie. Nouria Bourihane Le président Bouteflika a suivi l'opération Abdelmalek Sellal a affirmé que «cette opération a été suivie par le président Abdelaziz Bouteflika et par les responsables concernés». Le Premier ministre a eu «des contacts directs avec tous les dirigeants des pays et des chefs de gouvernement, dont les Etats-Unis, la Grande-Bretagne, la Tunisie, l'Egypte, la Norvège, le Japon et autres afin de les informer sur le déroulement de l'opération de libération des otages».