La section algérienne d'Amnesty International (AI) s'est alarmée, hier, du fait que de graves violations des droits humains et du droit international aient été perpétrées au cours de l'intervention au Mali. L'ONG interpelle les groupes islamistes, l'armée malienne et l'armée française afin que cessent ces manquements à la dignité humaine. Un document élaboré par des agents de AI, sur la base de témoignages recueillis dans les villes de Ségou, Sévaré, Niono, Konna et Diabaly «établirait la responsabilité de l'armée malienne dans de graves violations des droits humains et du droit international humanitaire, notamment des exécutions extrajudiciaires de civils». Après examen de ce document, Gaëtan Mootoo, chercheur à Amnesty International sur le Mali, a déclaré que «toutes les parties au conflit doivent veiller au respect du droit international humanitaire, en particulier au traitement humain des prisonniers et prendre toutes les précautions nécessaires pour éviter les dommages causés aux civils». Il a expliqué que «les témoignages recueillis la veille de l'intervention française prouveraient que l'armée malienne a arrêté et exécuté de manière extrajudiciaire plus d'une vingtaine de civils, principalement dans la ville de Sévaré». Ce responsable interpelle les parties française et malienne afin que «les forces de sécurité veillent à ce que les civils soient protégés de toutes représailles sur la base de l'appartenance ethnique ou de sympathie politique présumée». L'ouverture immédiate d'une enquête indépendante sur tous les cas d'exécutions extrajudiciaires et la suspension de tout membre du personnel de sécurité soupçonné d'implication dans des violations des droits humains sont réclamées par l'ONG. Des enfants enrôlés dans le conflit AI a recueilli des témoignages d'homicides illégaux perpétrés par les groupes armés. Un témoin a affirmé que «des membres des groupes islamistes armés avaient sommairement tué cinq soldats maliens blessés ainsi qu'un civil dans la ville de Diabaly, après sa prise par des groupes islamistes armés». En outre, l'organisation détient des informations selon lesquelles des membres des groupes armés ont enrôlé de force des enfants soldats dans leurs rangs. A Diabaly, plusieurs personnes ont raconté «qu'elles avaient vu des enfants, certains âgés de dix ans, armés de fusils aux côtés des combattants islamistes». A Ségou, l'organisation a pu s'entretenir avec deux enfants soldats en détention dont l'un présentait des signes de déficience mentale. AI estime qu'«il existe également des indices troublants sur la mort de cinq civils, dont une mère et ses trois jeunes enfants tués dans un raid aérien lancé dans le cadre d'une contre-offensive menée par les armées française et malienne». La frappe se serait produite le matin du 11 janvier 2013, au premier jour de l'intervention française, dans la ville de Konna. Des responsables français ont déclaré à AI «qu'ils n'avaient pas effectué de frappe à cette heure à Konna», tandis qu'un membre du gouvernement malien et un haut responsable militaire malien ont confirmé «qu'une opération avec la participation de l'armée française avait ciblé la ville dans la matinée du 11 janvier». Ce responsable juge qu'«il est impératif que la France et le Mali ouvrent une enquête afin de déterminer qui a effectué cette attaque. Les résultats doivent être rendus publics dans leur intégralité afin que l'on puisse déterminer s'il y a eu violation du droit international», a-t-il fait savoir.